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Élections présidentielles au Brésil : un Réunionnais témoigne

Publié le 30 octobre 2014

Originaire de Saint-Paul, Christophe Hidalgo vit à Sao Paulo depuis 11 ans, où il a suivi sa femme, une Brésilienne rencontrée à Paris. A 34 ans, ce musicien de profession porte un regard assez critique sur la situation politique de son pays d’adoption au sortir des élections d’octobre 2014... et ose des comparaisons avec la Réunion.


Christophe Hidalgo

Comment ont été vécues autour de vous les élections présidentielles au Brésil ?

Après le premier tour, une tension a été ressentie dans tout le Brésil. Le score était (et est resté) serré jusqu’au bout. J’ai vu des amis se disputer, des familles se diviser en deux camps, qui montrent deux visages du Brésil. D’un côté Aecio Neves, le candidat néo-libéral, représente une élite blanche qui ne veut pas voir les bénéfices des politiques sociales pratiquées depuis 12 ans maintenant. De l’autre, Dilma Roussef, la « candidate des pauvres », des artistes et de la nouvelle génération. Cette dernière s’est maintenue au pouvoir avec comme priorité d’extraire des millions de Brésiliens de la misère. Là où je vis à Sao Paulo, capitale économique du pays, les gens ont toujours voté pour le parti libéral, perdant de ces élections.

Vous qui avez vécu des élections à la Réunion, quelles comparaisons faîtes-vous avec le Brésil ?

Le Brésil me fait souvent penser à la Réunion avec ses magouilles, ses détournements d’argents, ses surfacturations de chantiers, etc. Comme chez nous, plusieurs endroits ont encore des pratiques d’un autre temps. Les votes sont achetés en échange d’emplois, de faveurs... Les occasions de népotisme sont aussi nombreuses que les élections - sénateurs, gouverneurs, députés d’état, fédéraux, etc. -, particulièrement à l’échelle régionale où les esprits archaïques dominent la masse selon le principe : "si tu ne votes pas pour moi, tu es contre moi".


Qu’attendent les Brésiliens au sortir de ces élections ?

Plusieurs cas de corruption ont miné le dernier mandat de Dilma Roussef. Les passions politiques suscitées par ces élections ont fait ressurgir de vieux démons : racisme, homophobie, lutte des classes, partisans d’un retour de la dictature... Le peuple attend donc la fin de l’impunité, une réforme du fonctionnement politique, la réduction du nombre de ministères et surtout une éducation publique de qualité... Beaucoup de Brésiliens espèrent que le pays va changer grâce aux élections, mais je vous avoue que j’ai des doutes.

Lesquels ?

D’abord, ce sont toujours les mêmes politiciens qui se présentent. Ils vivent à Brasília, loin des préoccupations de la population... Et puis tout le monde connaît les problèmes de fonds de ce pays : corruption, criminalité, etc. Ma vision est assez radicale : le Brésil est un pays dirigé par une élite politique et de grands agriculteurs qui représente 1% de la population. Cette élite vote des lois en sa faveur pour continuer d’exploiter 99% des richesses du pays. Le Brésil est un pays riche de tout, mais pour peu...

Quatre mois après la Coupe du Monde, quel est le bilan tiré par les Brésiliens de cet événement ?

Bien sûr après la déroute de la demi-finale face à l’Allemagne, le Brésil a la gueule de bois. Mais plus généralement pour financer cet événement, nous (la population) avons payé des impôts plus chers. Depuis cinq ans tout a augmenté au Brésil, du prix de l’eau aux loyers... Mais la coupe a aussi confirmé que le pays sait organiser et recevoir des grands événements mondiaux.

Article paru dans Le Quotidien du 30 octobre 2014


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Christophe Hidalgo

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