Aux origines du combat de coqs à La Réunion
Cyril Hoarau, dans son livre « Le combat de coqs à La Réunion », explore une pratique ancestrale bien installée sur l’île. D’où vient-elle ? Quelles sont ses règles ? Que dit-elle de la société réunionnaise ? Focus sur une activité transmise de génération en génération, qui attire chaque week-end plusieurs milliers de personnes autour du rond et qui a survécu aux bouleversements politiques, économiques et sociaux de la Réunion.
Extraits de cet ouvrage à commander sur fnac.com, avec l’aimable autorisation de l’éditeur / Lire aussi : 27 ronds de batay coq recensés à la Réunion
Une origine plurielle... Pour Cyril Hoarau, les combats de coqs étant une activité ancestrale et universelle, les premiers habitants de la Réunion avaient déjà en commun la pratique de cette coutume dans leur région natale. En effet on retrouve des traces de combats de coqs avant notre ère en Europe, en Inde, en Chine et un peu plus tard à Madagascar. Mis à part les musulmans du Gujarat, toutes les civilisations qui sont venues s’installer dans l’île avaient donc en commun cette coutume.
L’Inde affectionne cette coutume depuis plusieurs siècles. On retrouve des preuves des combats depuis le Vème siècle de notre ère sur une stèle retrouvée dans la région du Tamil Nadu. Cette passion est toujours vivace aujourd’hui. Le droit à la pratique de culte pour les engagés aurait donc permis les premières joutes réunionnaises lors du Pongol. Le camp des malabars pourrait être l’épicentre et le point de naissance des combats dans l’île dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle.
Par ailleurs, l’analyse du vocabulaire employé par les amateurs de combats de coqs dans l’île montre que ce vocabulaire est transmis de génération en génération. Les termes comme « jockey », « brosser le coq », « donner un galop » laissent à penser que les palefreniers et jockeys apparus lors de la mise en place des courses de chevaux en 1843 ont été parmi les premiers à pratiquer les combats de coq.
En 1844, l’abbé Macquet nous renseigne sur les conditions de vie des esclaves : « Je connais même un Noir qui, avec sa volaille et sa porcherie, s’est amassé un pécule pour son rachat. » À l’image de sa population qui a connu un métissage humain et culturel, les combats de coqs ont aussi connu un métissage. Le lieu qui accueille les combats ressemble aux pitts européens avec une bâtisse comprenant des places assises sous forme de gradins. En ce qui concerne le combat en lui-même, le continent asiatique et Madagascar ont beaucoup influencé la forme actuelle des combats et des règles dans notre île. En effet on retrouve toujours deux jockeys, deux coqs et un arbitre.
Le succès des combats de coqs à la Réunion résulte également de l’abolition de l’esclavage, qui a permis à des gens de différentes origines de se côtoyer et de partager une même passion. Le combat de coqs a traversé et accompagné l’histoire de notre île. À la Réunion, le lieu où se déroulent les combats s’appelle « le rond coq ». En France métropolitaine dans la région du Nord Pas-de-Calais, les gallodromes se nomment Pitts (mot d’origine Irlandais désignant les arènes). Les pitts accueillent des combats de coqs depuis le Moyen Âge. Ce même terme est employé aux Antilles françaises en Martinique et en Guadeloupe (Pitatok). En Amérique du Sud on les appelle « Palenque », à Cuba « Valla », au Brésil « Rinha de Galos » et au Pérou « Gallodromi ».
Le combat de coq : un espace exclusivement masculin
Le « batay coq » est une passion qui se veut être une affaire d’homme. Le principe de masculinité et de virilité reste un obstacle majeur à la présence féminine dans l’arène. En ce qui concerne la présence féminine dans les gradins, là aussi le machisme est roi. L’héritage des cercles masculins des temps modernes introduit dans l’île au milieu du xixe siècle reste d’actualité. On peut retrouver la présence d’une femme pour tenir le bar ou le restaurant à proximité du rond, mais elle n’entre pas dans le rond. De plus, elle est rarement spectatrice. Les paris se font d’homme à homme.
