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Comment devient-on Réunionnais du monde ? Une diaspora performée par internet

Publié le 15 décembre 2009

Dans ce texte publié dans la Revue TIC & Sociétés, les chercheurs de l’Université de la Réunion Jacky Simonin, Michel Watin et Éliane Wolff décrivent un phénomène apparu avec Internet : à la communauté « invisible » jusqu’au milieu des années 1990, succède, pour partie grâce aux NTIC, une communauté « visible » à double titre : elle est projetée dans l’espace public, désignée et auto désignée comme diaspora et elle se construit comme telle en produisant collectivement une identité.

TIC & Sociétés

Texte publié fin 2009 dans le numéro TIC et diasporas de la revue "tic&société", consacrée à l’analyse des rapports entre les technologies de l’information et de la communication (TIC) et la société.

résumé

La migration fait profondément partie de l’histoire de La Réunion, une île vierge de toute occupation jusqu’au milieu du XVIIe siècle. Les populations volontaires ou contraintes venues d’Europe, d’Inde, de Chine, d’Afrique, de Madagascar ont constitué son peuplement jusqu’à former une société créole longtemps isolée de sa métropole coloniale. Depuis peu, l’île s’ouvre à l’extérieur et la migration autrefois contrainte est de plus en plus positivée. Comme en de nombreux territoires, une économie communicative des flux se met en place et de façon récente on évoque l’existence d’une diaspora réunionnaise : elle sera saisie sous l’angle d’un processus construit au quotidien par les Réunionnais ayant « sauté la mer » et qui produisent, via les TIC en général et le site reunionnaisdumonde.com en particulier, leur localité.

texte

Mais qui sont les Réunionnais du monde ?
Réunionnais d’origine ou de coeur,
à la Réunion ou partout sur le globe,
ils partagent l’amour de leur île,
de nombreuses informations et des services utiles.

(page d’accueil du site reunionnaisdumonde.com)

Le terme « diaspora » est d’un usage de plus en plus fréquent et désigne des populations très diverses, en même temps qu’il suscite des débats académiques passionnés témoignant d’une notable « ferveur académique autour d’un mot » (Dufoix, 1999, 2003 ; Berthomière et Chivallon, 2006). De la définition historique strictement liée à la religion (juive en particulier), on est passé à un usage plus extensif désignant des populations vivant hors d’un territoire de référence et dont on discute vivement les critères définitoires ouvrant aux typologies les plus diverses.

Les récents postulats post-modernistes sur la mouvance des identités et leur hybridité vont jusqu’à distinguer une diaspora culturelle « fluide et mobile » dont les prototypes sont incarnés par le monde Caraïbes (Hall, 1999) ou le Black Atlantic (Gilroy, 1993). Stuart Hall revendique dès 1990 l’usage du terme sous une forme métaphorique et non littérale : « L’expérience de la diaspora comme je l’entends ici, est définie non par son essence ou par sa pureté, mais par la reconnaissance d’une nécessaire hétérogénéité et diversité ; par une conception de “l’identité” qui se vit dans et à travers, et non malgré la différence : en un mot par l’hybridité » (Hall, 1990, traduit in Cervulle, 2007, p.239).

Certains s’inquiètent de cet usage trop extensif et craignentque le mot diaspora, qui est passé dans le langage commun, ne perde tout pouvoir descriptif à force d’être utilisé pour qualifier des phénomènes très différents. D’autres en revanche sont partisans d’une utilisation très large de la notion, au point que l’on peut l’appliquer à presque toute population migrante1. Mais ceci n’est pas sans conséquences et les effets de désignation ont également leurs enjeux. Pour Emmanuel Ma Mung, désigner un corps social en tant que diaspora a un effet performatif car « cela l’institue comme telle et la transforme en tant que telle ». Une autre question est de savoir si cette désignation est produite de l’extérieur par des observateurs n’appartenant pas à cette collectivité, ou s’il s’agit « d’une désignation interne, une auto désignation qui a tout d’une auto définition » (2002, pp.19-20).

Stéphane Dufoix plaide pour la mise en place d’un cadre d’analyse plus large et plus complexe2, situé en dehors des catégories substantialistes et figées ; « plutôt que d’assigner une place à des populations migrantes dans une palette de dénominations pré-existantes (exil, diasporas, communautés de réfugiés, etc.) », il propose pour objectif premier « d’identifier des phénomènes et des processus liés à l’existence collective en dehors d’une terre – réelle ou mythique – construite comme lieu d’origine, point de départ ou de référence » (2003, p.66).

Cette définition extensive et non normative, qui ne part pas des dénominations mais des processus, permet en particulier de saisir la réalité actuelle de l’expérience migratoire qui a été profondément bouleversée par la mondialisation des flux et la circulation généralisées des biens, des images, des personnes.

