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Margaret Mucy Robert, chef d’entreprise et maître de conférence en Martinique

Publié le 1er avril 2006

Premier chercheur à réaliser un doctorat en Ressources Humaines aux Antilles-Guyane, Margaret Mucy-Robert est aussi directrice de son propre cabinet de conseil en RH. Maître de conférence, elle enseigne au CNAM Martinique et dans plusieurs Universités métropolitaines. Elle a récemment organis" aux Antilles une collecte de produits anti-moustiques avec l’Association Solidarité Chikungunya. Plus de 700 kg de produits ont été collectés en deux week-ends, témoignant de la solidarité des Antillais envers leurs compatriotes ultra-marins.

Margaret Mucy Robert
Margaret au milieu de ses élèves de Master RH : "La Réunion est un modèle économique et social aux Antilles".

Racontez-nous votre parcours.

"Je suis née à Saint-André dans un milieu très modeste et j’ai été élevée à Saint-Denis. A 17 ans, ma mère a quitté la Réunion pour s’installer en France Métropolitaine. J’ai donc poursuivi mes études supérieures en région parisienne. Après plusieurs années d’expériences professionnelles dans le secteur bancaire, j’ai décidé de quitter une fonction ressources humaines pour me consacrer à l’enseignement supérieur à l’université. J’ai repris mes études (DEA à la Sorbonne) jusqu’au doctorat en sciences de gestion avec une spécialisation en RH".

Aujourd’hui, quelles sont vos activités professionnelles ?

"D’une part, je suis directrice de mon propre cabinet de conseil spécialisé en GRH. Pour mes entreprises-clientes (secteurs privé et public), je réalise des missions aux Antilles-Guyane mais aussi en Métropole : conseils en Recrutement externe et interne, Chasseur de têtes, Evaluation des compétences, Ingénierie de formation, Coaching, Bilan de compétences, Gestion de carrières, Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences. J’accompagne mes entreprises-clients dans la résolution des problématiques liées aux Ressources Humaines. D’autre part, j’enseigne au sein de plusieurs universités la GRH, la sociologie des organisations et des relations sociales et la méthodologie du mémoire".

Quels sont vos projets ?
"A moyen terme, un retour au pays natal pour exercer mon métier et faire de la politique".

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"Le fait de découvrir d’autres valeurs culturelles m’interroge sur mes propres valeurs et sur mon identité réunionnaise. Je pense que les Réunionnais valorisent de manière empirique les relations humaines au travers du respect de la différence, qui trouve son encrage dans la pluralité ethnique et religieuse. Le fait d’être réunionnaise a facilité mon intégration sociétale et professionnelle aux Antilles. Cette posture d’expatriation me permet également de comparer les départements d’outre-mer et de mieux apprécier les forces réunionnaises".

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

"J’ai un regard très ambivalent sur ce sujet. En effet, si la Réunion devient un modèle socio-économique dans de nombreux secteurs pour les autres DOM, deux éléments contribuent à renforcer chez moi un sentiment de frustration. D’une part, la situation sociale est alarmante si on tient compte du nombre exponentiel de Rmistes. D’autre part, je pense que le chômage sur l’île est dû en partie au nombre important de métropolitains occupant des postes à la Réunion".

Comment cela se passe-t-il aux Antilles ?

"Aux Antilles, à compétence égale, l’autochtone sera privilégié non seulement au sein des entreprises privées mais surtout dans les entreprises publiques : collectivités territoriales, universités, fonction hospitalière et d’Etat... Sur le marché du travail réunionnais, cette présence exponentielle métropolitaine contraint des Réunionnais à s’expatrier et à vivre en exil. Autre exemple flagrant, nous avons de réelles difficultés à obtenir une mutation à la Réunion ou à décrocher un poste alors que nous avons les mêmes compétences et les mêmes diplômes voire souvent des diplômes supérieurs. J’ai la ferme impression qu’il existe de la discrimination à l’encontre des Réunionnais dans mon propre pays".

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

"L’image de la Réunion –et ce malgré le Chikungunya- demeure idyllique pour la majorité des Antillais. Les reportages télévisés mettent en évidence une flore luxuriante et invitent à cette découverte plurielle. La Réunion constitue un modèle socio-économique et racial pour tous les autres DOM. Ce qui marque aussi les esprits ici, c’est le rôle prépondérant des femmes sur l’échiquier politique, l’harmonisation ethnique et raciale et enfin, la capacité réunionnaise à décrocher des fonds européens. Toutes ces caractéristiques renforcent cette modélisation émergente".

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700 kg de produits anti-moustique collectés pour la Réunion en Martinique

L’HISTOIRE D’UNE SOLIDARITE ANTILLAISE

Margaret Robert

"A la mi-mars 2006, une amie guadeloupéenne dont la belle-fille est réunionnaise et moi-même avons ressenti le besoin absolu d’aider la Réunion. L’idée d’organiser une collecte de produits répulsifs dans les hypermarchés et pharmacies antillais nous a traversé l’esprit. C’est alors qu’une semaine plus tard, j’ai découvert sur RFO l’intervention d’Yveline Lee et de Virginie Benoîte sur l’action organisée par l’Association Solidarité Chikungunya. En réalité, nous avions eu la même idée au même moment. Consciente que l’union fait la force, j’ai contacté Yveline Lee pour rejoindre cette initiative afin d’obtenir une coordination optimale".

Comment avez-vous fait pour mobiliser les gens ?

"Sur le plan local, nous avons mobilisÃéla presse martiniquaise. J’ai réussi à contacter plusieurs Réunionnais vivant en Martinique et des Martiniquais se sont joints à l’opération. Bénévoles, ils ont su se rendre disponibles pour les différentes collectes. Orlane Hoarau, une chanteuse réunionnaise résidant en Martinique, a été la marraine de cette opération. Très connue et appréciée aux Antilles, elle a su sensibiliser la population".

Quels ont été vos soutiens les plus forts ?

"Cette mobilisation n’aurait jamais pu voir le jour sans la participation active des réunionnais expatriés en Martinique et leurs familles. Notre devise était la suivante « Alon mèt la main ensemb ». Les hypermarchés ont vraiment joué le jeu puisqu’ils nous ont permis non seulement d’avoir une présence physique mais ont diffusé de manière très large, des messages de sensibilisation auprès de leurs clients. Au total, nous avons pu compter sur environ 50 personnes bénévoles pendant deux semaines".

Et au niveau institutionnel ?

"La compagnie Air Caraïbes nous a soutenus pour l’acheminement des colis fret vers la France Métropolitaine, ainsi que la SARA, société pétrolière implantée aux Antilles. Le Conseil Régional de Martinique, en la personne du Président, Monsieur Alfred MARIE JEANNE, a pris la décision de nous aider pour les billets d’avion".

Que retenez-vous de cette opération ?

"Les Martiniquais ont fait preuve d’une générosité et d’une solidarité exemplaires. Plus de 700 kg de produits ont été récoltés. Les bienfaiteurs antillais ont même adressé des messages d’encouragement à la population réunionnaise. Ces messages consignés dans un cahier spécifique pourront être diffusés lors de la distribution des produits sur l’île. « Nul n’est à l’abri ! Nous sommes de tout cœur avec vous et nous compatissons ! ». Tels ont été les propos formulés par de nombreux martiniquais solidaires ! "

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