Publicité

Valérie Lebon, directrice de l’Alliance Française de l’île Sainte Marie

Publié le 6 septembre 2018

Depuis trois ans, elle gère le budget, le personnel, les événements culturels et favorise la coopération culturelle entre La Réunion et l’île Sainte-Marie. Rencontre avec une femme tout terrain au parcours exemplaire !


Peux-tu te présenter ?

J’ai 33 ans et je suis originaire de la Ravine-des-cabris. Je suis Directrice de l’Alliance française de Sainte-Marie depuis bientôt trois ans, et très fière d’être engagée en tant que VSI (Volontaire de Solidarité Internationale) grâce à France Volontaires, la Région Réunion, les Fonds européens (INTERREG V OI) et la Délégation générale régionale de la Fondation Alliance française à Madagascar pour l’Océan indien.

Quel a été ton parcours ?  

J’ai quitté la Réunion à l’âge de 17 ans, juste après mon baccalauréat. Après des études d’espagnol, de FLE (Français Langue Etrangère) et de Coopération éducative à Toulouse, Montpellier et Séville, j’ai commencé à travailler en Afrique de l’Ouest en 2009. Après une première expatriation à Séville (Espagne) pour mon Master (dans le cadre d’échanges Erasmus), je me suis cette fois envolée vers le continent africain. Je suis allée y enseigner le FLE (Français Langue Etrangère) dans une école navale, en Guinée Equatoriale : unique pays hispanophone d’Afrique, frontalier du Cameroun et du Gabon.Puis, j’ai été prise pour effectuer un VIA (Volontariat International en Administration) du Ministère des Affaires Etrangères et du Développement International à Sao Tomé et Principe, archipel de l’Atlantique Sud posé sur l’Equateur, situé dans le Golfe de Guinée. Pendant deux ans, j’étais détachée auprès du SCAC (Service de Coopération et d’Action Culturelle) de l’Ambassade de France et j’exerçais dans un Institut Supérieur Polytechnique en tant que « Formatrice de formateurs ».J’ai par la suite enseigné le français dans une école publique sur l’île de Mahé aux Seychelles durant une année. Après un court stage à l’Alliance française de Tamatave pour mon Master de Coopération éducative, j’ai décroché quelques mois plus tard mon VSI à l’Alliance française de Sainte-Marie.


Parles-nous de ta structure d’accueil et de ta mission.

L’Alliance française de Sainte-Marie, comme les 28 autres Alliances françaises de Madagascar et les 834 sur les cinq continents, a pour mission de faire vivre, partager et promouvoir la langue française, la Francophonie dans toutes ses dimensions, la lecture publique et la diversité culturelle. Ce mouvement international créé en 1883 souhaite favoriser, à travers le dialogue des cultures, une meilleure compréhension entre les peuples et un esprit de coopération dans la solidarité et le respect mutuel. Ma mission en tant que Directrice est extrêmement riche. Au quotidien, mon équipe et moi-même devons faire preuve d’une grande polyvalence pour répondre aux besoins de l’association. En matière de responsabilités, cette mission est très formatrice. J’ai pu toucherà bon nombre de domaines tels que : le management des ressources humaines, la gestion administrative, comptable et financière de la structure, la formation et l’enseignement en langue française, la programmation, la mise en œuvre et le suivi des actions culturelles, les animations autour du livre, etc. J’ai grand plaisir à mener ces différents volets sur le terrain, particulièrement la programmation culturelle : spectacles de danses, marionnettes, concerts, théâtres, ateliers artistiques…, ainsi que les activités de sensibilisation aux responsabilités citoyennes, sociétales et environnementales. Je suis également impliquée dans des projets de coopération culturelle avec la Région Réunion qui sont très appréciés par la population saint-marienne.

Qu’est-ce qui t’as le plus a marqué ?

Sainte-Marie, petite île de 35 000 habitants située sur la côte est de Madagascar, n’en finit pas de me surprendre ! Sur cette petite île, on s’étonne facilement de la folie joviale locale et de l’ingéniosité d’un peuple à la douceur d’âme incontournable. Sur le terrain, en trois ans je suis passée de l’étonnement dans le travail et dans la vie courante, à l’adaptation, puis à la satisfaction et au bonheur de vivre ici. Ce qui m’a certainement le plus marqué, c’est l’art de vivre au rythme du « mora mora » (de traduction littérale : « doucement doucement ») de ses habitants où la notion de temps semble ne plus compter. À l’inverse de nos sociétés où tout doit aller vite, ici on prend le temps de « savourer le temps » et de VIVRE tout simplement. D’autre part, cette île a la chance d’être encore préservée du tourisme de masse et de la folie humaine destructrice qui conduit la planète à l’épuisement de ce que nous avons de plus précieux : LA NATURE sous toutes ses formes !

