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Sarah Panchbhaya, 21 ans, étudiante en deuxième année d’HEC Montréal

Publié le 18 octobre 2007
Sarah Panchbhaya
Sarah avec son coloc réunionnais : "Quand j’ai appris que j’étais admise dans l’une des meilleures business school du monde (après deux ans de prépa au lycée Bellepierre), j’ai senti que cette chance ne se représenterait pas deux fois : je suis partie ! Toute ma vie se résumait alors à deux valises…"

Racontez-nous votre parcours.

"Je suis originaire de Saint Gilles, aînée d’une famille de trois filles élevées amoureusement par leur maman professeur. Depuis toute petite je rêvais du Canada, de ce mode de vie considéré comme l’un des plus agréables au monde, de la neige et de ces grands espaces, de la proximité avec les États Unis, de ces grattes ciels et ces villes modernes… Malgré les nombreux voyages que j’ai eu la chance de faire depuis très jeune, je m’ennuyais sur notre île et je voulais découvrir le monde".

Qu’avez-vous fait ?

"Après mes deux ans de prépa au lycée de Bellepierre, j’ai été acceptée sur dossier à HEC Montréal et j’ai décidé de sauter le pas… J’avais l’opportunité de partir à l’autre bout du monde, de réaliser mon rêve et de rejoindre l’une des meilleures Business School au monde. J’ai senti que cette chance ne se représenterait pas deux fois et je suis partie ! J’avouerais qu’au moment de prendre l’avion j’ai eu un gros moment de panique. Toute ma vie se résumait alors à deux valises… Encore aujourd’hui je me demande comment j’ai trouvé ce courage et cette force de tout quitter pour un endroit inconnu".

Racontez-nous vos débuts.

"Je suis arrivée ici avec mes deux valises sans savoir où j’allais vivre… J’ai logé pendant quelques jours dans une résidence étudiante et je me suis mise à la recherche d’un appartement. En une semaine il a fallu trouver un appartement, régler toutes les démarches administratives tant au niveau du service d’immigration que de l’école ou du service de santé, monter les meubles en kit, suivre les premiers cours…. Ça a été éprouvant mais ça valait le coup. Il a fallu se remettre du décalage horaire (9h de moins), mais aussi et surtout s’habituer à l’accent québécois ainsi qu’aux expressions…"

Par exemple ?

"Ici on ne gare pas sa voiture mais on “park son char”… Je me souviens également qu’on était en plein mois d’août et que j’avais déjà très froid. Il faisait 15 degrés et je craignais pour l’hiver qui approchait, car il fait en moyenne -23 degrés à Montréal… Mon année a été rythmée par les conditions climatiques, je me suis réveillée un matin d’octobre et j’ai vu 6 degrés sur mon thermomètre. Je me suis alors recouchée, je n’avais jamais vu une température si basse ! Mais il a vite fallu que je me force à sortir parce qu’on est descendu jusqu’à -36 degrés et je ne pouvais pas hiberner sous ma couette tout l’hiver… Autre différence marquante, ici on ne voit aucun chien abandonné dans la rue, ils sont remplacés par les écureuils qu’on croise à chaque coin de rue et qui fouillent dans les poubelles : ce sont les rats locaux !"

Sarah Panchbhaya
Première grosse neige à Montréal...

Et aujourd’hui, où en êtes-vous ?

"Un an après mon arrivée à Montréal, les gens sont étonnés d’apprendre que je suis française. Il semble que j’ai fait mien l’accent québécois… Je ne souffre plus autant du froid et lorsque je vois 6 degrés affichés au thermomètre, je me dis qu’il fait bien chaud aujourd’hui. J’ai plus d’amis québécois que français, je suis une reine du patin, je ne m’étonne ni des écureuils dans la rue ni de la neige, mes meubles en kit sont complètement effondrés (le bricolage c’est un art que je ne possède pas). Je me considère en toute modestie comme un modèle d’intégration réussie".

Quels sont vos centres d’intérêt ?

