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Astrid Bouchedor, permanente dans une ONG à Bruxelles

Publié le 2 octobre 2014

Titulaire d’un Master en Economie Sociale et Solidaire après un parcours de mobilité qui l’a conduit d’Australie en Belgique, Astrid s’est lancé un défi : fêter ses 30 ans au sommet du Piton de Neiges... et son retour à la Réunion. Elle quitte, à 29 ans, un poste de chargée de plaidoyer dans une ONG alimentaire à Bruxelles, sans renier un parcours qui même le militantisme et le journalisme.


Astrid Bouchedor

Racontez-nous votre parcours

J’ai passé mes années lycées entre Saint-Leu et Les Avirons et je crois que Saint-Leu reste ma ville de cœur… J’ai quitté La Réunion juste après le bac pour une classe préparatoire à Lyon : une expérience très éprouvante. Je n’ai pas réussi à trouver ma place en métropole, la démarche trop élitiste de la classe prépa m’a complètement démotivée et déprimée. Je me souviens encore de mon arrivée en savates à l’internat et dans ma nouvelle classe : une entrée remarquée dans ce qui était l’un des lycées les plus chics de Lyon ! Ce sentiment de « décalage » ne m’a jamais quitté.

Qu’avez-vous fait ?

Après un retour quelques mois à La Réunion pour digérer cet "échec", je suis partie en Australie pour effectuer des études de journalisme. Ma première année à Perth est une formidable découverte : le côté sauvage de l’Australie Occidentale, loin des sentiers battus, l’authenticité du pays. J’ai ensuite rejoint la côte est à Surfers Paradise, pour me rapprocher des grands pôles économiques, politiques (puisque je commençais alors à écrire mes premiers articles), et bien entendu les spots mythiques de surf… Je suis finalement restée deux ans de plus en Australie.

Et ensuite ?

Mon « bachelor » en poche, je suis rentrée à Lyon. Je voulais prendre le temps de réfléchir avant de me lancer dans un nouveau cursus universitaire. J’ai donc travaillé quelques temps comme serveuse le soir. Je me suis aussi engagée auprès de deux associations : Artisans du Monde et Médecins du Monde. C’est ce qui m’a motivé pour le choix de mon Master d’économie, avec une spécialité en Economie Sociale et Solidaire. Après de premières expériences, début 2014, une opportunité professionnelle se présentait à Bruxelles, je me suis donc installée en Belgique. Aujourd’hui, je travaille pour l’ONG FIAN qui milite pour le droit à l’alimentation. Je suis chargée de plaidoyer, ce qui veut dire que j’ai enfin trouvé l’emploi qui me permet de réunir mes deux passions : l’écriture et le militantisme !

Quels sont vos projets ?

J’ai choisi de retourner vivre à La Réunion en octobre 2014… pour une durée indéterminée ! Nous avons le souhait avec mon conjoint de démarrer un nouveau projet professionnel et personnel. Passionnés par les questions d’écologie, de solidarité, de développement local, nous croyons vraiment à la force citoyenne et aux notions d’économie collaborative. Notre expérience nous a permis d’acquérir des compétences en gestion de projet, en formation et animation. Bref, nos têtes fourmillent d’idées et nous avons envie de les confronter avec la réalité du terrain à La Réunion, tout en prenant le temps de rencontrer les gens, d’écouter « vivre » La Réunion... Mais l’envie et l’énergie sont là !

Que vous a apporté l’expérience de la mobilité ?

Je me considère extrêmement chanceuse d’avoir pu réaliser une partie de mes études en Australie. Cela n’aurait jamais été possible sans le soutien financier de La Réunion. Mes petits boulots et le soutien de ma famille seuls ne m’auraient jamais permis de rester aussi longtemps. L’apport principal restera bien entendu l’anglais, que je maîtrise parfaitement et ce « petit plus » sur mon CV qui intrigue de potentiels recruteurs. Ces différentes expériences à l’étranger m’ont surtout apporté de très belles rencontres humaines. Je peux me vanter d’avoir des amis sur chaque continent ! Et je ne me sens jamais seule quand j’arrive dans une nouvelle ville, un nouveau pays : il y a toujours un ami, ou un ami d’ami pour m’accueillir ! Les Réunionnais restent très solidaires entre eux, c’est aussi une force. J’en ai rencontré beaucoup sur mon chemin en Australie ou à Bruxelles. Et je pense qu’en venant de La Réunion, l’expérience de la multi-culturalité se révèle être un véritable atout pour travailler dans les milieux internationaux.


Astrid Bouchedor

Quels objets de la Réunion vous ont suivi lors de vos voyages ?

Ce sont de petits objets plutôt symboliques ou pratiques : un poster, une peluche, un t-shirt, des savates, que je conserve précieusement. Et puis bien sûr, la confiture de goyavier de ma maman et des petites préparations de rhum arrangé arrivent régulièrement par La Poste… Je garde aussi le contact par la lecture régulière de la presse locale. Ma grande amie de lycée, après avoir passé presque 10 ans en métropole, est rentrée à La Réunion il y a quelques années.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

La Réunion se trouve dans une situation socio-économique complexe. Sa croissance économique est très largement artificielle et assise sur une grande dépendance. Le système est peu productif et, depuis quelques décennies, le modèle social de plus en plus consumériste. Dans un contexte global dégradé, et malgré un dynamisme économique certain, l’île ne parvient pas à résorber le chômage, accentué par la croissance démographique. Mon expertise au sein de l’ONG FIAN en Belgique portait sur l’accès à la terre pour les agriculteurs. Je suis donc très sensible aux questions liées à la gestion du foncier (équilibre zones urbaines / zones rurales), et à la gestion des ressources qui sont devenues aujourd’hui des enjeux stratégiques à La Réunion. Pour tirer avantage des potentialités de l’île, il devient urgent de créer une rupture avec l’actuel « modèle » de développement, et la course à la consommation. Je crois sincèrement à l’approche prônée par l’économie sociale et solidaire : elle permettrait aux Réunionnais de devenir « acteurs » de leur territoire.

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

La Réunion est assez méconnue en Belgique, et il y a souvent une confusion avec Les Antilles… Alors ça donne lieu à d’intéressants quiproquos ! Mais dans l’ensemble c’est encore souvent l’image de l’île paradisiaque qui est véhiculée. Certains ont entendu parler des attaques de requins par le biais des médias.

Vous même, quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

J’aime beaucoup la Belgique et les belges en général. Ils ont su garder cette simplicité, dans le bon sens du terme, que les Français n’ont pas/plus. Les rapports sont faciles et les gens sont très accessibles. Le sens de l’humour des Belges est redoutable ! Bruxelles est particulièrement cosmopolite, j’aime entendre les gens échanger dans des dizaines de langues différentes dans la rue, dans les transports en commun … Et puis, il est incroyable que dans un si petit pays se côtoient trois communautés linguistiques !

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