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Florence Gigan : retour réussi après 3 ans en Australie

Publié le 25 mars 2024

« Rentrée à la Réunion après ce long voyage, je me sentais forte. Je savais qu’après cette aventure, j’étais capable de tout ». Florence a ouvert il y a trois ans l’Atelier de Flo, concept-store éco-responsable au centre de Saint-Pierre. Un lieu qu’elle a imaginé à son image. Une interview Spécial Retour à la Réunion


Pouvez-vous vous présenter ?

Florence Gigan, 38 ans, originaire de saint-Pierre. Je viens d’une famille modeste. Mon père était assistant social et ma mère cuisinière. Diplômée d’une licence en communication et conseil en image, je me suis aussi formée à l’aromathérapie et à la PNL. J’ai des connaissances en naturopathie et cosmétologie. J’ai ouvert « L’atelier de Flo » il y a trois ans à Saint-Pierre, un concept-store et coffee shop péi.

Racontez-nous votre parcours.

En 2014, mon compagnon de l’époque et moi décidons de tout quitter à la Réunion pour aller vivre avant nos 30 ans en Australie. Lui était chef de son restaurant et moi formatrice en communication. En tant que chef de cuisine français, il n’a pas de mal à trouver du travail sur place et à bénéficier du visa WHV (working holiday). Ayant des amis qui avaient eu la chance de faire ce voyage, on avait pas mal d’infos sur ce qu’il fallait faire, comme par exemple prendre une assurance vie et rapatriement, une assurance maladie, ouvrir un compte en banque…


Qu’avez vous fait ?

J’ai mis environ six mois à organiser mon départ, le temps de mettre des sous de côté, mettre fin à mes contrats de l’époque, travailler mon anglais, faire mes CV et lettres de motivation en anglais… Mon compagnon a réussi à vendre son restaurant rapidement, et il s’est envolé pour l’Australie trois mois avant moi. En août 2015, j’atterris à Perth et je rejoins mon compagnon qui avait trouvé un logement et une voiture pour notre road trip. Direction Darwin, où nous restons trois mois dans un « cattle station », un ranch australien deux fois plus grand que la Réunion à lui tout seul ! Nous sommes dans l’outback, chez des vrais Aussies, nous travaillons à leur rythme à rénover et construire des "dongas".

Et ensuite ?

Ces sept mois à Darwin sont ponctués de plusieurs voyages à Bali en en Asie, on travaille beaucoup. Mon anglais s’améliore et je commence à maîtriser l’accent australien. On travaille cinq mois dans un hôtel à Dundee beach, lui en tant que chef et moi en tant que second. On dort dans un donga, sans réseau téléphonique. Pendant notre temps libre, on pêche, on campe et on chasse ; parfois on rentre en ville pour retrouver un semblant de vie urbaine. On était devenu de vrais Australiens !


Après 12 mois en Australie, je me sépare de mon compagnon. Je me retrouve seule et je décide de descendre sur Melbourne avant la fin de mon second visa. Je fais alors une demande de visa étudiant de deux ans pour continuer l’aventure. Je travaille dans une boulangerie française, un delicatessen, dans un Zara et enfin dans deux coffee-shop, dans l’un en tant que manager suppléant. La peur d’être seule est très forte mais je découvre une chose : quand on voyage, on n’est jamais seul. On se fait des amis qui deviennent notre famille. Mes amis, pour la plupart français, rentrent progressivement à la fin de leur visa. Au même moment, ma grand-mère paternelle décède. Je me retrouve seule, le cœur en mille morceaux, cela fait presque trois ans que je ne suis pas rentrée à la Réunion... Avec un visa étudiant, le maximum pour rester hors d’Australie dans le cas d’un décès est trois mois.

Que faîtes-vous ?

Je rentre à la Réunion en 2018 avec l’optique de revenir en Australie avant la fin des trois mois. Dans l’avion, je ressens un mélange de joie (celle d’enfin revoir ma famille après trois ans), d’excitation, mais aussi de grande tristesse, car je savais que je n’allais pas revoir ma grand-mère. Des amis d’Australie sautent sur l’occasion et me rejoignent à la Réunion pour des vacances. Suite à leur départ, je déprime un peu. C’est cette fameuse déprime du retour après un très long voyage. Je n’arrive plus à prendre de décision, je dépasse la limite et perds mon visa étudiant. Hébergée chez mes parents (c’est une chance !), je laisse plein de choses là-bas en Australie...