Le développement des technologies de l’information et de la communication a fait apparaître, ainsi que le souligne Dana Diminescu, une nouvelle image du migrant : le migrant connecté. Les migrants d’hier autant que ceux d’aujourd’hui ont toujours eu cette culture du lien qu’ils ont fondée et qu’ils entretiennent dans la mobilité. Propre à tous les groupes qui se déplacent, cette culture du lien est devenue particulièrement visible et dynamique une fois que les migrants ont commencé à utiliser massivement les technologies de l’information et de la communication (TIC). Les migrants parviennent ainsi à maintenir à distance et à activer quotidiennement des relations qui s’apparentent à des rapports de proximité, au point que « mobilité et connectivité forment désormais un ensemble de base dans la définition du migrant du XXIe siècle. » (Diminescu, 2005, p.277).

Les TIC contribuent également à alimenter les imaginaires et à produire de la localité. Pour Arjun Appadurai (1996), la localité n’est pas une substance qui se définit par référence au territoire, mais une dimension de l’imagination d’un collectif d’individus. C’est cette capacité des groupes à construire des mondes imaginés qui produit de la localité, une localité qui peut être multi-située ou totalement détachée de l’espace d’origine. Il discute ainsi le fait que lelocal serait produit par les primordia identitaires que sont les liens du sang, l’ancrage dans un territoire délimité par des voisinages, l’appartenance à un quartier, une ou des langue(s) en partage. La localité est un processus dynamique que les individus et les groupes produisent et imaginent activement en permanence dans un contexte marqué par la mobilité et le flux. Ainsi « faut-il substituer à une vision statique des représentations collectives une perspective dynamique sur des identités en constante réélaboration » commente Marc Abélès (2008, p.52). Le concept d’ethnoscapes (Appadurai, 1996) rend compte de la production d’une identité de groupe fondée sur certaines images, sur un paysage partagé et produit non seulement par la mémoire mais aussi par les TIC. Internet et les nombreux sites collaboratifs d’une agora électronique en plein développement offrent de multiples moyens de produire des communautés qui incluent les migrants et ceux qui sont restés au pays. Marc Abélès définit en termes anthropologiques ce mouvement généralisé de globalisation et d’accélération des flux de capitaux, d’êtres humains, de marchandises, d’images et d’idées produisant des relations qui transcendent les frontières géographiques et politiques traditionnelles. L’accent est mis sur la question culturelle envisagée « en relation avec la problématique des migrations volontaires ou forcées et des formes de recomposition identitaires qu’elles induisent » (2008, p.52).

À la Réunion comme en d’autres territoires, une économie des flux se met en place et depuis peu, l’île s’ouvre à l’extérieur. La migration autrefois contrainte est de plus en plus positivée et de façon récente on évoque l’existence d’une diaspora réunionnaise comme nous le verrons dans un premier temps. Celle-ci sera saisie ensuite sous l’angle d’un processus construit au quotidien par les Réunionnais ayant « sauté la mer » et qui produisent, via les TIC en général et le site reunionnaisdumonde.com en particulier, leur localité.

1. La migration « contrainte »

Jusqu’au début du XXe siècle, l’émigration réunionnaise n’intéresse que les membres des familles de l’élite coloniale qui quittent l’île pour affaires ou pour études. L’Amicale des Réunionnais qui se constitue en 1910 accueillera ces quelques rares Réunionnais immigrés en France métropolitaine. La situation va progressivement changer : après la départementalisation3 de 1946, l’île est trop pauvre pour nourrir correctement tous ses habitants et les pouvoirs publics organisent le départ d’une partie de la population.

1.1. La migration organisée par le pouvoir politique

En 1952, le Conseil général de La Réunion obtient la concession de terres à Madagascar (La Sakay) et incite les familles réunionnaises à s’y installer. Elles seront 169 à la fin des années 1960 et quitteront définitivement la « Grande Île » en 1977.

En 1963, Michel Debré4 crée le « Bureau pour le développement des Migrations dans les Départements d’outre-mer », ou Bumidom. Cet organisme public reçoit pour mission de « contribuer à la solution des problèmes démographiques des départements d’outre-mer » et est chargé d’accompagner l’émigration des habitants des départements d’outre-mer vers la métropole : 55 800 Réunionnais ont quitté l’île via cet organisme (Sandron, 2007). Mais, au prétexte de favoriser « l’intégration du Créole au sein de la communauté nationale », les migrants réunionnais sont géographiquement dispersés en métropole, interdisant de fait pendant les premières années, la constitution d’associations ou d’autres formes de regroupement. À cette émigration de travail se superpose une émigration de peuplement qui atteint son paroxysme avec « les enfants de la Creuse ». De 1963 à 1982, 1 630 enfants réunionnais sont arrachés à leurs familles et envoyés, pour la plupart, dans la Creuse et en Lozère5, dans l’espoir, à terme de revitaliser ces départements français, dépeuplés par l’exode rural. Citoyens à part entière mais Français « entièrement à part », les Réunionnais « partagent les difficultés d’emplois, de formation, de logement des travailleurs étrangers et, plus largement des classes défavorisées » (Bertile et Lorraine, 1996, p.20) ; ils sont de surcroît confrontés au racisme. Et, puisque le retour individuel devient très aléatoire face au coût exorbitant du voyage, « la séparation physique et psychologique irréversible avec le paysnatal entraîne un désenchantement » (1996, p.54) vis à vis de la migration et de l’espoir qu’elle suscitait. Dans ces conditions, les migrants réunionnais n’ont guère l’énergie et l’occasion d’organiser une vie associative. Seuls les étudiants, issus généralement de familles aisées, se constituent en deux associations rivales, reproduisant ainsi le schéma politique bipolaire qui prévaut dans La Réunion des années 1960. Dans la même décennie, sont créées l’Union Générale des Travailleurs Réunionnais en France et, à l’initiative de l’Eglise de La Réunion et du Père Félix Rivière, l’association Ma Case.

