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Thomas Sigismeau, volontaire en service civique en Amazonie

Publié le 14 décembre 2016

A 25 ans, diplômé d’un Master 2 en Commerce International, Thomas a été touché par le virus du voyage. Après Taïwan, ce passionné de rugby originaire du Tampon a pris la direction du Pérou où il vit et travaille au milieu d’une communauté native de Shipibos. Interview.

« Ici on me prend souvent pour un Brésilien »

D’où êtes-vous à la Réunion ?

Né d’une Maman mauricienne et d’un Papa réunionnais, j’ai grandi à l’île Maurice jusqu’à l’âge de 14 ans avant de m’installer à la Réunion. Mon fief, c’est le Tampon (n clin d’œil à tous les gars Trois-mares sans oublier le Rugby Club du Tampon !). On me pose souvent la question et c’est très clair : je me sens autant Réunionnais que Mauricien, bien qu’avec les voyages et expériences, un sentiment de citoyen du monde s’éveille...

Racontez-nous votre parcours.

A l’issue de mon baccalauréat, je me suis envolé pour voir d’autres horizons. Les premières années en métropole se sont bien déroulées, grâce notamment à la présence des amis de la Réunion. Puis j’ai commencé à prendre des risques, à sortir du cadre. Mon parcours universitaire a fait que les contacts avec diverses nationalités se sont multipliés. Comme point culminant, il y a eu un échange universitaire de cinq mois à Taïwan qui s’est révélé gagnant, avec une immersion totale au sein du club de Rugby Universitaire, une culture et un environnement très différents. J’étais l’étranger de l’équipe ; je me suis retrouvé à vivre toute une expérience avec eux : les matchs, les rituels particuliers, les déplacements dans d’autres villes...

Et ensuite ?

A l’issue des études, j’ai eu plusieurs mois de questionnement et de mobilité. J’ai entamé la quête qui m’a amené jusqu’au Pérou pour cette mission au sein de l’association Cœur de Forêt. Mon travail consiste à améliorer l’activité économique d’une coopérative produisant des huiles essentielles, du parfum à partir de plantes aromatiques et médicinales.


Racontez-nous vos débuts au Pérou.

Le lendemain de mon arrivée au village de San Francisco, voulant me rendre à la ville la plus proche, Pucallpa, après une nuit de fortes pluies, je me suis retrouvé dans le coffre d’une voiture entre une poule vivante dans son sac « gonni », des ballots de légumes et un seau de poisson frais… Nous étions 15 dans la voiture !

Décrivez-nous votre environnement.

Aux portes de l’Amazonie, après quelques heures de barque, on s’enfonce dans la jungle sauvage. J’ai l’impression de vivre une vie antérieure avec les traditions, le chamanisme du peuple Shipibos mais aussi la technologie du monde d’aujourd’hui. Un exemple dans le village de San Francisco : il y a encore une grande majorité de cases en toits faits de feuilles de palmiers. Et pourtant on peut découvrir à l’intérieur un grand écran plat LCD dernier cri. Ce village traduit bien le phénomène de globalisation/mondialisation. On est là entre deux mondes et c’est très impressionnant culturellement.

Quels sont les problèmes rencontrés par cette communauté ?

La région a connu beaucoup de déforestation, on est en plein cœur du problème ici. Le phénomène d’exode rural et la poursuite du rêve « Limean dream » poussent de nombreux jeunes à quitter leur village pour la ville. Plus globalement, le Pérou regroupe différentes ethnies, peuples de la montagne, de la côte, de la jungle. Ca donne des envies de voyage !


En tant que Réunionnais, qu’est-ce qui vous paraît le plus proche / le plus éloigné par rapport à notre île ?

Ce qui parait le plus proche, c’est l’esprit communautaire avec les notions de grandes familles qu’on retrouve dans l’Océan Indien. Le peuple Shipibos a son propre dialecte mais la langue officielle au Pérou est le l’espagnol (castillan). Alors cela rappelle le lien Kréol-Français. Ce qui est le plus éloigné, c’est le chamanisme du Peuple Shipibos qui est très particulier avec toute une histoire et des coutumes uniques.

Quels sont vos projets ?

A court-terme : Partager ma passion du Rugby avec les enfants du village et voyager plus dans la région.
A moyen-terme : Fructifier mon travail sur cette mission Pérou
A long-terme : Retourner dans l’Océan Indien, renforcer les liens entre les deux îles sœurs (Maurice et Réunion) et continuer à approfondir la citoyenneté du Monde.

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

Les avantages, c’est de pouvoir comprendre les réflexes de ladi lafé du village. J’ai aussi retrouvé ici des « connaissances » : cafards, araignées, lézards... avec toutefois quelques nouveautés : mygales, lucioles, perruches, toucans… L’inconvénient, c’est le sentiment d’éloignement. Je préfère ne pas compter les kilomètres qui me séparent de la famille et les neuf heures de décalage horaire sont parfois pénibles pour avoir une conversation.


Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Après un mois et demi ici, j’ai eu la belle surprise de rencontrer deux Réunionnais dans un village perdu de l’Amazonie, venus pour effectuer un reportage sur le chamanisme dans le village et faire un reportage sur les actions cœur de forêt !

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

On ne le dit jamais, assez, mais la Réunion est dotée d’une belle cohésion sociale. La quitter, s’en éloigner, permet de clarifier ce point. Economiquement parlant, c’est autre chose. Le taux de chômage des jeunes, le coût de la vie et l’assistanat économique ne sont pas à notre avantage. Il faut aider les jeunes à bien partir pour se former et ouvrir les portes qu’on ne peut ouvrir depuis l’île. Mais il ne faut pas oublier à les aider à mieux revenir. La fuite des cerveaux et le népotisme ne nous aident guère à avancer...

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

La famille, un après-midi posé sur la plage de l’Etang salé, les samedis match de rugby ! Plus globalement c’est le rythme de vie de la Réunion qui me manque parfois.


Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

J’ai toujours sur moi des photos et cartes postales de la famille que j’accroche dans ma chambre. Avant de partir en Amérique du Sud, j’ai pris soin d’acheter les deux drapeaux : Maurice et Réunion.

CONCLUSION :

Inspirer, partager est le but premier de cette interview. Je me rappelle au lycée d’un intervenant qui était venu partager son expérience de mobilité et à son tour en inspirer d’autres. Il avait « semé des graines » dans nos esprits . Alors à mon tour je sème ces graines. A défaut d’avoir un blog que je ne pourrai actualiser, je vous invite sur cette page Facebook où je partage quelques photos. N’hésitez à y exprimer vos pensées : www.facebook.com/lightupthehopeMauRun


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