"Je suis actuellement une double spécialisation en Management et Gestion Internationale. J’ai été élue au poste de Vice Présidente des activités politiques et oratoires d’une association étudiante de HEC Montréal. J’ai eu la chance de rencontrer plusieurs personnalités du monde politique tant canadien que français, de former des délégations qui participent à des simulations de l’ONU, du parlement européen etc. La politique est ainsi une véritable passion pour moi et je compte m’y consacrer à plus ou moins long terme…"

Quels sont vos projets ?

"Je finis l’an prochain mon cursus à HEC Montréal. J’aimerais ensuite suivre un cycle supérieur à Science Po Paris ou alors me diriger vers New-York ou San Francisco où je souhaite m’installer quelque temps et effectuer des missions de consulting en stratégies et négociations internationales pour de grandes firmes…"

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"C’est avant tout une expérience de vie : être loin des gens qu’on aime, ne pouvoir compter que sur soi… Montréal est une ville magnifique où la qualité de vie est exceptionnelle et les gens chaleureux et accueillants, l’intégration dans cette ville se fait très facilement. J’ai aussi la chance de découvrir l’Amérique du Nord : cet été je suis parti de Montréal en voiture pour rejoindre Vancouver de l’autre côté du Canada… J’ai traversé ainsi tout le pays c’est une expérience inoubliable. J’ai aussi beaucoup voyagé aux Etats-Unis, notamment à New York, l’une des plus belles villes au monde !"

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"Ma famille, la plage et le soleil mais aussi les caris, letchis, samoussas, bonbons piments… J’essaye de rentrer le plus souvent possible car l’île me manque vraiment. Je brave alors 20h d’avions dont on taira le prix exorbitant, les transits interminables, 9h de décalage horaire et une différence de température de l’ordre de 50 degrés pour rentrer à la maison et me plonger dans l’océan indien".

Sarah Panchbhaya
Quand un Québécois apprend à une Réunionnaise l’art du patin...

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"Il ne faut pas craindre la mondialisation économique mais s’y adapter, elle n’est pas une fatalité mais une réalité. Il est du rôle des entrepreneurs et de la classe politique réunionnaise de faire en sorte que la Réunion trouve sa place sur l’échiquier économique mondial. Cela passe certainement par un renouvellement de l’élite réunionnaise… D’autre part il faut inciter les Réunionnais à faire le choix de la mobilité, qu’ils puissent se former, découvrir d’autres modes de vies, cultures, d’autre méthodes d’entrepreneurship, de leadership et qu’ils reviennent un jour sur l’île y apporter une vision nouvelle des choses ! La maîtrise du français tout d’abord mais aussi de l’anglais est devenu incontournable".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Lorsque je passe des entrevues, je m’arrange pour évoquer rapidement la Réunion, “cette petite île volcanique perdue dans l’océan indien”. On pique ainsi la curiosité des recruteurs et suscitons l’intérêt…"

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

"Il y a vraiment beaucoup de Réunionnais ici, qui sont venus notamment grâce au partenariat entre le Conseil Régional et le Québec. J’ai ainsi de nombreux amis réunionnais et on se retrouve souvent autour d’un rhum charrette, d’un maloya et d’un rougail saucisse fait avec les moyens du bord… De plus mon colocataire est réunionnais. Nous étions amis sur l’île et nous avons tenté l’aventure tous les deux. Nous nous efforçons de représenter fièrement notre île !"

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?
"Les gens ne connaissent pas la Réunion et quand on leur en parle ils sont très curieux et se montrent vraiment intéressés. Ils regardent des vidéos et des photos sur Internet, se mettent à rêver de l’océan indien, des noix de coco, des métisses des îles… Plusieurs amis québécois ont d’ailleurs prévu de venir l’été prochain".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"Partez ! Voyagez ! Vivez ! Puis Revenez ! Il ne faut pas avoir peur de partir, ne pas se poser de questions et foncer. Le monde a tant à nous offrir, à partager. Il y a tellement de choses à découvrir… Puis revenez dans votre île qui vous a vu grandir et faites part de vos expériences !"

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