Quel bilan tires-tu de ces trois années de VSI ?

Je m’apprête à passer le relai avec une certaine fierté et le sentiment d’avoir mené à bien la mission qui m’a été confiée, par la dynamisation et la pérennisation des activités pédagogiques et culturelles. J’ai eu la chance de mettre mes compétences au service d’une association en laquelle je crois profondément et démontrer par des résultats concrets que le travail d’équipe porte toujours ses fruits. La plus belle réussite de l’Alliance française de Sainte-Marie sur ces trois dernières années est incontestablement la création d’une petite antenne à l’île aux Nattes (petite sœur oubliée de Sainte-Marie) inaugurée le 27 mai 2017, qui nous a permis de délocaliser toutes nos actions pour le plus grand bonheur de ses habitants. En résumé, ma mission fut passionnante et ma relation à l’Alliance française, passionnée ! Je lui souhaite de continuer d’être aussi florissante, chaleureuse et populaire qu’elle l’est aujourd’hui.


Sur le plan personnel, ce volontariat a été une belle aventure humaine, épanouissante et instructive. Mon expérience de vie à Sainte-Marie m’a à nouveau confirmé ma capacité d’adaptation dans un cadre de vie différent. Je n’ai, à aucun moment, rencontré de problème d’intégration : les Saint-mariens sont authentiques dans leur manière de vivre et malgré leur insularité, sont ouverts au monde dans un merveilleux sourire. À tous ceux qui ne connaissent pas encore l’île Sainte-Marie, je vous recommande vivement de venir découvrir au plus vite cette pépite de l’Océan Indien, qui, par sa beauté et sa quiétude, saura vous séduire !

Selon toi, qu’apporte une expérience de volontariat international dans un parcours de vie ?

Personne ne peut rester indifférent à une expérience de volontariat ! Pour ma part, ces trois années m’ont transformée. Cette expérience concrète sur le terrain m’a permis de développer un sens aigu des responsabilités ainsi qu’une sensibilité à la coopération et aux concepts de partenariat y afférents. Certes, le volontariat international est une solide expérience professionnelle mais c’est aussi et surtout une belle leçon de vie qui favorise un développement personnel. Le fait de sortir de sa zone de confort, dans un contexte interculturel marqué, forge le caractère. Cette expérience m’a apportée maturité, confiance en moi et tempérance. Je suis bien consciente du fait que mon volontariat n’est peut-être qu’une « goutte d’eau dans l’océan », mais la réceptivité des enfants et de l’équipe avec laquelle j’ai eu la chance de travailler m’a donné l’envie de persévérer. Cette immersion totale m’a permis de rencontrer chaque jour des personnes courageuses et dignes, de partager leur quotidien, de mieux les connaître et surtout d’avancer dans mon travail avec le cœur. J’estime que ce sont les rencontres qui sont au cœur de l’expérience. Ce sont ces forts échanges humains et culturels qui conduisent à l’ouverture d’esprit, primordiale dans une démarche d’aide au développement et de coopération.


Quels sont tes projets post-volontariat ?

Cela fait maintenant 16 ans que j’ai quitté La Réunion pour d’autres horizons. Après avoir sillonné plusieurs pays, heureuse d’avoir vécu pleinement toutes ces expériences à l’étranger, je souhaite prendre une petite pause dans ma carrière. Pour moi, la vie n’est pas une course mais un voyage dont il faut savoir goûter chaque étape. J’ai en effet envie de me poser à Sainte-Marie un an ou deux pour me consacrer à des projets un peu plus personnels. J’ai eu un gros coup de cœur pour cette île et j’en suis tombée amoureuse dans tous les sens du terme. Pour la suite, aucun doute ! J’aimerais continuer à travailler dans le réseau des Alliances françaises tout en restant dans la zone Afrique Australe et Océan Indien pour ne pas être très loin de la Réunion et voir ma famille régulièrement. Le poste de direction est passionnant et je partage en tout point les valeurs profondes que porte l’Alliance française à savoir la tolérance, la solidarité, la qualité, l’engagement, le respect de la diversité culturelle pour ne nommer que celles-ci. Pourquoi pas l’Afrique du Sud ? En tout cas, j’ai trouvé ma voie dans le monde de la coopération éducative et pour le reste, je fais confiance à ma bonne étoile qui m’a portée au fil des années vers des horizons tout aussi variés qu’enrichissants !

Quels conseils pourrais-tu donner aux futurs volontaires ?