Le Bumidom est remplacé, en 1982, par l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT). Avec ce nouveau dispositif, plus axé sur la formation et l’insertion professionnelle, le nombre de migrants s’est considérablement réduit. Frédéric Sandron (2007) estime à 2 500 le nombre de départs par an entre 1982 et 1990, puis à 3 000 entre 1990 et 19996. L’ANT accompagne ainsi des Réunionnais contraints au départ pour trouver du travail en France métropolitaine ou pour suivre une formation qui n’existe pas dans l’île.

Dans le sillage de la création de l’ANT, le Secrétariat d’État chargé des départements et territoires d’outre-mer organise en juin 1983, à Paris, les « Assises nationales des originaires d’outre-mer » qui, pour la première fois, projettent dans l’espace public les populations migrantes issues de l’outre-mer français. Le rapport Lucas7, rendu public à cette occasion, décrit sans complaisance la situation des migrants d’outre-mer, expose leurs difficultés d’intégration, exprime le racisme latent auquel ils doivent faire face ; il met définitivement fin au mythe du « départ enMétropole », longtemps considéré, dans les quatre « vieilles colonies », comme un espoir de promotion sociale.

1.2. Le « colloque de Dourdan » et la « communauté invisible »

L’appréhension de l’émigration réunionnaise en métropole va changer à partir des années 1990. On estime alors que les migrants représentent le quart de la population réunionnaise et que, de fait, presque toutes les familles réunionnaises sont concernées par le phénomène8. Le regard sur la migration change et, en 1994, faisant suite à une enquête de « terrain », Albert Weber publie L’émigration réunionnaise en France. Entre réussites et échecs, il dresse un tableau contrasté de la « vraie vie des Réunionnais en métropole », mais il donne également à voir le nombre important d’associations à vocations diverses (culturelles, sportives, d’entraide…) qui, depuis les années 1960, ont été créées par ceux qu’il nomme les « Réunionnais de la diaspora9 ».

Les pouvoirs publics ne peuvent rester insensibles devant ce « fait migratoire ». Le Conseil général de la Réunion prend alors l’initiative de fédérer les associations réunionnaises en métropole et fait réaliser « des enquêtes-actions » sur la situation des Réunionnais en France. Ces travaux aboutissent, les 21 et 22 octobre 1995, au « colloque de Dourdan », considéré comme le « forum fondateur de la communauté réunionnaise en France métropolitaine ».

Dans l’ouvrage qu’ils consacrent à cette manifestation, Wilfrid Bertile et Alain Lorraine, avec le « collectif de Dourdan » estiment que, malgré le poids démographique qu’elle représente, la communauté des 175 000 Réunionnais10 immigrés reste « invisible » parce que « intégrée et intégrationniste » (1996, p.84). Ils considèrent également que « l’isolement handicapant », « le déracinement », « l’éloignement des proches » et « l’amère solitude » empêchent les Réunionnais de métropole de « positiver leur vie associative alors que celle-ci s’avère riche et intéressante » (1996, p.68).

Ainsi, jusqu’à la fin des années 1990, les tentatives de fédérer les Réunionnais de France sont restées vaines. Trop dispersée et trop effacée, la communauté réunionnaise de métropole n’est pas représentée de façon unitaire par des associations politiques, religieuses ou culturelles, ne formule aucune revendication ethnique ou identitaire et n’entretient que des contacts restreints (voyages, téléphone) avec le pays d’origine.

2. L’émigration « positivée » : une conséquence de la généralisation des TIC ?

Au tournant du siècle, l’attitude des Réunionnais vis à vis de l’émigration va encore se modifier. D’abord parce que la progression spectaculaire du parc automobile et l’ouverture du trafic aérien avec la fin du monopole de la compagnie nationale Air France permettent une nouvelle appréhension de la mobilité, ensuite parce qu’avec la démocratisation du téléphone et de la télévision, les Réunionnais deviennent, à part entière, « membres de la société de communication » (Bertile et Lorraine, 1996, p.50).

2.1. Le tournant des années 2000

À partir de 2000, trois processus liés à la généralisation des TIC vont produire de profonds changements dans l’attitude des Réunionnais vis à vis de l’émigration.

La généralisation et la démocratisation des technologies de l’information et de la communication autorisent un contact plus fréquent et peu onéreux avec les émigrés. Les ménages s’équipent en ordinateurs connectés (Watin, 2005), y compris les familles populaires qui ont très largement investi dans les TIC (Wolff, 2007).

