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Lauriane Schulz, chargée de coopération culturelle à Maputo

Publié le 12 avril 2017

Basée au Centre Culturel Franco-Mozambicain, elle développe les projets et les liens entre la Réunion et le Mozambique, en tant que Volontaire de solidarité internationale. Un des postes à pourvoir régulièrement dans l’océan Indien et ouverts à des Réunionnais.


Pouvez-vous vous présenter ?

Lauriane Schulz, 26 ans. Née à La Réunion, j’ai grandi à Saint-Paul et quitté l’île après le bac pour faire des études en Métropole. Passionnée par le dessin et l’histoire de l’art, j’ai suivi une Licence en Arts plastiques à Montpellier (Université Paul Valéry) puis complété cette formation par un Master recherche en Esthétique de l’Art à Venise (Université Ca’ Foscari) et un Master professionnel en Gestion de projets culturels à Paris (Université Sorbonne Nouvelle). En dehors de nombreux stages dans des institutions culturelles, j’ai commencé à travailler à Paris au Centre Pompidou, avant de postuler à ce Volontariat de Solidarité Internationale avec France Volontaires.

Quel a été votre parcours de "mobilité" ?

Après mes études en Métropole, je souhaitais m’installer à l’étranger pour y travailler. J’ai eu la chance de voyager beaucoup pendant mon enfance, et l’envie de découvrir d’autres pays et cultures ne m’a plus lâchée par la suite. L’Afrique, en particulier, m’attirait. Les liens forts, historiques et culturels, qui relient La Réunion au Mozambique m’ont également donné envie d’en savoir plus sur ce pays. Le choix de m’engager par le biais d’une mission de volontariat international s’est fait assez naturellement. Il me paraissait important, dans le cadre d’une première expérience de terrain à l’étranger, de rejoindre une association dont je partage les valeurs (solidarité, échange, coopération culturelle) et grâce à laquelle je puisse mettre en avant la scène culturelle réunionnaise.

Le Centre Culturel Franco-Mozambicain de Maputo

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Depuis septembre 2015, j’occupe un poste de Chargée de développement et de coopération culturels au Centre Culturel Franco-Mozambicain (CCFM) de Maputo, en partenariat avec la Région Réunion et les fonds européens (INTERREG V OI). Sur le plan professionnel, cette mission est extrêmement formatrice. J’acquiers de nouvelles compétences et les responsabilités qui me sont confiées participent à renforcer mon autonomie et ma connaissance de l’ingénierie culturelle. J’apprends également à m’adapter à des situations très diverses.

En quoi consiste votre mission ?

Je travaille dans un premier temps à promouvoir, développer et mettre en place des projets culturels avec la zone océan Indien et, en particulier, avec La Réunion. Ces projets de coopération culturelle permettent de valoriser les échanges entre l’île et le Mozambique, en préférant aux diffusions simples des temps de rencontres plus longs avec les artistes locaux, au travers par exemple de résidences artistiques, de workshops et conversations. Par ailleurs, en étroite collaboration avec la chargée de programmation du CCFM, je m’occupe des projets réalisés tout au long de l’année avec les artistes locaux (production, coordination des projets).

Lors d’un mariage traditionnel accompagnée de Graça, ma collègue Chargée de communication

Je participe enfin à la gestion d’événements culturels spécifiques tels que la Semaine des Femmes, la Semaine de la Francophonie ou encore la Fête de la musique. Cette mission recouvre une large variété d’événements et un champ pluridisciplinaire - concerts, spectacles de danse, théâtre, arts visuels, cirque... Avec 40 000 spectateurs accueillis chaque année, le CCFM reste la première structure culturelle du pays en termes de dynamisme, de représentation des artistes mozambicains et de diffusion artistique, ce qui est à la fois très stimulant et enrichissant.

Parlez-nous du Mozambique.

Je suis fascinée par ce pays et très attachée à Maputo, la capitale. Les gens sont chaleureux, malgré des conditions de vie souvent rudes. Je suis tombée sous le charme du portugais (langue officielle du pays) que j’ai appris en arrivant ici, et en particulier de la manière dont il est parlé chez les Mozambicains : une sonorité spéciale, à laquelle se mêlent souvent d’autres langues locales. J’aime également les ambiances que l’on traverse sans arrêt dans cette ville et sa périphérie. L’effervescence qui règne dans les quartiers populaires, par exemple, n’a rien à voir avec ce que nous connaissons chez nous. Un tableau vivant haut en couleurs où se mêlent vendeurs ambulants, étals en tout genre, trottoirs sur lesquels s’alignent paires de chaussures, vêtements, pièces électroniques, gadgets de toutes sortes… Le charme singulier d’un chaos ordonné, constamment balayé par la poussière et le vent, habillé de contrastes de lumière saisissants.

Est-ce que vous trouvez des ressemblances avec la Réunion ?

