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Reporter Réunionnais du Monde : Isabelle Caussanel en Afrique du Sud

Publié le 30 septembre 2008

Deuxième volet de la rubrique "Reporter Réunionnais du Monde", Isabelle commente pour nous et de l’intérieur, l’actualité mouvementée de l’Afrique du Sud : troubles raciaux, approche de la coupe du monde de football…

Isabelle Caussanel
"Les récentes émeutes raciales sont en totale contradiction avec l’"ubuntu", sentiment de fraternité et de conciliation mis en avant à la fin de l’apartheid pour construire une société nouvelle".

Pouvez-vous vous présenter SVP ?

"Je suis fonctionnaire territoriale, en disponibilité depuis deux ans. Mon mari Philippe a créé ici une société de tourisme, Afsud*, et je lui donne un coup de main tout en m’occupant de nos trois enfants".

Comment êtes vous arrivée en Afrique du Sud ?

"Nous venions tous les ans en vacances dans la région de Cape Town. Nous avons été séduits par la variété des paysages, la sensation d’espace, un mélange d’Europe et d’Afrique propre à cette partie du continent. Nous avons ensuite décidé de nous y installer. En 2006, nous avons pris une disponibilité et laissé les parents et les amis à la Réunion. Nos enfants étant encore petits, c’était maintenant ou jamais !"

Isabelle Caussanel

Qu’est ce qui, en tant que Réunionnaise vous paraît proche, compréhensible et à l’inverse éloigné, surprenant ?

"Après deux ans passés ici, je ne peux certainement pas prétendre comprendre la société sud-africaine. C’est une société complexe et très contrastée. Il ne faut pas oublier qu’il y a ici 11 langues officielles et de multiples ethnies. L’Afrique du Sud de Cape Town est très différente de celle de Durban ou de Johannesburg. Il est difficile pour un étranger de saisir toutes les nuances de cette société post-apartheid".

Comment sont ressentis autour de vous et parmi les Sud Africains les événements raciaux actuels ?

"Ce qui s’est passé au cours de ces deux dernières semaines a forcement été ressenti de façon très douloureuse par les personnes que je côtoie ici. Ce déchaînement de violence vis-à-vis des étrangers, des peuples africains qui ont soutenu la lutte anti-apartheid n’a pas été compris. C’était comme une trahison. Un quotidien mozambicain avait mis à sa une un seul mot : "Ingrats". Ces comportements sont en totale contradiction avec l’"ubuntu", sentiment de fraternité et de conciliation mis en avant à la fin de l’apartheid pour construire une société nouvelle".

Quelle est votre explication personnelle de ces troubles ?

"Difficile à dire. C’est un mélange sans doute de "ras-le-bol" vis-à-vis des conditions de vie qui ne se sont pas améliorées malgré les promesses faites par le gouvernement et de contexte politique fragilisé par l’échéance de l’élection présidentielle de 2009. L’immense espoir né au lendemain des premières élections multiraciales en 1994 ne s’est pas concrétisé pour un grand nombre de Sud-Africains qui connaissent le chômage et la misère. Les étrangers, ces émigrants illégaux estimés de 4 à 5 millions, deviennent des boucs émissaires accusés de voler le travail et les logements. L’augmentation régulière du nombre de Zimbabwéens qui fuient leur pays pour se réfugier en Afrique du Sud n’a pas arrangé les choses".

Isabelle Caussanel
Isabelle préparant le potjiekos (poy-ki-kos), sorte de ragout local cuisiné dans une marmite ronde (le potjie) à fond très épais, munie de trois pieds que l’on place sur un lit de braises pendant plusieurs heures.

Est ce que vous ressentez une effervescence particulière par rapport à la prochaine coupe du monde de football ?

"Pas vraiment. Bien sûr, on peut voir quelques panneaux publicitaires des sponsors officiels de l’événement et une grande banque locale organise un jeu-concours pour gagner des places. Les journaux retracent également l’avancée des travaux de construction des différents stades. Mais d’ici 2010, il y a une échéance importante pour l’Afrique du Sud avec l’élection présidentielle en 2009. Et dans cette perspective, la presse accorde naturellement une large place aux déclarations et faits et gestes des politiques".

Comment voyez-vous l’évolution de l’Afrique du Sud dans les dix prochaines années ?

"Si nous avons quitté notre île natale pour nous installer ici, c’est que nous croyons en l’avenir de ce pays. Je ne suis experte ni en politique ni en économie. Je pense seulement, peut-être naïvement, que lorsqu’un pays a été capable de sortir de l’apartheid sans guerre civile pour installer une démocratie multiraciale, il ne peut pas revenir en arrière. Cela ne fait que 18 ans que Nelson Mandela a été libéré. Il faut laisser à l’Afrique du Sud le temps de se reconstruire et la soutenir car c’est un exemple pour tout le continent africain".

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Voir l’interview de Philippe Caussanel

Lire aussi : Le reportage de Christophe, en direct de Pékin

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