Dans le même temps, se construit un nouveau discours valorisant la mobilité et visant particulièrement les jeunes avec la mise en place de financements incitatifs de la part des collectivités locales. Le Conseil général fait du développement de la mobilité un « des leviers principaux de sa politique d’insertion », tandis que « l’ouverture de La Réunion sur le monde » constitue une des priorités de la Région Réunion qui enjoint les Réunionnais : « Bougez avec www.regionreunion.com », en s’adressant plus particulièrement aux étudiants volontaires pour aller se former hors Réunion.

En décembre 2002, des Réunionnais, titulaires d’un diplôme de troisième cycle de l’Université, créent l’« Association des diplômés réunionnais de l’enseignement supérieur » (Adres) afin de « participer au développement de leur région en proposant leur expertise et encourager les institutions locales à faire appel à leur expertise11 ». En juillet 2004, l’Adres devient « Amarres12 » qui organise, en mars 2006, à l’École nationale des Ponts et chaussées de Paris, un colloque intitulé « Regards croisés des Réunionnais de la diaspora : 1946-2006 ». Se situant « à l’interface entre La Réunion et le monde », ces jeunes diplômés, « qui ont fait le choix de la migration », fiers de leurs racines et conscients de leur valeur, se déclarent « Réunionnais de la diaspora » ; ils témoignent, malgré des difficultés certaines, d’une migration positivée, porteuse d’espoir et de promotion sociale.

Le site reunionnaisdumonde.com va amplifier ce mouvement et donner à cette diaspora une visibilité à la Réunion, tout en lui permettant de se constituer et de se fédérer hors des frontières de l’île.

2.2. reunionnaisdumonde.com : une diaspora qui devient visible

2.2.1. Un modèle économique dans l’entre-deux

Créé en 2005 par Nicolas Martin, un ancien journaliste de retour dans l’île après dix années passées à l’étranger, le site reunionnaisdumonde.com a pour objectifs de proposer « un annuaire de la diaspora réunionnaise » et « de donner vie à cette communauté qui était totalement invisible et que grâce à internet on a moyen d’identifier et avec qui on peut désormais communiquer13 ». La mise de fonds est limitée, les moyens réduits, c’est à partir de son domicile et sur son ordinateur personnel que le jeune entrepreneur donne vie au site. Celui-ci propose au départ un carnet d’adresses et des portraits d’expatriés susceptibles d’intéresser les acteurs économiques et les collectivités locales de l’île qui « n’avaient de cesse de mettre en avant la mobilité sans jamais créer d’outils pour en faire la promotion ».

Pour son promoteur, le projet devait être porté par le service public ; mais il n’a jamais pu convaincre les instances des potentialités offertes par un tel site, au point de le prendre en charge et de le faire vivre. C’est donc pratiquement seul14 qu’il anime son site et le fait évoluer avec le soutien de fonds solidaires qui lui font un prêt, la vente d’espaces (la moitié des annonceurs sont du service public), quelques contrats de partenariat (avec des entreprises de travail temporaire par exemple) et la mise en route d’une boutique en ligne. Le modèle économique visé est proche de celui d’un média en ligne car « il s’agit de produire du trafic pour monétiser des espaces publicitaires, […] il faut bien vivre ». Dans le même temps, il fait acte d’une démarche citoyenne qui privilégie un accès gratuit pour les membres, la solidarité, l’échange et l’information de service public.

Le développement et l’animation du site qui ne cesse d’offrir de nouveaux services vont contraindre son promoteur à faire des choix stratégiques, car il lui sera difficile d’assurer longtemps l’ensemble des tâches de gestion et d’animation de cette petite entreprise : « Je me retrouve encore maintenant à courir après des ventes de prestations puisque je n’ai jamais reçu de subventions et même les partenaires publics officiels restent très incertains et il y a beaucoup d’inertie et moi je n’ai pas le temps de tout faire ». Le site, dont la refonte fin 2008 a demandé plus de six mois de travail, n’a en effet jamais cessé d’évoluer, de nouer de nouveaux partenariats et d’offrir de nouveaux services. Avec plus de 8 000 membres et plus de 1 200 visites quotidiennes15, reunionnaisdumonde.com s’impose comme un lieu d’échanges et de mise en relation entre migrants, mais également entre îliens et migrants.

2.2.2. Mobilité valorisée et réseau

Ce site est conçu à l’image de nombreux sites collaboratifs comme un espace d’information (actualités, événements, reportages), de communication (forum, annonces, avis de recherche), d’entraide (offres d’emploi, offres de stage, annonces), de partage de réseaux et de mise en liens (portraits, liste des membres). Il présente également une « boutik » où sont proposés des produits de La Réunion et une rubrique traitant de « l’actualité culturelle et économique de la diaspora (concerts, rencontres…) ».