Tout ou presque me semble différent ici. Les conditions de vie, le rythme de la ville, un autre ressenti de ce que peut-être l’insécurité, les habitudes, le regard des gens, les codes urbains et de langage, les symboles, l’architecture… D’un autre côté, je retrouve souvent des points communs avec La Réunion : cette ville est riche d’une forte mixité sociale qui peut faire écho au métissage caractéristique de notre île. Dans la sphère culturelle, et plus précisément en musique, des sonorités et instruments se rejoignent. Dans la cuisine locale, les assiettes se composent souvent à la créole : riz, grains (fejões), cari (caril de camarão, caril de frango...), piments (piri-piri), achards, brèdes (couve).

Pendant la Fête de la musique au CCFM, avec ma collègue Lili, Réceptionniste

Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

Sur le plan personnel, cette expérience est d’une formidable richesse. Des liens forts se tissent au gré des rencontres, qui s’accompagnent d’une plus grande curiosité et ouverture d’esprit. Vivre à l’étranger, et en l’occurrence dans un pays en voie de développement, permet une prise de distance salutaire sur sa propre façon de penser et d’agir, et un regard plus critique sur notre société occidentale. Ce n’est pas simplement « sortir de sa zone de confort », mais plonger dans un autre monde, tâter l’inconnu, réévaluer et affiner sa perception des choses. Se défaire de ses réflexes et certitudes pour aller à la rencontre de nouvelles définitions, habitudes, questionnements… Il me semble qu’une expérience de mobilité, surtout lorsqu’elle s’installe dans la durée, agit sur nous de façon subtile, en profondeur, et son impact en est d’autant plus fort.

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

Beaucoup de photos qui me rappellent La Réunion et les moments que j’y ai passés, mais aussi de petits galets de l’Étang Saint-Paul... Après chaque séjour sur l’île, je ramène également quelques saveurs incontournables : vanille, rhum arrangé, confitures et miel péï, achards… Enfin, j’écoute et actualise régulièrement ma playlist ‘’Rényon’’ : rien de tel qu’un petit maloya pour se motiver ou faire monter l’ambiance en soirée !

Quels sont vos projets après le volontariat ?

Les projets et envies ne manquent pas ! Voyager encore, j’espère, mais aussi prendre le temps de m’interroger, le moment voulu, selon les opportunités qui se présenteront à moi. Je souhaiterais continuer à travailler dans la gestion de projets culturels, et l’idéal serait de pouvoir garder un lien avec l’Afrique australe et/ou l’océan Indien.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

La situation m’apparaît difficile dans un certain nombre de domaines où le chômage est élevé. C’est notamment le cas du secteur culturel où le marché de l’emploi reste encore limité : les offres sont peu nombreuses, la concurrence sévère et les contrats de travail souvent précaires. Mais je reste optimiste et attentive à l’évolution de ce secteur. Car d’un autre côté, la Réunion bouge de plus en plus : les manifestations artistiques se diversifient et jouissent d’une plus grande reconnaissance (en particulier dans le champ de la musique et des arts vivants), tandis que les structures culturelles offrent de meilleurs équipements pour la mise en place de projets et résidences de création. Nous avons un grand potentiel d’artistes à promouvoir et la langue créole est d’une richesse infinie : ce terreau culturel singulier mériterait une plus grande visibilité. Il me semble notamment important de développer les ouvertures à l’international. Cela n’implique pas forcément de regarder très loin : l’Afrique australe et le bassin océan Indien sont une mine à explorer en termes de projets, collaborations artistiques, résidences croisées, tournées...

Quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes qui ont du mal à ‘’sauter‘’ la mer ?

S’installer quelque temps à l’étranger peut apparaître comme un défi, faire peur ou impressionner, mais ce pari vaut vraiment le détour. Surtout lorsqu’on en a la possibilité. Celle-ci est souvent à portée de main, il suffit de tendre un peu le bras. À tous ceux qui hésitent : n’attendez plus, lancez-vous ! Si l’expérience ne vous plaît pas, au moins l’aurez-vous tentée – comme dit le proverbe, Pa kapab lé mor san essayé ! Ce saut en avant vous aura permis de vous confronter réellement à la différence, ce qui est déjà énorme. Si au contraire l’expérience vous plaît, ce sont des horizons insoupçonnés qui s’ouvriront à vous, rendront votre vie plus savoureuse… Et ne vous lâcheront peut-être plus jamais !


Voir : LES OFFRES DE MISSION FRANCE VOLONTAIRE DANS L’OCEAN INDIEN

Basé sur l’île, France Volontaires propose toute l’année des missions indemnisées de 12 à 24 mois en Afrique Australe et dans l’Océan Indien. Plus de 40 Volontaires de Solidarité Internationale originaires de La Réunion sont en permanence en mission dans des pays de la zone, en appui à des structures locales œuvrant pour la coopération régionale. Sur quels postes, dans quels pays et comment postuler ? Cliquez ici pour en savoir plus : De la Réunion, France Volontaires recrute toute l’année pour l’océan Indien

D’autres infos et portraits de Volontaires réunionnais dans l’océan Indien / La page Facebook

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