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Projections d’un court métrage sur les Enfants de la Creuse à Auch et à Toulouse

Publié le 4 mai 2017

Deux projections du court métrage Objectif Lune, narrant l’histoire d’enfants réunionnais exilés de force dans les années 60, auront lieu le mercredi 10 mai à 20h au Ciné 32 à Auch (Allée des Arts) et le jeudi 11 mai 2017 à 19h à la cinémathèque de Toulouse (69 Rue du Taur).


Synopsis :

Année 1969. En vue d’être adopté, André, Réunionnais de 12 ans, est placé par la Ddass chez Jean, un fermier âgé, vivant seul en pleine campagne métropolitaine. Mais André n’est pas orphelin. Sa mère l’attend pour les vacances d’été. De l’autre côté de la Lune...

Une histoire basée sur des faits historiques

De 1963 à 1982, plus de 2150 enfants réunionnais immatriculés de force par la Ddass, furent déplacés en métropole dans le but de repeupler les départements touchés par l’exode rural. Les autorités laissaient croire aux parents que leur progéniture connaîtrait un sort enviable en métropole. Chaque enfant déplacé fut déclaré "pupilles d’Etat" par les autorités, alors que seule une minorité était orpheline. Des centaines de parents illettrés signèrent des procès-verbaux d’abandon qu’ils ne pouvaient déchiffrer. Ils n’ont jamais revu leurs enfants. Certains furent adoptés, d’autres restèrent des années en foyer ou à servir de main-d’œuvre gratuite dans les fermes.

1963 :
Michel Debré est élu député de La Réunion et crée le Bumidom, le Bureau pour le développement des Migrations dans les Département d’Outre-mer. Plusieurs centaines d’enfants réunionnais sont envoyées dans les départements tels que la Creuse, le Tarn, Le Gers ou encore le Cantal.

1968 / 1969 :
Le journal communiste réunionnais Témoignages évoque une « chasse aux enfants » et dénonce des « rafles ». Le quotidien Libération évoque à son tour le « vol d’enfants » et titre « Les jeunes Réunionnais déportés vers la France ».

1982 :
Ce dispositif migratoire se poursuit jusqu’en 1982, date de la dissolution du Bumidom.

2001/2002 :
Jean-Jacques Martial fait éclater l’affaire des Réunionnais de la Creuse en publiant son autobiographie Une enfance volée. Il attaque l’Etat pour « enlèvement, séquestration de mineur, rafle et déportation » devant le tribunal administratif de Montpellier. Il réclame un milliard d’euros de dommages et intérêts. Par la suite plusieurs autres ex-mineurs témoignent de leur déplacement, calvaire et maltraitance.

2004 :
Onze ex-pupilles portent plainte pour demander réparation de leur déportation devant le tribunal de grande instance de Paris. Ils s’organisent en plusieurs associations comme « Les Réunionnais de la Creuse », « Génération Brisée » ou encore « Rasinn Anler ».

2014 :
Ericka Bareigts, députée de La Réunion, dépose devant l’Assemblé nationale une proposition de résolution visant à reconnaître la responsabilité morale de l’Etat français dans le déplacement des ex-pupilles. Avec le vote de la résolution le 19 février 2014, l’Etat reconnaît sa responsabilité morale dans l’affaire des enfants réunionnais de la Creuse.

2016 / 2017 :
Une commission d’experts est mise en place. Ils font huit propositions, dont celle d’un accompagnement psychologique pour les 2150 ex-mineurs qui ont vécu ce drame et celle d’un soutien matériel pour se rendre à La Réunion.


Entretien avec Jimmy Grassiant

Comment vous est venue l’idée du film ?

J’étais à la recherche d’une histoire en relation avec l’adoption. J’avais envie de travailler sur la thématique de l’enfance. Il y a 3 ans je suis tombé sur plusieurs témoignages bouleversants de Réunionnais adultes qui parlaient d’arrachement à leurs familles dans les années 60 et qui décrivaient une enfance douloureuse en métropole. Après des recherches plus approfondies, j’ai été envahi par un tel sentiment d’injustice pour ces enfants que j’ai ressenti le besoin d’en parler et de faire connaître cette thématique. Personne autour de moi n’en avait encore entendu parler.

L’intrigue s’inspire-t-elle d’une histoire vraie ?

Elle s’inspire de plusieurs témoignages que j’ai pu lire et écouter. Il m’a fallu dépasser le stade de l’émotion, le sentiment d’injustice pour pouvoir en faire une histoire universelle. Les services sociaux expliquaient aux enfants, une fois arrivés en métropole, que leurs parents les avaient abandonnés ou étaient décédés. Alors je me suis demandé comment un enfant, en plus d’être déraciné et livré à lui-même, peut évoluer dans l’ombre d’un mensonge aussi cruel. A quoi se rattache-t-il ? A qui peut-il encore faire confiance ? C’est ce sentiment d’abandon, comparable à celui du deuil, et la fin de l’insouciance, que je souhaitais traiter.

Pourquoi le film s’intitule Objectif Lune ?

Avant qu’il ne parte en métropole, André écoute sa mère parler d’un long voyage où il volera très haut dans le ciel. Quand il arrivera de l’autre côté de la mer, il doit regarder la Lune. C’est comme cela qu’ils se parleront. André n’a jamais vu d’avion, ni de fusée, il n’est jamais sorti du Cirque de Salazie et s’imagine, avec ses yeux d’enfant, qu’il voyagera de l’autre côté de la Lune. La Lune est le seul lien visible avec sa mère et auquel André peut se rattacher lorsqu’il est en métropole. Et puis l’histoire se déroule en 1969 avec la conquête de l’espace... Mais je ne vais pas tout vous dévoiler.


Biographie de Jimmy Grassiant

Après une licence d’Arts du Spectacle option cinéma à l’Université Lumière Lyon 2, Jimmy Grassiant s’installe à Berlin puis à Hambourg où il est admis à l’école de cinéma en section réalisation. Durant ses études il réalise trois courts métrages qui seront diffusés dans plus de 70 festivals internationaux et récompensés par plusieurs prix et nominations. En 2012 il cofonde à Paris la société de production Vagabundo Films au sein de laquelle il réalise et produit des projets d’intérêt social et nourris par la diversité de regards multiculturels.

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