Avez-vous eu des difficultés (professionnelles ou autres) à vous réinstaller ?

Pas vraiment. Mon anglais et mes différentes expériences en Australie m’ont rendu plus confiante et plus forte. Je sens qu’après cette aventure (j’ai failli mourir à plusieurs reprises dans l’outback), je suis capable de tout. Ce voyage m’a vraiment apporté beaucoup sur mon CV, être réellement bilingue aussi. Je trouve du boulot rapidement, je suis même débauchée par une entreprise qui entend parler de moi et de mon expérience. Ils veulent absolument travailler avec moi, car selon eux, il est assez difficile de trouver des personnes avec ce type d’expérience à la Réunion.

Et puis c’est la naissance de L’Atelier de Flo...

En 2020, je décide d’ouvrir un endroit dédié au bien-être et à la beauté au naturel. J’imagine un espace où l’on vient se ressourcer, prendre soin de soi, se poser, où on peut aussi trouver des réponses à certaines questions. Cet endroit, j’ai la chance de pouvoir le poser dans la case créole de mes grands-parents, en plein cœur du centre-ville de Saint-Pierre, soutenue par ma famille.


Le patrimoine réunionnais tient une place importante au sein de la boutique. Vous pouvez y découvrir notre savoir faire à travers les merveilles péi de nos producteurs et créateurs locaux : articles et cosmétiques péi, naturels, bio… Aujourd’hui je souhaite faire grandir ma société, continuer à travers mes évènements, ma cuisine dans le coffee shop et les produits mis en vente dans ma boutique, à mettre la Réunion en Ler, montrer aux Réunionnais leur beauté et la beauté de notre Ile.

Avec le recul, tirez-vous un bilan positif de votre expérience de mobilité ?

Un bilan très positif. Malgré la difficulté de cette aventure (barrière de la langue, éloignement de mes piliers de vie, danger…), je suis aujourd’hui une femme beaucoup plus forte et plus confiante. Je sais ce que je veux et ce que je vaux, je n’ai plus peur d’oser et de réaliser mes rêves. En étant aussi loin, je me suis aussi rendue compte que la Réunion est une île magnifique, extraordinaire, que notre mélange de cultures offre une diversité des savoirs exceptionnelle et unique.


Qu’avez-vous trouvé de changé à votre retour à la Réunion ?

Beaucoup de choses ! En trois ans il y avait plus de bâtiments, plus de monde, mes bébés n’étaient plus des bébés… Même la mentalité me semblait différente. Pour être franche, j’avais l’impression que les Réunionnais n’osaient pas se mettre en avant, dire ce qu’ils avaient envie de dire. En Australie, le champ des possibles parait plus large. Les jeunes osent, les Australiens foncent, essaient… Aujourd’hui heureusement cela tend à changer. Je vois énormément de jeunes entrepreneurs, les Réunionnais voyagent de plus en plus…

Quels conseils donneriez-vous aux Réunionnais qui comme vous souhaiteraient rentrer sur l’île ?

Que si l’envie de rentrer se fait sentir, de ne surtout pas hésiter. Nous sommes ici chez nous, il y aura donc toujours une place pour nous. On a urgemment besoin de Réunionnais fiers de leur nasyon, pour mettre en avant notre richesse et notre savoir-faire. Je ne serais pas arrivé là si je ne m’étais pas battue contre les croyances limitantes de nos ainés. A l’époque, quand j’ai voulu tout quitter pour aller vivre mon rêve, mes parents n’étaient pas forcément pour : « quand tu es Réunionnais, tu ne quittes pas un CDI ; tu restes là et tu fondes une famille... » J’ai dû me « battre » contre ces idées reçues et ma famille, pour pouvoir sortir de cette zone de confort.


L’Atelier de Flo
34 rue François Isautier
97 410 Saint-Pierre
www.atelierdeflo974.com / www.facebook.com/latelierdeflo.974



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