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Anne-Gaëlle Moidinécouty, étudiante à Sciences Po Paris

Publié le 16 avril 2021

Issue d’un lycée REP+ à la Réunion, elle a bénéficié de l’admission « CEP »* pour intégrer la grande école parisienne. Trois ans et des expériences à l’étranger plus tard, elle fait le point sur son expérience de mobilité, vécue dans le contexte de la crise sanitaire.


Pouvez-vous vous présenter ?

Anne-Gaëlle Moidinécouty Patouma, 22 ans. Je suis originaire d’un petit quartier de La saline les Hauts dans les hauts de Saint Paul. Je suis actuellement en année de césure entre mon M1 et mon M2 du Master Marketing et Etudes à Sciences Po Paris. Je viens de terminer mon stage au sein de Publicis consultants, en communication corporate et crise. 

Racontez-nous votre parcours.

J’ai effectué ma scolarité au Lycée de Trois Bassins, un lycée classé « REP+ » qui détient une convention CEP* avec Sciences Po. C’est grâce à ce dispositif que j’ai pu passer le concours et être admise à la rentrée d’août 2016 à Science Po Paris.


Comment vous sentez-vous à Paris ?

J’ai une relation assez paradoxale avec Paris. Il y a des moments où je suis fascinée par cette ville où tout va à 100 à l’heure, où il y a tant de choses à faire sous la main... Et en même temps ça reste Paris, il fait froid et gris… C’est vrai qu’il y’a une sorte d’indifférence dans la vie de tous les jours qui peut brusquer, mais au final j’y ai fait des rencontres exceptionnelles et je n’ai pas trouvé les Parisiens si désagréables…

Vous avez aussi découvert l’Indonésie.

Sciences Po impose aux élèves une année à l’étranger, et j’ai choisi de la faire en Indonésie. Une anecdote : tout me paraissait peu cher en Indonésie, donc je ne négociais jamais. Lorsqu’une amie indonésienne m’a accompagné faire des achats, elle m’a dit que tout se négociait, que ce n’était pas mal vu et que c’était même une habitude à prendre. C’est à ce moment là que j’ai réalisé que j’étais vraiment à l’autre bout du monde, car ce serait inimaginable en France.


Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

Beaucoup d’opportunités de rencontrer de nouvelles personnes, de découvrir d’autres cultures, d’adopter de nouveaux modes de vie… Je pense que toutes ces petites choses participent grandement à l’ouverture d’esprit. De plus, partir aussi loin à 18 ans force à acquérir une autonomie assez vite (de gré ou de force d’ailleurs !). Cette émancipation aussi jeune m’a permis d’acquérir très vite une maturité qui a été nécessaire pour la suite. 

Quels ont été les avantages / inconvénients de venir de la Réunion ?

L’avantage de venir de la Réunion, c’est que j’ai été bercée très tôt dans un mélange de cultures et de religions. Cependant, très attachée à notre île, j’ai eu beaucoup de mal à m’adapter à un environnement si différent. A peine arrivée à Paris, je n’arrivais pas à imaginer que j’allais y rester cinq ans et je n’avais qu’un désir : rentrer à la Réunion en vacances…

"Je ne serais pas arrivée là si je n’avais pas fait les sacrifices nécessaires, quitter l’île entre autres..."

Quels sont vos projets ?

Dans l’immédiat, je dois trouver un deuxième stage pour valider ma césure. Je subis comme beaucoup d’étudiants la crise sanitaire ; les entreprises recrutent de moins en moins et cela ne va pas en s’arrangeant. Néanmoins, ce temps libre me donne l’opportunité de faire des activités que je n’avais pas le temps de faire auparavant et de faire le point sur mes envies et mes projets. A terme, je souhaiterais travailler dans la gestion de crise car je trouve ce domaine passionnant. Pourquoi pas ouvrir un cabinet à La Réunion ? Et la politique reste également dans un coin de ma tête...

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

Du rhum ahah ! Dès que je dis que je viens de La Réunion, on me demande si j’ai du rhum à faire gouter. C’est toujours un plaisir à partager et mes amis sont friands du rhum arrangé donc je garde toujours une bouteille sous le coude pour les occasions !


Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Oui, la famille et les amis à la Réunion bien sûr, mais également des nouvelles personnes que j’ai pu rencontrer notamment à Sciences Po, qui sont devenus des amis très proches aujourd’hui. J’ai également pu élargir ce cercle lorsque l’on a créé l’association « De La Réunion aux Grandes Ecoles ». On y rencontre des gens formidables et engagés comme moi en faveur de l’éducation réunionnaise. 

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

Difficile de faire une analyse en quelques lignes, mais je peux dire que La Réunion s’ouvre de plus en plus et je ne peux que féliciter les efforts qui sont allés dans ce sens. En revanche, il faut absolument qu’il y ait un éveil politique ! Il faut développer plus de formations à La Réunion pour ralentir la fuite du capital humain et des cerveaux. ), et en même temps donner l’occasion aux Réunionnais partis se former de revenir travailler sur l’île. Je pense qu’une personne ayant grandi à La Réunion et qui est allée se former ailleurs, apportera des outils, une expérience à l’île qui ne peut être que bénéfique. Pour moi, le retour se fera à la condition d’avoir un emploi qui me permettra de m’épanouir, sans oublier l’aspect financier car c’est aussi important vu le coût de la vie sur l’île. 

Bali

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

L’apaisement qu’elle me procure. La Réunion m’a bercée et éduquée, j’ai un lien très fort avec elle. Je ne me sens totalement chez moi et sereine uniquement sur cette île,


Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

Une très bonne image ! Les gens sont assez fascinés par le mélange de cultures, la manière dont on vit cette situation, comment on concilie autant de religions sur un si petit endroit sans que cela ne fasse de vagues. Evidemment c’est le cas, mais j’apporte toujours une nuance à ce genre de propos. On me parle aussi souvent de la crise requin...

Concours d’admission à Sciences Po - les écrits

* Convention éducation prioritaire : Le programme des Conventions Éducation Prioritaire est né de la volonté de diversifier le recrutement social des étudiants.


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