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Solidarité et Engagement pour l’Espoir - un texte d’Eric Alendroit

Publié le 16 janvier 2015

« Grâce au peuple français, debout et digne, les terroristes ont échoué mais la vraie victoire pour la paix résidera dans la capacité des peuples à faire face à des dirigeants qui vont persister dans leur politique inspirée de la cupidité et de l’idéologie de la supériorité. »


Eric Alendroit

La France a connu les 7 et 8 janvier dernier un attentat et deux prises d’otages meurtriers qui ont fait un total de 20 morts (y compris les trois assassins terroristes). Ces attentats ont été perpétrés au nom de l’Islam. Ils sont condamnables, sans réserve.

Tous ces morts sont des Français.

L’émotion est vive. La France est en état de choc et cette tuerie nous touche pleinement. Les premiers élans populaires ont exprimé tristesse, solidarité et aussi un espoir. Le peuple s’est mis debout et a exprimé son attachement à cette liberté d’expression et plus généralement aux valeurs humanistes.

Ce drame, avec tout le respect que l’on doit aux morts, à leurs familles et à leurs proches, doit nous conduire – en toute humilité – à la lucidité en regardant les autres réalités qui lui sont totalement liées et peuvent participer à l’éclairer.

Nous vivons dans un monde rendu violent par le système de profit. Un monde où se poursuivent depuis au moins un siècle des politiques hégémoniques visant à accaparer les ressources au bénéfice de quelques-uns et laissant le reste du monde dans un état de délabrement permanent. Un monde où les dominants ne respectent pas les différences culturelles et opposent les civilisations. Un monde où, au nom des valeurs de démocratie, on viole constamment les règles de droit international. Et ceux qui les édictent et ont les moyens de les faire respecter sont les premiers à les transgresser.

Le soutien aux dictateurs, aux rebelles et aux fanatiques religieux est monnaie courante de la part des pays occidentaux dès lors que cela sert leurs intérêts économiques et financiers, et tout simplement leurs positions de domination géopolitique.

Quel crédit accorder alors à la dite lutte contre le terrorisme ?

Si le terrorisme était auparavant représenté par des étrangers poseurs de bombes, aujourd’hui il s’agit de plus en plus d’enfants du pays. Les trois assassins terroristes sont des jeunes gens français qui se détournent de leur pays au point de devenir des assassins contre celui-ci. Pourquoi ? Comment ? Pourquoi en France, pays héritier de l’histoire coloniale, il est si difficile pour les Musulmans, les Noirs, les Guadeloupéens, les Guyanais, les Martiniquais et les Réunionnais… d’exister pour ce qu’ils sont dans leurs différences ? Le discours sur la diversité serait-elle juste une façade de plus comme celui sur le métissage pour faire oublier les inégalités, l’ostracisme, la discrimination et le racisme permanent vis-à-vis de ces Français-là ? Quelle place réelle les Musulmans ont-ils en France et quelle place s’autorisent-ils à prendre ?

Comment ne pas s’interroger sur ce que peut signifier la décision prise aujourd’hui par les pouvoirs publics de financer Charlie Hebdo alors que dans le passé – encore récent - ils le fustigeaient ? Le respect de la liberté d’expression ne comptait pas lors des censures de 1961, 1966 et 1970 et pas plus pour fermer ce média en 1982. La satire du moment touchait-elle d’une façon particulière leurs propres symboles ? L’insulte serait-elle fonction de la couleur de peau ? Et le blasphème fonction de la religion ? Pourquoi faut-il censurer un artiste qui caricature un colon juif et exhorter au respect de la liberté d’expression quand un journal publie des caricatures du Prophète Mahomet ? Comment s’exerce cette liberté d’expression quand il s’agit d’informer sur les attentats terroristes menés par des Etats occidentaux contre des populations civiles ? Au nom de quel fanatisme peuvent-ils tuer des enfants Irakiens, Vietnamiens, Laotiens, Palestiniens ?

La liberté d’expression serait-elle dénuée d’intelligence, de modération, de respect ?

Au fond, ce qui est arrivé est conforme à la façon dont le monde est mené. Il n’y a pas d’erreur. La violence permanente, le déni et la domination engendrent une impuissance des peuples qui conduit certains aux fanatismes religieux voire à d’autres formes d’extrémismes. Le monde occidental n’a aucune chance d’être protégé du dérèglement du monde qu’il a occasionné en Afghanistan, en Irak, au Pakistan, Syrie…et partout où au nom de « La » civilisation on exploite les peuples et leur impose des modèles pensés ailleurs et au profit d’autrui.

L’espoir de ne plus vivre les drames du 7 et 8 janvier supposerait que l’on change nos regards sur nous et sur les autres, sur les liens qui nous lient en qualité d’êtres humains. Les dirigeants sont-ils conscients ? Sont-ils dans la volonté sincère de faire autre chose et autrement ? Pourquoi cette surenchère sécuritaire ? Pourquoi encore plus de moyens de combat, pour mener la guerre contre un ennemi que nous avons, sinon créé, très largement entretenu ? Comment lutter contre les siens dorénavant ?

Nous guérirons de nos maux quand nous serons prêts au respect, à l’amour et au partage. Nous guérirons de nos maux quand nous cesserons les hypocrisies, la propagande et l’endoctrinement étatiques. Nous guérirons de nos maux quand le peuple reprendra toute sa place pour exercer son pouvoir confisqué par des élites intéressées et manipulatrices.

Grâce au peuple français, debout et digne, les terroristes ont échoué mais la vraie victoire pour la paix résidera dans la capacité des peuples à faire face à des dirigeants qui vont persister dans leur politique inspirée de la cupidité et de l’idéologie de la supériorité.

Eric Alendroit

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