Son originalité est de proposer des « portraits d’expatriés16 » où sont déclinés leurs parcours, leurs motivations à la migration, leurs espoirs par rapport « au pays » et leur vécu de Réunionnais exilés en métropole ou ailleurs dans le monde. Pour beaucoup, la migration est présentée comme une expérience intense et formatrice, mais limitée dans le temps avant un retour à La Réunion. Beaucoup n’hésitent pas à prodiguer conseils et encouragements à ceux qui, restés au pays, n’osent pas encore « bouger » :

« Revenir à la Réunion avec un ou deux diplômes en poche. Revenir plus fort grâce à cette mobilité, plus autonome, avec de nouveaux savoir-faire et savoir-être. Je pense que les études loin de chez soi apportent ces savoirs au-delà de l’aspect purement scolaire » (C. M.).

Le site est également un espace d’affirmation identitaire. La fierté d’être créole et les atouts que représentent le métissage et l’expérience multiculturelle dans le rapport à l’Autre et au monde sont particulièrement mis en avant. Le site participe ainsi à la production d’un discours nouveau sur une identité créole valorisée :

« Jeunes Réunionnais, il faut être fiers de votre origine, de votre culture ! Soignez, sinon cherchez et trouvez votre identité. Parlez votre langue, le créole. Partez à la découverte du monde et d’autres horizons pour revenir plus forts à la Réunion et montrer ce que vous savez, ce que vous pouvez. *Nou lé pa pli kouyon ! » (I. B.) (*nous ne sommes pas plus couillons).

Le site est également vécu comme un lieu fédérateur grâce auquel chacun, relativement isolé, peut constater la vitalité de la migration réunionnaise :

« C’est super de pouvoir se dire qu’on n’est pas tout seul et de lire des parcours similaires au sien sur ce site. Il faudrait que plus de monde se connecte et mette des photos, qu’on puisse voyager à travers les histoires des autres » (N. P.).

Une vitalité que l’on peut visualiser dès la page d’accueil, qui invite via une carte à « localiser les Réunionnais à travers le monde ».

Le site a par ailleurs suscité des initiatives similaires dans l’univers de la migration réunionnaise. Ainsi au Québec « tout a commencé par la découverte d’un site internet intitulé Réunionnais du monde » explique un Réunionnais installé au Québec depuis 18 ans, devenu président de l’association « Réunionnais du Québec nou lé la17 », dont les objectifs sont de construire « un lien communautaire sans précédent pour la diaspora réunionnaise de la Belle Province ». Un processus de labellisation et de mise en réseau est en cours qui permet de fédérer autour de reunionnaisdumonde.com des associations et leurs sites en Allemagne, en Belgique et bientôt en Chine et à Madagascar18.Un « réseautage », comme dit Nicolas Martin, dont la finalité économique autant que socioculturelle est affirmée, se met ainsi en place.

Dans cette production réticulaire, le lien proposé par reunionnaisdumonde.com avec la plateforme relationnelle Facebook et plus particulièrement avec le groupe « I 97419 » mérite une attention particulière20. Réunis autour de la production collective thématique « Tu sais que tu viens de la Réunion quand… », les membres de ce réseau social participent à la construction collective d’une identité etd’une localité réunionnaise, d’un local imaginé et détaché du territoire dont le Web 2.0 amplifie encore la circulation, la dissémination, et l’audience.

L’analyse thématique qui suit a pour objet de mettre à jour certains des éléments qui caractérisent ce processus de diasporisation identitaire21 tel qu’il est vécu, perçu, et verbalisé.

3. « Tu sais que tu viens de la Réunion quand… » ou la fabrication de la localité

Les internautes participant au groupe sur Facebook ont pour consigne de compléter, selon les instructions, le segment initiateur « Tu sais que tu viens de la Réunion quand… ». Bien entendu, chacun reste libre de produire ou non un texte : cadre de participation et cadre de production, selon la terminologie goffmanienne (Goffman, 1981), définissent ensemble la situation d’échange dans laquelle les discours sont produits et reçus. Ceux qui émettent des suites au segment initiateur ont pour principal destinataire direct l’ensemble de la communauté internaute que forment pour l’occasion les membres, réguliers ou non, de ce réseau social. Il faut cependant garder à l’esprit qu’au delà des pratiquants de Facebook, le réseau s’élargit à d’autres réseaux. L’internaute qui poste un message produit une intervention ayant pour destinataires en premier lieu les membres du groupe. Mais ce message peut être lu par d’autres dans la mesure où le groupe est publiquement ouvert à tous. Et ce lecteur peut faire état du message posté auprès d’autres destinataires que ceux qui sont membres du groupe concerné. L’effet « boule de neige » et l’intertextualité sont au principe de ces modes de communication, de ces réseaux sociaux, qu’ils soient électroniques ou non, que l’on communique en face à face ou à distance.

Le segment initiateur induit trois implications. « Tu sais que… » suggère une prise de conscience, « tu viens de la Réunion… » une identité et une origine. Le troisième segment « quand… » peut signifier une conditionnalité. En ce cas, il est équivalent à « si ». Ou alors, le sens temporel de « quand » oriente l’internaute vers un événement vécu, une situation dont il a fait l’expérience. L’ensemble du segment suggère l’activité de raconter. Le recours au temps présent de narration renforce cette orientation.

