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Grippe porcine : Georgia Grondin, en direct du Mexique

Publié le 7 mai 2009

Professeur de français à l’université, Georgia habite la ville de Toluca, à proximité de la capitale Mexico. Elle nous décrit la naissance et l’évolution de la crise dans cette partie du Mexique, l’une des régions les plus touchées par la grippe.

Georgia Grondin
Originaire de Saint-Denis, Georgia est professeur de français à l’UAEMex (Universidad Autónoma del Estado de México) depuis 2000, où elle était venue faire son stage de maitrise FLE.

Le 6 mai 2009

Dans quelles circonstances vous avez pris connaissances de cette crise sanitaire ?

C’est le jeudi 23 avril en soirée que j’ai reçu un message annonçant que les cours étaient suspendus le lendemain pour cause de grippe. Quelques minutes plus tard, c’est un communiqué officiel d’information qui arrivait sur mon téléphone : les cours étaient suspendus à tous les niveaux scolaires jusqu’au lundi suivant. J’étais déjà couchée et ce soir-là je n’avais pas regardé les informations à la télé. Je n’y ai pas plus prêté attention. Le lendemain, j’ai été surprise de constater que la grippe était devenue une nouvelle très importante. J’ai commencé à prendre la chose vraiment au sérieux quand j’ai su que trois états étaient concernés par les dispositions de prévention. Je suis allée à ma fac récupérer des copies. Vu qu’un long week-end s’annonçait, autant en profiter… Le gardien de la fac a hésité avant d’ouvrir et la chose m’est apparue grave en voyant les pancartes officielles expliquant la suspension collées sur les portes de l’établissement.

Qu’avez-vous fait ?

J’ai échangé quelques messages avec des amis et collègues. Le ton était à la philosophie. La rumeur prévoyait déjà qu’on ne retournerait pas travailler lundi. Une exagération, non ? L’après-midi, le supermarché était presque vide… comme si quelque chose dont la gravité m’échappait était dans l’air. Et puis la nouvelle de la grippe a commencé à être couverte par les médias français. J’ai contacté ma famille pour les rassurer, surtout que j’habite dans l’une des premières régions touchées. Le samedi soir j’étais invitée à un mariage et j’ai décidé de ne pas y aller, par précaution. Les médias mexicains couvraient l’affaire de manière tellement insistante que je me suis dit que la situation devait être grave.

Quelle a été l’évolution de la crise ?

Le dimanche soir, l’annonce a été faite que les cours étaient suspendus jusqu’au 6 mai. Cela faisait drôle, tout le monde avait un masque, la grippe était dans toutes les conversations. Tout le monde se faisait des recommandations. Les rumeurs circulaient par le bouche à oreille, les textos et internet. Elles concernaient le nombre réel de morts dû au virus. J’avais l’impression d’un battage exagéré quand même. Après tout, personne parmi mes amis et connaissances n’était touché alors était-ce grave à ce point ? Mais il n’y avait presque personne dans les rues et sur les routes…

Quelles sont les conséquences concrètes de ces événements pour vous ?

Des « vacances » forcées ; je me suis occupée de la maison et j’ai travaillé à mon propre rythme. Je n’ai pas d’enfant, alors je suppose que c’était plus facile pour moi que pour la plupart de mes amis et collègues. Il faut faire preuve d’imagination pour qu’ils ne s’ennuient pas. Dans le lotissement où j’habite, les enfants jouent dehors avec leur masque. Au bout de quelques jours par contre, cela devient un peu désespérant, alors je suis franchement contente du retour à la normale et de retourner travailler. Le gouvernement ne peut pas faire face à la pression des secteurs de production mais surtout de consommation. Mai est l’un des mois où il y a le plus de ponts. La reprise échelonnée a été autorisée. Lés medias parlent d’un nouveau pic de grippe à l’automne, on verra ; on est prévenu.

Avec un peu de recul, avez-vous été bien informée de la situation ?

C’est d’abord sur Internet à travers mes chats, blogs et mails que le spectre du secret et des rumeurs est apparu. La rumeur enflait, genre « on nous cache tout, on ne nous dit rien ». Pendant ce temps, la télé répétait en boucle la même chose et surtout les chiffres concernant le nombre de morts et de malades n’étaient jamais les mêmes d’une chaine à l’autre, d’un jour à l’autre ! Les sources n’étaient pas forcément citées et surtout, il n’y avait pas d’image des malades alors qu’en général les medias font facilement dans le sensationnel.

Quelles étaient vos sources d’information ?

Je suivais les infos sur CNN, Milenio, TV5 et Internet, et les flashs de l’OMS aussi. Alors oui je me considère informée. Mais juste avec les chaines mexicaines mon information aurait été incomplète. Par exemple, ils ont fait un flan sur le nom de la grippe mais ce n’est qu’hier que les autorités ont commencé à donner des chiffres concrets : nombre de personnes atteintes, âge, sexe, région, etc. et ce à cause de la pression des journalistes et de la population.

Les autorités mexicaines ont-elles réagi vite et bien ?

Je dirais oui pour ce qui est de la prévention. Suspendre les activités reste la meilleure prévention dans un pays qui n’aurait pas les moyens de soigner une population énorme et pas forcément bien couverte par la sécurité sociale si la grippe s’étendait à vitesse grand V. Le Mexique a misé sur la prévention et cela me parait être une bonne idée. Par contre, on a pu constater qu’une fois la personne malade, personne ne savait quoi faire pour la guérir.

Quel est votre regard de Réunionnaise sur cette situation ?

J’ai eu l’impression de revoir certaines choses. La facilité avec laquelle les gens prennent peur et… la rapidité du retour à la normale. Quand le gouvernement a annoncé les mesures de prévention et commencé à réduire l’activité du pays, les Mexicains ont eu peur que les supermarchés ne ferment. Ils se sont rués et du jour au lendemain il a été impossible de trouver du savon alcoolisé et des masques… Et puis à partir du moment où il n’y avait plus de morts annoncés, les gens ont tout de suite repris leur rythme de vie, leurs habitudes de partager des moments dehors et de se prendre dans les bras.

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