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Les origines tamoules de l’identité réunionnaise « malbar »

Publié le 10 août 2009

Par Dominique Jeantet. Les ancêtres des Réunionnais malbar étaient pour la plupart des dravidiens originaires du Tamil Nadu en Inde. Les modifications apportées par le congrès de Vienne de 1815, interdisant la traite des Noirs, occasionnent une première prise de conscience chez les habitants de l’île Bourbon qui songent alors déjà à une main d’œuvre locale de remplacement des esclaves de leurs plantations de canne à sucre.

Réputés dociles, les Indiens sont pressentis et, partie en 1827, la goélette « La Turquoise », rapporte à son retour en 1828 les premiers engagés Indiens. À l’instar des Noirs, ils sont considérés comme une race inférieure, incapable de raisonnement. De plus, certaines méthodes de recrutement douteuses recourent parfois à des engagements forcés, avec des contrats trompeurs. Dans les plantations, les engagés Indiens subissent de mauvais traitements et les calbanons, bâtiments en maçonnerie ou en paille, dans lesquels ils sont regroupés, offrent très souvent des conditions d’hygiène déplorables et la nourriture est contraire à leurs habitudes alimentaires.

Les engagés Indiens à La Réunion ont dû s’adapter aux contraintes assimilatrices, certains en adoptant la religion catholique comme facteur d’intégration, la plupart des autres en s’efforçant de rester fidèles aux valeurs et aux rites ancestraux, ce qui correspondait à un besoin profond lors de leur exil. Dans le système familial fondé sur la famille élargie, les aïeuls décrivaient aux enfants les grandes épopées hindoues, les mères de familles racontaient des contes populaires. On célébrait les rites domestiques mais également des fêtes annuelles comme « Pongal ».

L’hindouisme populaire s’est maintenu à La Réunion et sert de marqueur identitaire. Il repose sur un ensemble de pratiques domestiques et de rituels comme les cérémonies en l’honneur des déesses Marliémen et Karli, sur la pérennité des grandes fêtes religieuses annuelles comme le Nouvel An, Kāva i, la marche sur le feu, Dīpāvali... Mais la culture tamoule, héritage des Réunionnais « malbar » se perpétue également dans l’architecture des temples, la tenue vestimentaire, les pratiques artistiques, l’étymologie tamoule de certains mots créoles... tout autant de thèmes identitaires qui, une fois mieux connus, nous apprennent à mieux nous apprécier les uns les autres et renforcent la connaissance du métissage réunionnais.

Ce texte introduit une série d’articles de Dominique Jeantet sur les influences tamoules à la Réunion. A lire également :

Une grande fête dravidienne : « Pongal »

Le temple Ekambaranatar de Kanchipuram

Un conte populaire du Tamil Nadu : Lumière et Prospérité

Kāraikkāl Ammaiyār : la démone (pēy) tamoule

Le repas indien : de la nourriture et des manières de table au sud de l’Inde

La fête des lumières tamoule : « Karthikai Deepam »

Une ancienne tradition tamoule peu connue : le « maṭalūrtal »

Le temple Brihadishwara de Thanjavur

Un conte populaire du Tamil Nadu : « Aya Kappan qui devint roi »

Andal (āṇṭāļ) : la déesse de Srivilliputtur

Une œuvre littéraire tamoule majeure : Le Silappadikāram de Ilango Adigal

Le temple Ucchi Pillayar de Tiruchirapalli

Un instrument de musique karnatique traditionnel : la veena

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Dominique Jeantet, passionnée de la langue tamoule, a passé plusieurs années en Inde avant de devenir enseignante spécialisée auprès d’enfants et adolescents en difficulté en région parisienne. La lecture de « Zistoir Kristian » et les paroles riches en expressions locales des chansons de séga de l’île de La Réunion l’amènent plus tard à découvrir et à étudier la langue créole pour laquelle elle est devenue une militante. En même temps, profondément consciente de la place de l’identité dans l’épanouissement humain, elle essaie de créer un pont entre le Tamil Nadu et La Réunion par des récits-rencontres à la recherche des origines tamoules.

Lire aussi : La diaspora indienne, instrument du rayonnement de l’Inde dans le monde

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