Les compléments apportés par les interventions des internautes se caractérisent par le fait qu’ils verbalisent, de manière plus ou moins explicite et étendue, des situations dans lesquelles, avec d’autres participants, ils sont engagés. Les dénominations, les termes d’adresse, ainsi que la manière dont sont décrites les circonstances de la situation relève de ce que Alfred Schütz (1962), l’un des tenants de la phénoménologie sociale, nomme les typifications et qui sont révélatrices de leurs identités diasporiques. Des identités qui sont donc toujourssituées, car « l’identité n’est rien d’autre qu’un schème employé par l’acteur pour interpréter les signes que d’autres génèrent – un schème qui est une réponse aux intentions de l’autre » (Garfinkel, 2005, p.149). On considère en effet que les pratiques sociales dans lesquelles les acteurs sont mutuellement engagés organisent leur perception des objets, physiques, matériels, ou immatériels, tels les événements, les expériences. Au bout du compte, ce sont des situations de contact, entre un ego et un autre, dont il est question, sous l’égide d’une présentation publique de soi (Goffman, 1973).

L’analyse thématique des 122 items postés permet de dégager sept thèmes, illustrés pour chacun d’eux par quelques exemples22. Cette mise en mots permet d’observer le vécu diasporique de leurs auteurs. Car ces messages disent quelque chose des processus de diasporisation qui se jouent à l’échelle planétaire, et que jouent, dans leur vie quotidienne, les acteurs ordinaires.

3.1. Les expressions langagières

L’usage de la langue créole constitue un thème essentiel. L’expérience du contact de langue (Simonin, Wharton, 2009), ici créole/français, est source d’une conscience identitaire réunionnaise. À l’occasion de ces moments d’expression langagière, un originaire de La Réunion est conduit à « penser au pays », activant ainsi sa situation diasporique.

… ou dis ban’ zoreille* la mi sa va bat un carré pour dire que tu vas te promener (* z’oreille ou zoreil désigne le français métropolitain)

… tu dis « à soir » au lieu de « ce soir »

… ouh dis « té gars » toutes les 5 minutes

… ouh lé le(la) seul(e) à dire la « Métropole » dans une conversation

… tu prononces le « t » de Payet

… tu réponds toujours « ben ! » à une question pour dire « oui »

… tu n’avais pas vraiment l’habitude de parler créole à la Réunion, à part en famille, et qu’ici quand tu peux te la raconter dans le bus en parlant un truc que personne ne comprend, tu adores ça !

3.2. L’alimentation : habitudes culinaires et produits locaux

Comme le parler, le manger prend une place importante. En situation de contact interculturel, usages langagiers et alimentaires contribuent en effet à forger au quotidien une identité diasporique. L’expérience alimentaire génère étonnement, comportement de résistance, expression d’envies et sentiment de nostalgie. Sont mis en avant certains traits typiques des pratiques culinaires réunionnaises, telle la place du riz dans l’alimentation. Au regard de pratiques autres, ces traits spécifient la personne qui en est porteuse.

… tu as envie d’une mangue verte ek piment ek sel… (avec du piment et du sel)

… tu laves ton riz avant de le faire cuire

… tu regardes tes potes zoreil gros z’yeux (avec étonnement) parce que les gars mangent du riz ek beurre et gruyère !! Té si mémé voyait ça !!

… bonna y donne à ouh un z’assiette cassoulet, ouh rode le riz en dessous ! (on te donne une assiette de cassoulet, tu cherches le riz en dessous)

… tu refuses de manger du sucre blanc de betteraves (ça ne crépite pas quand tu manges ton yaourt nature)

… tu manges un ananas « zoreil » ek tes potes « zoreil », et que tu es le(la) seul(e) à trouver ça fade

3.3. La Réunion

L’expérience d’un autre univers physique bouleverse les repères écologiques habituels, spatiaux et temporels. Les pratiques de géo-localisation se structurent en fonction des cadres d’origine. La description de l’environnement physique se fait selon une carte sociocognitive construite sur l’ici du présent et l’ailleurs réunionnais. Quant à la dimension temporelle, ce sont principalement les saisons qui sont comparées, en terme de différences de climat et par conséquence de comportements vestimentaires. La déicticité spatio-temporelle se structure sur le double site Réunion/métropole.

… tu arrives à Paris ou ailleurs, tu cherches la mer ou la montagne pour te repérer

… tu cherches encore la mer à Paris et que tu demandes :"Ban’na i baignent dans la Seine qoué ???"

… ziska ban cyclones i manquent à ouh (jusqu’aux cyclones qui te manquent)

… tu as envie de pleurer quand tu regardes Boucan* par une webcam sur le net (* plage très fréquentée à la Réunion)

… tu te fais plaisir à descendre dans la rue en savates (en tongues)le 1er décembre, parce que tu ne peux vraiment plus supporter les bottes et les baskets et que tes potes te demandent si tu n’es pas complètement barré(e) !!

