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Caroline Morvan, ingénieure Procter & Gamble à Bruxelles

Publié le 18 mai 2021

Dans la multinationale américaine, entourée de collègues de 14 nationalités différentes, Caroline a fait son chemin et occupe le poste d’« Europe Material Process Delivery Manager » (ingénieure industriel). Elle fait le point sur sa carrière et ses perspectives d’avenir, à la Réunion ou dans une capitale internationale ?


Pouvez-vous vous présenter ?

Caroline Morvan, 33 ans, je viens de L’Etang-Salé les Hauts. Après un Bac au lycée Saint Charles à Saint Pierre, j’ai quitté la Réunion à 18 ans pour faire mes études d’ingénieur, à l’UTC à Compiègne. J’ai choisi cette école en prépa intégrée car c’est une des meilleures écoles d’ingénieur de France et qu’on peut y rentrer après Bac. Cela qui évite de passer par les classes préparatoires et de ne compter que sur le concours à bac +2 pour être sélectionnée dans une bonne école. Ce type de choix peut être important pour les Ultramarins car il me semble plus facile de s’intégrer dans une école directement après le Bac.

Racontez-nous vos débuts.

A mon arrivée en Métropole, j’ai spontanément eu plus d’affinités avec les autres ultramarins (Dom Tom, Maroc, Cameroun...). De plus, étant blanche, j’ai fait face à de nombreux doutes de la part des Métropolitains sur mes origines. J’ai été très embêtée de ce stéréotype pendant pas mal d’années, avant de comprendre qu’il fallait tout simplement expliquer aux autres plutôt que de s’offusquer de ce manque de connaissances. Après tout, il n’est pas donné à tous de se payer un billet d’avion pour aller à la Réunion, et voir de ses propres yeux ce qu’est notre belle et unie diversité !


« Je trouve amusant que les gens en Europe se plaignent souvent du temps qu’il fait. Moi, j’ai décidé de ne pas m’en plaindre car j’ai fait le choix d’être ici ! »


Comment se sont passées vos études ?

Pendant mon cursus d’ingénieur, j’ai été sélectionnée parmi 400 étudiants pour aller étudier à UPenn, Philadelphie aux Etats-Unis pendant un an. Cette université est dans la « Ivy League » (Top 8 des universités aux US) et j’ai eu la chance que la région Picardie me finance cette année d’études (sans quoi je n’aurais pas pu y aller). J’ai travaillé dur pour avoir cette opportunité et j’ai vraiment adoré vivre aux Etats-Unis ! Ce fut une expérience extraordinaire qui m’a aussi rendue bilingue, ce qui a été très précieux pour la suite mon parcours professionnel.

Et ensuite ?

J’ai fait des stages chez Unilever (dentifrices Signal) et Coca Cola. Puis j’ai travaillé chez Saint Louis Sucre en Normandie pendant deux ans ; je tenais à ajouter cette expérience sur mon CV pour pouvoir rentrer un jour à la Réunion. Recrutée par la multinationale américaine Procter & Gamble, basée dans l’usine d’Amiens pendant quatre ans et demi, j’ai aussi eu un poste international où je m’occupais de 11 usines qui produisent la marque Lenor (au Brésil, Russie, Vietnam, Philippines, US, Arabie Saoudite...). J’ai adoré ce job, j’ai beaucoup voyagé et beaucoup appris des autres cultures.


Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Au siège technique européen de Procter & Gamble à Bruxelles, je gère la plupart des projets des différentes usines en Europe, pour les marques Swiffer, Febreze, Ariel Poudre, Fairy, Microban... La Belgique est le bon combo pour moi, car on peut parler Français à Bruxelles tout en étant dans une ville très internationale. En Belgique, j’aime aussi la région flamande où on parle hollandais et anglais, ce qui fait qu’à 15 minutes de Bruxelles, on peut déjà vite être dépaysé.

Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre de revenir habiter à la Réunion ?

Pour l’instant, je suis très heureuse professionnellement et personnellement en Europe. Je travaille avec des gens extraordinaires et j’ai la sensation de grandir chaque jour. De plus, dans mon équipe il y a 14 nationalités différentes. Travailler dans un contexte international est très enrichissant pour moi et c’est peut être ce qui me manquerait le plus en travaillant à la Réunion. J’avoue que je ne suis pas encore convaincue que je trouverais un emploi répondant à mes attentes à la Réunion. Je n’ai pas non plus envie de rentrer par piston car je veux être prise pour mes compétences dans un environnement dynamique et florissant (Oui, j’ai encore ce stéréotype concernant le recrutement à la Réunion).


De plus, je suis en couple avec un Anglais ; si nous avons des enfants un jour, la Belgique serait assez idéale car les enfants ici sont bilingues voire trilingues très tôt. Mais d’un autre côté, j’aimerais que mes enfants grandissent dans cet environnement de rêve et de tolérance qu’on a la chance d’avoir à la Réunion. Mes parents vieillissent aussi et nous sommes beaucoup d’enfants du pays à avoir ce sentiment de culpabilité de ne pas être présent pour s’occuper en retour de notre famille. Donc je changerais peut être d’avis, qui sait !

Quels ont été les avantages / inconvénients de venir de la Réunion dans votre parcours ?

Venir de la Réunion est un avantage pour les entreprises, car nous apportons de la diversité, d’un point de vue de culture, ethnie et personnalité. Il est démontré scientifiquement que les équipes diverses sont plus performantes que les équipes composées d’une seule culture, genre ou style de management. Le principal inconvénient de venir de la Réunion est que nous devons redoubler d’efforts pour nous adapter à la Métropole. Bien que spontané, enjoué, ouvert, dynamique, le Réunionnais peut parfois avoir du mal à s’adapter à la culture métropolitaine qu’il peut trouver « froide, peu enjouée, moins inclusive, etc. ». Il est important pour moi que les Réunionnais ne changent pas leur nature propre car ils apportent vraiment de grands avantages dans une organisation.


Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Je suis toujours restée très attachée à mes meilleurs amis de la Réunion, qui sont quasiment tous venus en Europe pour faire leur études. Ils sont (malheureusement pour moi) quasiment tous rentrés maintenant.

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

J’ai apporté beaucoup de photos et d’objets de Madagascar et de la Réunion. J’ai aussi grandi en parallèle à Mada car mon père y a travaillé pendant plus de 15 ans. J’ai emporté ces objets partout : de Métropole, aux Etats Unis et maintenant en Belgique !


« Je ne serais pas arrivée là si je n’avais pas eu la force de vaincre tous les obstacles et de me battre pour me faire une place. »


Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

Je crois faire bien mon boulot et représenter la Réunion comme il se doit dans mon entourage pro et perso, qui est d’ailleurs très international. Beaucoup de mes amis se sont déjà rendus sur l’île et d’autres attendent mon mariage avec impatience pour s’y rendre ! Ils sont tous d’accords pour dire que les Réunionnais cuisinent extrêmement bien, ont un grand cœur, sont tolérants envers les couleurs et religions et sont aussi des gens très spontanés. Je suis fière d’honorer mon île et je suis reconnaissante à « Réunionnais du Monde » de donner la parole à tous ces Réunionnais qui ont fait le pari de se lancer loin des leurs !


Voir le profil de Caroline Morvan / sur Linkedin / 426 membres et infos réunionnaises en Belgique : www.reunionnaisdumonde.com/spip.php?page=geo&id_mot=390#resultats

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