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Mogane Virin, étudiant en commerce à Buenos Aires

Publié le 16 janvier 2018

Elève de Montpellier Business School après deux ans de prépa HEC à Bellepierre, il enchaîne les échanges universitaires : au Mexique puis en Argentine où il passe un MBA.


Pouvez-vous vous présenter ?

Mogane Virin, 21 ans. J’ai grandi avec mes deux sœurs à Sainte Suzanne, où j’étais scolarisé en filière S-SVT au lycée Bel Air. Ma mère est une ancienne assistante juridique d’huissier et mon père est professeur de comptabilité-gestion. Je suis aujourd’hui étudiant en Master dans une école de commerce (Montpellier Business School). Dans le cadre de mon cursus (double diplôme : Master Commerce International / MBA étranger), je réalise un échange universitaire dans un institut argentin (Universidad Argentina de la Empresa) à Buenos Aires.

Quel a été votre parcours de "mobilité" ?

Après deux années de classe préparatoire ECS au lycée Bellepierre, j’ai été admis à la Montpellier Business School. Je me suis expatrié une première fois au Mexique pour un échange universitaire d’une année, à l’Instituto Tecnológico y de Estudios Superiores de Monterrey, dans la ville de Guadalajara. Puis retour à Montpellier pour la dernière année de master, avant de repartir pour Buenos Aires !

Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

La région du Río de la Plata (Argentine et Uruguay) est très festive et accueillante envers les étrangers. Bien que la culture de cette partie du monde soit propre et unique (langue, gastronomie, traditions), il est bon de rappeler que nous restons tous les mêmes êtres humains et que nous partageons beaucoup plus de points communs que de différences. Je vois personnellement cela un peu comme un iceberg. En deçà des apparences culturelles visibles et extériorisées, il existe une partie immergée, bien plus considérable, que toutes les cultures partagent, avec les mêmes forces et faiblesses. Dans tout ce qui a trait aux émotions et aux sentiments notamment, on retrouve les mêmes peurs, doutes, incertitudes, motivations, joies, etc.

Avez-vous quelques anecdotes de voyage à partager ?

Au Mexique, il est de coutume de célébrer « le Jour des Morts », où des autels remplis d’offrandes (nourriture, objets, fleurs) sont dédiés aux ancêtres. J’ai trouvé que cette tradition s’apparente énormément au « Samblani » malbar de la Réunion. D’ailleurs, on y retrouve dans les deux cas des marliépous (aussi appelés œillets d’Inde) à foison, fleurs originaires du Mexique d’ailleurs, de même que le papel picado, connu à la Réunion sous le nom de « petit drapeau malbar ».

Célébration du “Día de los Muertos” dans l’état du Michoacán au Mexique

Et en Argentine, qu’est-ce qui vous a rappelé la Réunion ?

Le tango argentin et le séga de la Réunion sont deux danses en couple totalement différentes, aussi bien au niveau de la gestuelle que des pas, du rythme ou encore de la musique... mais dans lesquelles on retrouve une origine commune héritée des esclaves africains, origine commune que l’on retrouve également dans la champeta colombienne, que j’ai découverte grâce à mes colocataires originaires de Barranquilla, et qui se rapproche cette fois-ci beaucoup plus du séga réunionnais, au niveau des sonorités ET de la danse. En passant, l’étymologie fort probable du mot « tango » est : « Lieu où le négrier parque les esclaves avant l’embarquement ».

Enfin, il était surprenant, avec mes colocataires originaires de Rio de Janeiro, d’identifier des similitudes frappantes entre les cultures brésilienne et réunionnaise (toutes deux fortement métissées). Cela s’explique encore une fois par l’héritage africain, notamment dans la danse, avec la capoeira brésilienne qui s’apparente beaucoup au moringue réunionnais.

Quels sont vos projets ?

Je pense que sur le long terme, il est bon de se laisser guider par ce que le destin nous réserve de meilleur. Ma ligne directrice est d’apporter une contribution positive et surtout utile à notre planète. C’est pourquoi j’envisage, pour le moment, de travailler pour la préservation de la nature et de l’environnement. Je crois sincèrement que l’on doit se montrer davantage respectueux et reconnaissant vis-à-vis de la Terre en ces temps de disharmonie.

Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

Le fait de voyager permet, en se rendant compte de l’immense hétérogénéité socio-culturelle de l’humanité, de dépasser les conditionnements et les préjugés limitatifs de notre zone de confort. On y gagne non seulement en sagesse mais également en force d’esprit et en courage. Le voyage offre aussi l’opportunité de redécouvrir sa propre culture, ses propres richesses et spécificités intérieures. On se connaît soi-même un peu mieux à travers l’expérience de l’altérité.

Le “Día de los Muertos” dans l’état du Michoacán au Mexique

Qu’entendez-vous par là ?

C’est en me trouvant hors de l’île et immergé dans des sociétés différentes à celle dans laquelle j’ai été élevé que j’ai réellement pris conscience de la chance que nous avons de naître et de vivre à la Réunion, aussi bien au niveau du patrimoine culturel (brassage intercontinental entre l’Afrique, l’Asie et l’Europe au sein d’une île française située en Afrique) que de la richesse naturelle (volcans, désert, montagnes, forêts primaires, cascades, plages, mer). Cette diversité exceptionnelle, c’est l’avantage d’être réunionnais.

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

A vrai dire, je n’ai apporté aucun objet spécifique de la Réunion. Je suis dans une phase de déconditionnement vis-à-vis du matérialisme (dans le sens d’attachement jouissif aux objets), que je considère illusoire. C’est ainsi que je réalise que le meilleur que je puisse garder et transporter de la Réunion, où et quand que ce soit, reste mes plus beaux souvenirs.

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

J’entretiens des contacts journaliers avec ma famille, grâce aux réseaux sociaux tels que WhatsApp et Facebook. C’est fabuleux à quel point Internet nous permet de contourner les contraintes spatiales et de rester étroitement connecté avec ses proches, même à l’autre bout du monde.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

La société réunionnaise doit réapprendre à se focaliser autour de valeurs essentielles telles que l’humilité, l’intégrité, le respect, la discipline et l’effort. Elle doit davantage se rendre compte de son impact sur l’équilibre des écosystèmes de l’île et se décider à devenir réellement responsable de son environnement de vie en arrêtant de polluer et de dégrader, sans âme ni conscience, la nature. Le fait que la population locale soit relativement jeune et dynamique constitue un atout indéniable pour catalyser des changements optimistes.

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

Lorsque je retournerai à la Réunion, je serai très content de retrouver ma famille bien sûr, mais aussi l’énergie unique de la nature (je pense au Piton de la Fournaise entre autres). En restant le plus objectif possible, j’estime sincèrement que la Réunion fait partie de l’un des endroits les plus agréables au monde. En tout cas, c’est de loin le meilleur endroit que j’ai pu connaître jusqu’à présent en termes de qualité de vie, cela s’expliquant pour ma part par cette combinaison exceptionnelle entre niveau de vie, sécurité, altruisme, ambiance, culture et nature.

Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre de revenir habiter à la Réunion ?

Ce serait indéniablement la qualité de vie qu’offre l’île : un rythme détendu et réellement humain, dans un cadre naturel privilégié.

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

Sans surprise, la plupart des gens ne connaissent pas encore l’existence de la Réunion. Je répète ainsi plusieurs fois par jour à ceux qui me demandent d’où je suis : « C’est une île française, dans l’Océan Indien, en Afrique, à côté de Madagascar. ». J’ai ensuite droit à des yeux qui s’écarquillent d’émerveillement, suivis de « Wow, ça doit être magnifique ! Combien d’habitants y vivent ? », voire de « Ah oui : Madagascar, avec le lion et les pingouins, j’aimerais beaucoup y aller un jour, j’ai tellement adoré le film. ».

C’est pourquoi je n’hésite à leur expliquer très succinctement la situation géopolitique de la région tout en leur montrant précisément où se situe la Réunion à l’aide de Google Maps. C’est alors qu’ils s’exclament souvent : « Wow, c’est à l’autre bout du monde ! C’est très petit et au milieu de nulle part, je suis curieux de voir à quoi ressemblent les paysages, ils doivent être divins ! ».

Machinalement, je leur offre alors, à travers Google Images et YouTube, un aperçu des différentes plages, du piton de la Fournaise, des cascades, etc. ainsi que de la culture métissée des réunionnais. Au final, ils en ressortent tous agréablement surpris et séduits par la beauté naturelle et culturelle de l’île dont ils réalisent le caractère unique et exceptionnel pour le monde entier.

On me demande alors souvent par la suite : « Comment faire pour s’y rendre ? Combien coûte le billet d’avion ? »

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