… les gens te trouvent bronzé(e) en métropole… mais une fois rentré(e) à la Réunion tout le monde n’arrête pas de te dire que tu es bien blanc(he) !

3.4. Les phénotypes

Le phénotype est sujet à stéréotypes de la part des interlocuteurs. L’apparence physique a surtout trait à la couleur de la peau, catégorisée selon le diacritique « blanc vs noir », alors qu’à La Réunion cette opposition n’est pas aussi pertinente.

… les gens n’arrêtent pas de te demander ton origine, et que tu es tellement métissé(e) que la seule chose que tu puisses répondre est que tu es réunionnais(e)

… tu dis que tu viens de la Réunion, les gens te disent : « Mais euh, tu es né(e) là-bas ? Et tes parents aussi ?… Enfin, c’est bizarre quoi… tu n’es pas noir(e) ?!? »

… na un boug assis côté ouh dans l’avion, le boug i koz en créole dessus ouh, i calcule ouh comprend pas in merde paske ouh lé blanc, donc ouh lé zoreil (il y a quelqu’un qui est assis à côté de toi dans l’avion, il s’adresse en créole à une tierce personne, pensant que tu ne comprends rien du tout parce que tu es blanc donc tu es « z’oreil »)

3.5. L’appartenance nationale

En construisent un rapport « étranger vs Français », certains contacts métropolitains font surgir le sentiment national, parfois même l’exacerbent. Pour lever le malentendu, ces situations impliquent d’expliciter l’identité nationale de celui qui est perçu comme venant d’un territoire qui ne ferait pas partie de la France.

… on te demande quel est l’hymne de la Réunion… et que tu réponds « La Marseillaise… »

… tu te fais interroger trois heures par l’immigration américaine parce qu’ils savent même pas que la Réunion existe et qu’après ils ne croient pas que c’est français [les Américains ne sont pas tous des ignares hein ! ;)]

… ça t’énerve que les banques te disent que la Réunion est considérée
comme l’étranger

… tu n’as que deux cases dans ces foutus papiers administratifs français pour remplir ton département de naissance.

3.6. Les contacts familiaux et les événements festifs

On aurait pu s’attendre, a priori, à ce que ce thème prenne une place plus importante dans l’ensemble thématique. Or, lorsqu’il apparaît, ce n’est que rarement en tant que tel, mais de manière indirecte, à l’occasion des fêtes par exemple, ou lorsqu’intervient le décalage horaire entre la Réunion et la métropole. Une explication serait à chercher dans la manière même dont est formulée la séquence initiatrice.

… tu raccroches d’avec ta maman et que ton z’oreille (ici il s’agit bien de l’oreille) i chauffe bien comme i faut parce que tu as passé 1 heure au téléphone à demander des nouvelles de tati une telle ou des mangues qui sont en train de mûrir !

… tu es fier(fière) de dire qu’à Noël et au jour de l’an c’est barbecue, piscine, voire feu de camp à l’Étang-Salé

… pour toi, des fêtes de fin d’année sans pétard… ben c’est mol quoi !!

… tu es étonné(e) de ne pas entendre un tralé pétards* le soir de Noël ou le nouvel an chinois (* gros paquets de pétards)

.. c’est ton anniversaire et que tu aimerais un de ces longs repas de famille qui ne se terminaient jamais, qui te fatiguaient, mais qui te manquent tellement maintenant

… ouh réveilles toute out ban famille parce que ouh la pas fait attention au décalage horaire… (surtout quand ban’na en métropole i changent zot l’heure) (tu réveilles toute ta famille parce que tu n’as pas fait attention au décalage horaire…, surtout qu’eux en métropole ils changent leur heure)

Ce dernier extrait révèle la tension qui existe entre le « eux » et le « nous ». De nombreux autres en témoignent. La réitération continue d’expériences similaires contribue à forger une identité diasporique au point que cette tension en devient constitutive.

3.7. Les contacts commerciaux

On voit ici apparaître une série de situations pratiques au cours desquelles l’internaute se méprend sur les manières d’agir dans les contacts du quotidien. Se référant à un savoir encyclopédique pratique appris sur l’île et approprié à la vie courante réunionnaise, il peut se trouver en décalage avec d’autres manières de faire.

… le premier coup ouh la parti fait l’essence en métropole ouh la resse comme un couillon dans l’auto en attendant qu’un boug i vient fait le plein pou ouh (la première fois que tu vas prendre de l’essence en métropole, tu restes tout bête dans l’auto en attendant que quelqu’un vienne faire le plein pour toi)

… tu rentres dans une boucherie et que tu demandes du cabri et que tout le monde te regarde avec des gros yeux

… tu demandes des bringèles (des aubergines) sur le marché et qu’on te répond : « Hein ?! »

… tu demandes un café dans un resto, le serveur i répon’ gentiment « Oui, un long, un court, un expresso ? » et là ouh dit : « Mi veux juste un café, donne à moin un café ! »

… le boulanger te demande de répéter lorsque tu lui as demandé un macatia (petit pain sucré rond)

Conclusion

La migration réunionnaise est, de façon récente, valorisée par les collectivités locales et la mobilité est donnée à voir comme un épisode positif d’épanouissement personnel et professionnel dans un parcours.

