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Regard sur l’actualité : Kassim Chotia en Tunisie

Publié le 1er septembre 2013

Installé à Tunis avec sa femme et ses deux enfants, le Dyonisien Kassim Chotia est directeur du développement commercial dans une banque détenue par l’état tunisien, le Kuweit Investment Authority et le groupe BPCE. Cet ex directeur du marketing de la Banque de la Réunion décrit de l’intérieur la situation d’un pays déstabilisé par de fréquentes crises politiques et par la situation en Égypte et en Syrie.

Kassim Chotia en Tunisie

Quel est votre parcours ?

Je suis originaire de Saint-Denis où réside toujours toute ma famille. J’y ai habité jusqu’à ma terminale au Lycée Leconte de Lisle. Puis j’ai fait mes classes préparatoires à Rouen. Diplômé de Sup de Co Rennes, j’ai travaillé au marketing de deux groupes industriels internationaux pendant huit ans avant de rejoindre la Banque de la Réunion, notamment en tant que directeur du marketing. Par la suite, BPCE International et Outremer auquel appartient la BR m’a proposé un nouveau challenge au siège, à Paris. Depuis trois ans, je suis expatrié en Tunisie, directeur du développement commercial dans une banque détenue par l’état tunisien, le Kuweit Investment Authority et BPCE qui est majoritaire.

Deux ans après la « révolution de jasmin », où en est la Tunisie ?

Depuis le renversement de l’ancien pouvoir en janvier 2011, la société tunisienne est passée par différentes phases. A l’euphorie des premiers mois où un immense espoir a animé les Tunisiens, libérés d’une mafia économique tentaculaire et d’un régime policier, a succédé la méfiance, l’impatience et pour beaucoup la désillusion voire la résignation. Les Tunisiens de condition modeste, notamment en dehors du Grand Tunis, n’ont pas encore vu d’amélioration de leurs conditions de vie. Et pour cause, du fait de l’instabilité politique, l’économie est en berne : baisse des exportations et de l’activité touristique, taux de chômage élevé, inflation forte, baisse des rentrées de devises pour l’État…

Kassim Chotia en Tunisie

Quelle est la réaction des Tunisiens à une éventuelle intervention occidentale en Syrie ?

La rue est très partagée sur une éventuelle intervention armée des occidentaux. Certains souhaitent la fin rapide du régime El-Assad, mais la majorité de l’opinion, à l’instar de l’influent syndicat UGTT, redoute une déstabilisation durable de cette partie du monde et craint pour les civils. Personne ici n’a oublié les victimes civiles des frappes aériennes de l’opération « Jambes de bois » en octobre 85 dans la banlieue de Tunis... Quant à ce qui s’est passé ces dernières semaines chez le voisin égyptien, cela a paradoxalement eu un effet bénéfique ici. Choqués, les partis politiques locaux ont appelé leurs partisans à la retenue.

Comment les Tunisiens vivent-ils au quotidien cette situation de tension ?

En dépit des manifestations régulières, des consignes de sécurité des diverses ambassades, des nombreux dispositifs de sécurité, la vie en Tunisie reste agréable à plusieurs égards. La convivialité des Tunisiens, le climat, la luminosité de la Méditerrané, la qualité des soins médicaux et du système éducatif, la richesse du patrimoine culturel contribuent à la qualité de vie ici. Si la population locale se remet lentement des arrangements, délations, frustrations et autres privations imposées par l’ancien régime, elle découvre aussi aujourd’hui la peur du terrorisme. Les prochains mois vont être déterminants pour le pays. La tension est palpable. Nous avons appris à vivre au jour le jour et au rythme des bulletins d’information.

Regard sur l’actualité : Kassim Chotia en Tunisie

Qu’est ce qui en tant que Réunionnais vous paraît proche dans ce pays ?

Les Tunisiens, comme les Réunionnais, accordent une place importante à la famille et aux amis. Les rapports humains sont chaleureux. Les descendants de la première République de Carthage sont fiers de leur histoire et de leur culture. Toutefois, probablement marqués par le clientélisme de la période Ben Ali et les récents actes de terrorisme, les Tunisiens se regardent avec méfiance et parfois même avec mépris. Ils vont devoir réapprendre à vivre ensemble.

Article paru dans Le Quotidien du 1er septembre 2013


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