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Crise Ebola en Afrique de l’Ouest : une Réunionnaise témoigne

Publié le 19 octobre 2014

Professeur au lycée français de Lagos, capitale du Nigeria, Géraldine Dion vit dans un des pays touchés par le virus Ebola. Cette Dyonisienne décrit les mesures prises sur place par les autorités sanitaires pour enrayer la propagation de l’épidémie.

18 octobre 2014

Avec Margaret et Dodeye

Pouvez-vous vous présenter s’il-vous-plaît ?

J’ai 35 ans et je suis originaire de Saint-Denis où résident mes parents. Il y a deux ans, j’ai quitté la Réunion pour venir enseigner au Nigeria. J’ai signé pour trois ans en tant que professeur d’espagnol au lycée français de Lagos.

Quelle est la situation de l’épidémie Ebola au Nigeria ?

Dans ce pays, sur 20 cas recensés, il y a eu 8 décès, soit un taux de mortalité inférieur a 50 %. Les autorités ont réagi relativement vite et avec sérieux. Elles étaient parfaitement conscientes de la catastrophe que représenterait la propagation du virus dans une mégalopole comme Lagos, de près de 20 millions d’habitants. La population et les autorités me semblent vigilants et on considère ici le risque de pandémie limité.

Quelles sont les mesures prises dans le pays pour contrer l’épidémie ?

Dans tous les lieux publics, l’hygiène est mise en avant. Des lotions désinfectantes pour les mains sont mises à disposition. Pour entrer dans certains établissements, la température corporelle doit être contrôlée. Ces deux mesures sont par exemple en œuvre dans le lycée où je travaille. Enfin à l’aéroport, les mesures de précaution sont renforcées : questionnaire et vérification systématique de la température. Pour autant, toutes les activités ont repris normalement. Je ne ressens pas au quotidien de tension ou de crainte excessive parmi la population.

Constatez-vous que votre entourage est inquiet ?

La population a été soigneusement informée sur la maladie : comment elle se manifeste et se propage. Par exemple dans mon lycée, l’infirmière scolaire a organisé une séance d’information pour toutes les classes. Nous sommes maintenant conscients que les risques se limitent à des situations bien particulières. Personnellement, j’ai l’impression que les premiers cas hors du foyer d’origine ont permis une prise de conscience au niveau continental. Hélas, c’est seulement quand la maladie s’est propagée au-delà qu’il y a eu une véritable réaction au niveau planétaire.

Géraldine en bas à gauche avec une de ses classes du lycée français de Lagos

Vous qui avez connu la crise du chikungunya à la Réunion, comment comparez-vous la réaction de la population au Nigeria ?

J’ai vécu cette crise à La Réunion et la réaction me semble comparable. Il y a dans les deux cas une prise de conscience des attitudes à risque et une modification des habitudes en fonction de cela. Tout le monde est à présent plus attentif à l’hygiène. Par exemple les gens se lavent les mains beaucoup plus fréquemment. Cela me rappelle quand chaque Réunionnais s’est mis à nettoyer son jardin consciencieusement pour éviter la propagation des moustiques.

Plus généralement, quel est votre regard sur le pays où vous vivez ?

Le Nigeria est un pays à fort potentiel : PIB en hausse, économie dynamique, population volontaire et travailleuse... Mais la croissance démographique rapide constitue un handicap et les choses mettent du temps à se mettre en place. Le pays reste marqué par les inégalités et un seuil important de pauvreté.

Qu’est ce qui en tant que Réunionnaise vous y rappelle notre île ?

Comme dans pratiquement tous les pays africains, la richesse musicale me rappelle beaucoup la Réunion. Le Nigeria est le pays où est né l’Afrobeat (nous célébrons d’ailleurs cette semaine Fela Kutti, considéré comme fondateur de ce mouvement musical). Le Nigeria est aussi marqué par la présence de nombreuses cultures et de peuples différents, mais inversement à la Réunion, il y a peu de mélange ou de métissage.

Article publié dans Le Quotidien du 19 octobre 2014


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