La généralisation des TIC à La Réunion joue un rôle important dans l’accompagnement de ce basculement d’une immigration « contrainte » à une immigration positivée.

D’une part, les TIC permettent de maintenir assez facilement et à un coût raisonnable le contact entre migrants et îliens. Contrairement à la première période vécue comme une rupture brutale des liens avec l’île, la généralisation et la démocratisation des réseaux permet une liaison quasi quotidienne entre les familles éloignées. La certitude de garder le contact à tout moment finit par rendre la migration acceptable de part et d’autre ; l’ordinateur connecté et équipé d’une caméra permet aux familles, même les plus modestes de communiquer avec les absents, maintenant ainsi vivante la sociabilité créole qui se construit dans l’échange permanent au sein de la famille (Wolff, 2007).

D’autre part, le site reunionnaisdumonde.com, espace d’échanges entre migrants et entre migrants et îliens, prend chaque jour plus d’importance dans la construction d’une image positive de la migration. Des portraits « d’expatriés » mis en ligne sur le site sont repris et publiés dans plusieurs médias23 de presse écrite et font également l’objet de reportages sur la radio publique (RFO). De ce fait, les migrants, et plus généralement la migration réunionnaise, donnés à voir à tous, « apparaissent », au sens de Hannah Arendt (1972), dans l’espace public médiatique local via un réseau de sites qui se multiplient. Mais cette mise en visibilité publique permet également à ceux qui participent à cette migration réunionnaise de sortir de leur isolement et de prendre conscience de leur appartenance à une communauté qui soudain se révèle à elle-même. En offrant l’opportunité d’exprimer des identités individuelles, ces sites deviennent producteurs de modèles identitaires collectifs. Ils permettent la production d’une localité, que l’analyse thématique met en lumière, particulièrement lorsqu’il s’agit de se définir comme Réunionnais.

Ce qui est au cœur de l‘identité diasporique de celui qui est « ici-là-bas », se lit à travers les thèmes mis à jour supra : la langue, le sentiment national, l’alimentation et les habitudes culinaires, le lieu d’origine, ses paysages, ainsi que les contacts avec la famille et les connaissances ou encore l’apparence comme les phénotypes ou les tenues vestimentaires.

En racontant dans l’espace public de l’internet, sur des plateformes comme Facebook et reunionnaisdumonde.com, les mini scènes de la vie quotidienne composant cette expérience, une identité complexe se révèle à chacun d’eux et pour les autres. Cette complexité tient à la dualité problématique « réunionnaise/française » qui apparaît au grand jour, puisque la vie des internautes s’articule majoritairement sur deux territoires, la Réunion et la métropole24. L’identité est bien un processus négocié dans les interactions sociales ordinaires, et non une essence. Dans certaines situations, on assiste à un processus de fusion où l’origine n’apparaît pas. Ni visible, ni ressentie, n’étant pas en jeu, l’identité ne constitue l’objet d’aucune négociation, consensuelle ou conflictuelle. Aucune mise en scène publique des rencontres sociales ne vient particulariser l’origine des protagonistes, dont l’un au moins est originaire de la Réunion. Mais en d’autres occasions – c’est le cas ici puisque les internautes sont invités à exprimer celles où « ils se sentent venir de la Réunion » –, c’est le « nous » se distinguant du « eux » qui est mis en avant.

À la communauté « invisible » jusqu’au milieu des années 1990, succède, pour partie grâce aux TIC, une communauté « visible » à double titre : elle est projetée dans l’espace public, désignée et auto désignée comme diaspora et elle se construit comme telle en produisant collectivement une identité.

Voir les notes et les références bibliographiques sur cette page.

Les auteurs

Jacky Simonin est professeur en sciences de l’information et de la communication à l’Université de La Réunion et chercheur au LCF (UMR 8143 du CNRS). Ses centres d’intérêt ont trait à l’analyse du discours et des conversations, à l’espace public médiatisé, aux contacts de langues en contextes multilingues et aux processus de diasporisation (Réunion/Océan Indien).

Michel Watin est professeur en sciences de l’information et de la communication à l’Université de La Réunion et chercheur au LCF (UMR 8143 du CNRS). Ses recherches portent sur la question des espaces publics (médiatisé et urbain) et sur les effets de la généralisation des réseaux de communication dans la société multiethnique réunionnaise.

Eliane Wolff est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université de La Réunion, et chercheuse au LCF (UMR 8143 du CNRS). Après avoir mené une ethnologie des populations défavorisées de l’île de La Réunion, elle s’intéresse à l’émergence de l’espace public sur les scènes urbaine, médiatique et scolaire. Ses recherches actuelles portent sur les communications médiatisées et les contextes d’usage et de réception des médias et des TIC.

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