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Pierre Arthemise, professeur d’éducation musicale en collège à Cergy (95)

Publié le 22 avril 2017

Jeune diplômé du CAPES et d’un Master en musicologie à Strasbourg, Pierre a raté de quelques points sa mutation dans l’académie de la Réunion, son île natale. A 26 ans, il enseigne la musique dans un collège de région parisienne où il a trouvé sa place et se donne pour objectif l’agrégation.


Racontez-nous votre parcours.

Originaire du Moufia à Saint-Denis, j’ai un grand frère de 28 ans et une petite sœur de 24 ans. Je suis un passionné de musique depuis ma plus tendre enfance. J’ai commencé à jouer de l’alto (cousin du violon) à l’âge de dix ans à l’école de musique Loulou Pitou à Saint-Denis. Le problème, c’est qu’il n’existe pas de fac de musicologie à La Réunion. En 2009, après mon bac ES au lycée Lislet Geoffroy, j’ai donc décidé de continuer mes études de musique à Strasbourg. J’avais de la famille et quelques amis dans cette ville. Je n’étais pas insensible au fait de « partir à l’aventure » en métropole.

Comment cela s’est-il passé ?

Le chemin pour y arriver n’a pas été très simple ; ce fut un parcours du combattant pour les papiers, les billets d’avion, l’hébergement et l’inscription à la fac. La première chose que j’ai faite c’est de m’occuper de mon futur appartement. Grâce à ma cousine qui était déjà sur place, j’ai pu louer un petit 18 m² au centre-ville de Strasbourg. Elle s’est occupée des visites et des papiers pour le dossier. Une épine en moins ! Puis je me suis intéressé au billet d’avion...

Quelles ont été les démarches ?

J’ai pu bénéficier du passeport mobilité ainsi que mon père qui m’a accompagné. Les démarches n’étaient pas simples car il fallait une tonne de papiers, certains difficiles à avoir comme par exemple l’attestation qui prouve que la filière musicologie n’existe pas à La Réunion. Mes parents ont dû payer mon billet ainsi que celui de mon père ; ils ont été remboursés un an et demi plus tard ! Mais le fait d’avoir un billet aller/retour gratuit par an (à condition de valider l’année universitaire) est un stress en moins pour mes parents et moi. Cela permet de revoir ses proches pendant les vacances et c’est un réel plus pour les étudiants qui sont en métropole.

Au château de Versailles avec ma cousine et... mon paréo Margouillat dans ma chambre !

Qu’avez-vous fait à l’issue de vos études ?

Membre de l’orchestre universitaire de Strasbourg pendant toute la durée de mes études, j’ai décroché une licence en musicologie puis un master enseignement musique ainsi que le CAPES. J’ai fait mes premiers pas dans la vie active en tant que contractuel et une année de fonctionnaire stagiaire, professeur d’éducation musicale en collège à Strasbourg. Puis vint le choix de la fameuse mutation. Je souhaitais retourner sur mon île et fis ma demande en ce sens. Le jour des résultats des mutations, j’appris avec beaucoup de déception que ma demande n’était pas accordée car je n’avais pas assez de points (malgré mes 1000 points en tant que natif de l’île). J’avais 1071 points alors qu’il fallait 1295 points…

Que s’est-il passé ?

J’ai été envoyé à contre cœur dans l’académie de Versailles, dans un collège de Cergy dans le Val d’Oise. Il a fallu tout reprendre à zéro : la recherche d’appartement, de meubles, de transport, etc. Aujourd’hui, je termine ma deuxième année dans ce même collège et contrairement à mon avis de base, je me sens bien dans ma nouvelle région. J’enseigne même à des élèves originaires de La Réunion ou de parents réunionnais. Cela fait très plaisir ! J’ai toujours pour projet d’enseigner sur l’île, mais je me laisse le temps de passer le concours de l’agréation avant. Le point négatif dans l’éducation nationale pour les enseignants originaires des DOM TOM, c’est la difficulté de rentrer chez soi...

Qu’attendez-vous de ce retour à la Réunion ?

J’aimerais bien enseigner à La Réunion d’un point de vue professionnel, mais aussi parce que de nombreuses choses me manquent : la plage, la chaleur, l’environnement, la nature, les proches, les bons plats de maman ! Je veux voir ma famille plus souvent, fêter Noël et le nouvel an avec mes proches (passer les fêtes sans sa famille c’est très difficile !). Et dernière chose : le salaire ; ce serait hypocrite de ma part de ne pas citer cet aspect dans les avantages d’être fonctionnaire à La Réunion.

Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

Depuis que je suis en région parisienne, l’« ambiance » de la Réunion me manque beaucoup : sa chaleur humaine, son ouverture d’esprit… A Paris les gens sont très individualistes, le style de vie à 200 à l’heure, l’ambiance des transports en commun me pèsent. Ceux qui y vivent savent de quoi je parle. Mais il y a aussi des bons côtés et des gens ouverts et accueillants. En tant que métis, je n’ai jamais entendu de remarque raciste, que ce soit à Strasbourg ou à Paris.

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

J’ai toujours avec moi des photos de mes amis, de ma famille et un paréo margouillat créole. Et bien sur des choses à manger comme des bonbons miel, des bonbons cravate, du boucané, des saucisses, de la limonade Cot… Je demande régulièrement un colis à mes parents avec ces ingrédients et en décembre des letchis ! Mais la chose la plus importante, qui ne me quitte jamais même dans l’avion, c’est mon instrument de musique.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

Je conseille vivement à tous les étudiants de ne pas hésiter à se lancer dans l’aventure de la mobilité. Le chemin est rempli d’embuches mais il vaut la peine, d’autant qu’on est très bien aidé et accompagné par les différentes aides. Le fait d’être en métropole m’a permis de voir et faire plein de choses que je n’aurais pas pu faire si j’étais resté à La Réunion.

www.reunionnaisdumonde.com/r/17/Paris-IledeFrance (4810 inscrits)

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