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Rentrée 2013 : une prof réunionnaise de région parisienne témoigne

Publié le 9 septembre 2013

Originaire de Saint-André, Josie Virin enseigne le Français au collège Paul Vaillant Couturier de Champigny sur Marne depuis 1998. Très impliquée dans la vie de son établissement, elle n’a jamais coupé les ponts avec la Réunion où elle a organisé un échange scolaire cette année.

Josie Virin

Quelle est votre avis sur la rentrée 2013 qui vient d’avoir lieu en métropole ?

Cette rentrée n’est ni ratée, ni réussie. Elle ressemble à beaucoup d’autres, avec son tourbillon de promesses, de réformes et de désillusions. Mais je ne me plains pas. L’ambiance de travail est excellente dans mon collège ; nous faisons du mieux que nous pouvons pour la réussite de nos élèves et les conditions matérielles sont bonnes. Pratiquement toutes nos salles sont équipées de vidéo-projecteurs et d’ordinateurs avec accès Internet. De vrais problèmes de fonds subsistent. Les classes sont encore trop chargées, nous manquons de surveillants, d’assistants d’éducation et d’heures d’accompagnement personnalisé pour les élèves les plus en difficulté.

Décrivez-nous votre établissement.

C’est un collège de 800 élèves, dont environ un tiers de milieu aisé et deux tiers de milieu défavorisé, souvent des familles monoparentales. Un tiers viennent de zones pavillonnaires et deux tiers sont des enfants des cités. La population est métissée : Maghreb, Afrique noire et Portugal essentiellement. C’est une vraie ressemblance avec notre île. Ma salle de classe ressemble à celles de la Réunion : elle est de toutes les couleurs.

Est-ce la seule comparaison que vous faites avec la Réunion ?

J’ai enseigné à Saint-Benoît, à Sainte-Rose et surtout au collège Joseph Bédier de Saint-André. Que ce soit en Métropole ou à la Réunion il y a des élèves qui sont biens et d’autres pas du tout, mais il existe des différences. L’une d’entre elles est fondamentale : beaucoup d’enfants ici ont perdu leurs repères culturels et leurs valeurs ancestrales, ce qui engendre quelques difficultés à vivre en harmonie. Quand on vient de la Réunion, on est chagriné par ce communautarisme de façade qui règne ici et par la banalisation des insultes racistes. C’est une incompréhension pour la Réunionnaise que je suis, pour qui ces notions n’existent pas.

Comment réagissez-vous en tant que Réunionnaise ?

Partir m’a fait prendre conscience que la Réunion est vraiment unique : une vraie réussite humaine, une claque au monde entier sur l’harmonie entre les peuples. Aujourd’hui j’essaye de promouvoir notre culture sous toutes ses formes. J’anime des ateliers de contes, de théâtre. J’ai organisé un échange entre mon collège et Joseph Bédier à Saint-André : les Réunionnais nous ont accueillis en mai et nous les accueillerons en métropole en 2014.

Josie Virin

On vous sent très liée avec votre île d’origine.

Je ne rate pas une occasion d’évoquer l’harmonie qui existe entre les communautés sur l’île. En tant que Réunionnaise, je peux évoquer toutes les races, toutes les religions sans vexer personne. J’essaye de les convaincre que les richesses se puisent au sein des différences. Ceux de mes élèves qui ont eu la chance de partir cette année et de vivre dans une famille saint-andréenne en sont aujourd’hui convaincus.

Comment envisagez-vous la suite de votre carrière ?

Je vais bientôt demander ma mutation à la Réunion. Ce sera un véritable déchirement car je laisserai ici un fils, le chanteur de séga Pascal Samy, et des petits enfants. Mais bon, je suis par ailleurs conteuse du collectif Kozé Conté et militante culturelle. Il y a de quoi faire dans le domaine sur l’île.

Avez-vous gardé l’envie de transmettre ?

Enseigner pour moi est une véritable passion. A la Réunion ou en Métropole, lorsqu’un élève quelques années plus tard vous rencontre et vous dit « bonjour madame, vous vous souvenez de moi ? », vous savez que vous faites partie intégrante de sa vie. Même s’il était mauvais élève, il fier de vous le rappeler. C’est ce qui fait de notre métier le plus beau métier du monde.

Article paru dans Le Quotidien du 9 septembre 2013


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