La mobilité de nos jours est incontournable : il faut bouger ! Bien entendu, sur la route, il y a des épreuves à surmonter et quelques sacrifices à faire mais croyez-moi, le résultat justifie les sacrifices consentis ! Partir, c’est la meilleure façon d’apprendre à se connaître réellement, en testant au quotidien ses forces et ses limites. Partir, ce n’est pas oublier sa culture et ses racines, bien au contraire : c’est prendre le recul suffisant pour aller au bout d’elles-mêmes et avoir ainsi une vision plus lucide des enjeux de la planète. Lors de mes différentes expatriations, je n’ai jamais rencontré une seule personne qui ait regretté d’avoir entrepris cette expérience. De plus, s’expatrier avec des structures telles que France Volontaires en bénéficiant d’un accompagnement sans failles, on ne se sent jamais seul, même à l’autre bout du monde ! J’en profite d’ailleurs pour souligner le travail remarquable de toute l’équipe de France Volontaires à la Réunion et la remercier chaleureusement de m’avoir permis de vivre cette expérience inouïe.

Portrait chinois du pays d’accueil


Si Madagascar était…

Un personnage célèbre :
Je n’en citerai pas qu’un car plusieurs figures légendaires sont liées à l’histoire de l’île Sainte-Marie : John Avery, Christophe Condent, Thomas Tew, William Kidd, et Olivier Le Vasseur, le célèbre La Buse (arrêté au large de Sainte Marie et pendu à l’Ile Bourbon). Au cours des XVIIe et XVIIIe siècles l’île Sainte-Marie était une base populaire pour les pirates : plus d’un millier y habitèrent ou y firent escale. D’ailleurs, un certain nombre d’épaves de leurs navires gisent encore au large de l’île et sont accessibles en plongée sous-marine !

Un animal :
Sans hésitation : la baleine à bosse, emblème par excellence de l’île Sainte-Marie. Ici, ce paisible géant des mers est très respecté, il est d’ailleurs considéré comme un Dieu par les habitants qui le surnomment Zanaharibe (= grand Dieu). L’île accueille chaque année pendant l’hiver austral un spectaculaire ballet : d’importants groupes de baleines à bosse (Megaptera novaeangliae) migrent depuis l’Antarctique jusqu’au canal de Sainte-Marie, lieu idéal de reproduction et de mise bas.

Une couleur :
Le bleu turquoise pour la couleur des lagons de Sainte-Marie et qui pour moi, évoque le mieux l’exotisme et l’évasion.

Une chanson :
Je parlerai plutôt d’un groupe car je suis folle de toutes ses chansons ! Il s’agit de Raoky, un groupe pop-rock germano-malgache (originaire de l’île Sainte-Marie) qui écume actuellement les grandes scènes d’Europe. Leur musique dans laquelle joie de vivre et mélancolie se rencontrent, englobe le traditionnel des racines malgaches en les bouturant avec de multiples influences. On ne peut pas rester insensible au timbre de Dada Bessa-Tolojanahary le chanteur : la tessiture de sa voix s’offre le luxe d’aller chercher les octaves supérieures à la façon des Touré Kunda ou de Youssou N’Dour. À écouter sans modération !

Un sport :
La pétanque ! À Madagascar, cette discipline est tout un art et fait partie intégrante du paysage Saint-marien depuis de nombreuses années. Ce sport de détente qui correspond bien à l’image « mora mora » et au caractère convivial des malagasys, les a menés par deux fois (en 1999 et en 2016) à être sacrés Champion du monde ! 

Un livre :
La fabuleuse histoire de l’île Sainte-Mariede Jean-Claude Scant publiée en 2011 sous l’égide de l’Alliance française. Ce petit livre retrace les périodes les plus marquantes de l’histoire de Sainte-Marie dont le destin fut lié à celui de la France et de l’Île de la Réunion pendant plus de 200 ans. Chaque chapitre comprend donc une première partie consacrée à l’Histoire proprement dite, avec quelques repères chronologiques indispensables, et une deuxième partie plus romancée sur quelques-uns des épisodes de cette fabuleuse histoire.


Voir : LES OFFRES DE MISSION FRANCE VOLONTAIRE DANS L’OCEAN INDIEN

Basé sur l’île, France Volontaires propose toute l’année des missions indemnisées de 12 à 24 mois en Afrique Australe et dans l’Océan Indien. Plus de 40 Volontaires de Solidarité Internationale originaires de La Réunion sont en permanence en mission dans des pays de la zone, en appui à des structures locales œuvrant pour la coopération régionale. Sur quels postes, dans quels pays et comment postuler ? Cliquez ici pour en savoir plus : De la Réunion, France Volontaires recrute toute l’année pour l’océan Indien

D’autres infos et portraits de Volontaires réunionnais dans l’océan Indien / La page Facebook

Publicité