- « C’est un lien social. Pour beaucoup de gens, c’est surtout pour l’ambiance. Ça fait revivre les quartiers. C’est pour pouvoir se retrouver le dimanche et avoir une activité. »
La basse-cour, symbole de la ruralité même en milieu urbain
Face à la pression démographique, les villes côtières connaissent une expansion latérale et verticale. La population qui habite aux frontières de ces villes a un mode de vie modulé entre les activités du monde urbain et celles du monde rural. C’est ainsi qu’on retrouve un habitat en majorité basé sur des maisons individuelles avec généralement un jardin devant et une basse-cour derrière. Ce mode de vie est mis à mal par l’expansion urbaine. Là où dans un jardin on retrouve un manguier, un arbre à pain et « un pied mouroume », la maison individuelle disparaît au profit de promoteurs qui plantent des immeubles à la place des arbres et des animaux. Le monde rural est alors exilé de plus en plus loin des frontières des villes.
La basse-cour et la religion
À la Réunion, le rituel sacrificiel de boucs et coqs fait partie intégrante des coutumes réunionnaises. Ces sacrifices laissent place à des repas communautaires. Lors de ses repas des invitations à d’autres groupes communautaires sont lancées. Ainsi cela ouvre la porte à une cohésion et à un lien social. La basse-cour devient un élément indispensable pour le bon déroulement du culte dans l’île pour les communautés indiennes et musulmanes. Si les combats de coqs contribuent à dynamiser et valoriser les basses-cours dans l’île, les problématiques telles que l’urbanisation galopante, le taux de densité exponentiel, le prix de la nourriture qui ne cesse de croître mettent en péril ce patrimoine local.
Menaces sur les combats de coqs
La loi du 8 juillet 1964, Article 521-7, précise que les combats sont tolérés pour les régions qui peuvent invoquer une tradition locale ininterrompue. Les combats de coqs ne sont autorisés en France que dans le Nord Pas de Calais et les outremers où l’on trouve de nombreux passionnés. Actuellement aucune autorisation n’existe dans les autres pays européens. De nombreuses campagnes menées par les défenseurs des animaux au nom de la lutte pour le bien être animal en demandent l’interdiction comme pour les corridas.
Commander le livre de Cyril Hoarau sur :
- www.fnac.com/a17645405/Cyril-Hoarau-Le-combat-de-coqs-a-La-Reunion#omnsearchpos=1
- www.decitre.fr/livres/le-combat-de-coqs-a-la-reunion-9791020355645.html
- www.cultura.com/p-le-combat-de-coqs-a-la-reunion-9791020355645.html
- www.placedeslibraires.fr/livre/9791020355645-le-combat-de-coqs-a-la-reunion-cyril-hoarau/
- www.furet.com/livres/le-combat-de-coqs-a-la-reunion-cyril-hoarau-9791020355645.html
- www.amazon.fr/combat-coqs-%C3%A0-R%C3%A9union/dp/B0BQY181YK/ref=sr_1_1?crid=9RZ2QG9VGJYM&keywords=9791020355645&qid=1677071767&sprefix=9791020355645%2Caps%2C199&sr=8-1
Photos : www.facebook.com/profile.php?id=100063891573235
L’auteur
Né à Saint-Denis de La Réunion en 1974, marié et père de deux enfants, Cyril Hoarau est un militant culturel passionné par l’histoire de son île. Il grandit au sein d’une famille très modeste, dans le quartier du Bas de La Rivière. À 14 ans, le décès de son père provoque en lui un traumatisme indélébile. Durant la même période, il visite la ville de Berlin en Allemagne, et participe activement à la démolition du mur de la honte à l’aide d’un marteau et d’un burin. Cet épisode historique provoque en lui un amour exponentiel pour les sciences humaines, et notamment l’histoire de La Réunion. C’est ainsi qu’il décroche un diplôme d’études approfondies en Histoire.