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Rencontre avec des Réunionnais de Guyane

Publié le 7 novembre 2017

Ils ont « changé de vie » en Guyane. Un millier de Réunionnais vivent aujourd’hui dans ce territoire grand comme le Portugal et s’y sont bien adaptés malgré la situation sociale compliquée. En marge de la conférence des régions ultrapériphériques de l’Union européenne, Le Quotidien a rencontré quelques-uns des membres de la diaspora à Cayenne. Témoignages.

Un article de Cédric Boulland, envoyé spécial


Un « coup de folie ». Jacques et Murielle Camana le reconnaissent. Leur installation en Guyane en 2006 avec leurs deux enfants de 6 et 13 ans à l’époque n’était pas préparée. « Nous ne connaissions personne ici. L’arrivée a été très difficile. Nous avons voulu couper le cordonavec La Réunion ». Pourquoi la Guyane ? « On a regardé tout ce qui existait outre-mer. On ne voulait pas d’une île ». Leur choix s’est logiquement fixé sur le seul département français d’Amérique du Sud, voisin du Brésil.

Murielle, enseignante en économie, a obtenu sa mutation. Elle exerce aujourd’hui au lycée Félix Eboué (grand homme politique local qui a également donné son nom à l’aéroport) de Cayenne. Jacques, responsable des équipements sportifs à la mairie de Saint-Denis et champion de La Réunion de volley à deux reprises avec l’ASPTT, s’est mis en disponibilité pour la rejoindre. Il continue à s’adonner à son sport préféré mais aussi à former des jeunes. Après plusieurs expériences en mairie, il a rejoint la Direction dé- partementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale de Guyane.

« La Réunion allait trop vite »

L’une de leurs filles ne s’est pas adaptée en Guyane et a préféré revenir à La Réunion pour y poursuivre ses études supérieures. Pas Jacques et Murielle Camana. « Nous y venons tous les trois ans en vacances dans le cadre des congés bonifiés et cela nous suffit. Nous avons quitté La Réunion car cela allait trop vite. La Guyane d’aujourd’hui, c’est La Réunion d’il y a 30 ans et cela nous convient bien ».

Henri-Charles Gabriel ne dira pas le contraire. Ce Saint-Joséphois est arrivé en Guyane… en 1975 suite à l’épisode douloureux de la Sakay à Madagascar (lire ci-dessous). « Les Guyanais, c’est un peu comme les gens du Nord, comparet-il. C’est compliqué de rentrer en confiance. Mais quand c’est fait, c’est très chaleureux ». « La Guyane, c’est La Réunion d’il y a cinquante ans », ajoute cet ancien chef d’entreprise (il a œuvré dans le tourisme et dans la comptabilité) aujourd’hui à la retraite et qui le vit bien. « C’est fabuleux de vivre au contact de la nature comme nous pouvons le faire ».


Daniel Lafosse, que les amateurs locaux de football connaissent bien en tant qu’ancien joueur et entraîneur de la Jeanne d’Arc, a fait lui aussi de la Guyane son nouveau terrain de jeu. Et son lieu de vie. Comme Jacques Camana, il y a suivi son épouse, enseignante, en 2011. « On voulait changer de vie », raconte celui qui travaillait à la mairie du Port et est devenu cadre technique au Geldar de Kourou avant d’intégrer la ligue guyanaise de football comme conseiller technique départemental. « Parmi les six candidats, j’étais le seul à ne pas être Guyanais. Mon CV et mon expérience ont beaucoup pesé ».Son impression sur la Guyane après la crise sociale de mars dernier ? « C’est une collectivité qui a tout pour aller de l’avant mais qui n’a pas mis les bonnes personnes à sa tête. J’ai pas mal bourlingué depuis mon arrivée. Il y a une vraie attente de la jeunesse. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’action pour entretenir les infrastructures ». Le défi n’en est que plus passionnant. « Je vis de ma passion », relève Daniel Lafosse.

« Au contact de la nature »

Le fait que cela se passe à 20 heures d’avion de La Réunion (passage obligé par Paris) ne constitue visiblement pas un problème. A en croire Henri-Charles Gabriel, qui préside également l’association des Réunionnais de Guyane, un millier de personnes originaires de notre île auraient fait leur vie dans le département le plus vaste de France (l’équivalent de la superficie du Portugal). L’un des moins denses, aussi, puisque sa population n’est que de 250 000 habitants. (25 000 en 1975). « Il y a beaucoup de Réunionnais qui arrivent et qui restent », décrivent Jacques et Murielle Camana. Tous ceux que Le Quotidien a eu l’occasion de rencontrer en font partie. Ils se retrouvent régulièrement pour parler de La Réunion. Et ont un rendez-vous immuable : le 20 décembre pour krazer un bon maloya.

Cédric BOULLAND pour www.lequotidien.re


Plus d’infos sur les Réunionnais de Guyane (5 pages) / Le Journal www.reunionnaisdumonde.com/r/16/Outre-Mer-hors-Reunion (381 inscrits)

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