Publicité

Chrystelle Spencer, professeur de français à New York

Publié le 20 janvier 2009

L’histoire de Chrystelle ressemble à un conte de fées. Alors qu’elle étudie en Angleterre dans le cadre d’un échange Erasmus, elle rencontre Jeff sur Internet, un Américain qui deviendra très vite son mari. Installée aux Etats-Unis depuis 2002, Chrystelle a changé d’orientation professionnelle et passé tous les diplômes pour devenir professeur de français dans les écoles publiques américaines. Mère de deux enfants, elle enseigne au collège Broadway Middle School, école en milieu défavorisé. C’est une fervente ambassadrice de la Réunion à New York.

Chrystelle Spencer
"Quand le temps est un peu maussade et froid, je change le programme de mes cours pour parler de la Réunion".

Racontez-nous votre parcours.
"Je viens de la Montagne. Mon nom de jeune fille est Verdun. Avec mes parents et mes deux petits frères, nous avons fait pas mal d’aller retour Réunion - métropole. A la Réunion, on a vécu principalement à la Montagne mais aussi à la Bretagne. Donc, je suis allée à l’école du Ruisseau Blanc, au collège de la Montagne, au collège Domenjod, au lycée de Bellepierre et à l’Université de La Réunion".

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?
"Tout s’est joué pendant un programme d’échange ERASMUS entre la fac des sciences de La Réunion et l’Université de Sussex (oui je sais c’est marrant comme nom...) à Brighton en Angleterre. C’était en octobre 2000. J’étais alors inscrite en maîtrise de Biologie des populations et écosystèmes à l’UR. Un soir que j’essayais d’améliorer mon anglais en chattant sur le net, j’ai rencontre Jeff. On s’est fiancés en juin 2001 et mariés le 3 août 2002 sur le lac Seneca dans l’état de New York. Et je suis venue vivre ici avec Jeff, à Elmira, NY".

Racontez-nous vos débuts.
"Quand je suis arrivée ici, je me suis demandé ce que je pouvais bien faire car il n’y avait pas beaucoup d’opportunités au niveau scientifique. J’étais bien loin de la mer pour devenir biologiste marin, comme me prédestinaient mes études. Alors je me suis dis : Qu’ai-je donc de spécial ici ? Réponse : je suis une Française venue d’une île qui n’est pas toujours représentée sur les cartes géographiques. J’aime partager et surtout j’aime aider les jeunes (je faisais de l’aide scolaire à La Réunion.). C’est ainsi que j’ai décidé d’enseigner le français..."

Qu’avez-vous fait ?
"J’ai commencé à prendre des cours du soir. La journée, je travaillais en tant que vendeuse dans un magasin d’un centre commercial. Puis j’ai fait la connaissance du professeur Lynn Diamond-Nigh à l’Université Elmira. Elle m’a proposé de travailler avec elle. Pendant un an et demi, j’ai enseigné le français dans cette université. J’ai aussi donné des cours du soir de français à des adultes qui partaient en vacances en France. Finalement j’ai obtenu le "Public School Teacher Certificat" de l’état de New York. Je peux donc enseigner la biologie et le français aux niveaux collège et lycée".

Et ensuite ?
"J’ai fait mon stage d’enseignante pour le système public au lycée Southside High School. C’est là que j’ai appris tout ce que je devais savoir pour faire face aux collégiens et lycéens ! Petit à petit j’ai fait mon nid et je me suis fait tout plein de connaissances. Un jour, Mme Winston et une autre amie Sue Rogers, qui est a la tête du département des langues dans notre district, sont venues me chercher pour me proposer un boulot dans un collège proche de chez moi. Le principal venait de renvoyer le professeur de français en exercice et il n’avait aucune intention d’en employer un autre. Mais je crois que le charme réunionnais a fait son effet, car après un entretien, il m’a proposé un contrat en or !"

Aujourd’hui, où en êtes-vous ?
"Depuis septembre 2007, je fais partie de la famille Broadway ! Avec mes élèves, on a créé la B.F.F. : Broadway French Family (au lieu de Best Friends Forever). L’année dernière, un de mes élèves a fini parmi les gagnants du cours "In " Lafayette Footsteps" organisé par le consulat français de New York. J’ai aussi débuté une correspondance avec le collège Bernard à Salon de Provence. Mes élèves sont tous fous dès qu’ils reçoivent une lettre de leurs correspondants. J’aimerais bien faire une correspondance avec un collège réunionnais, mais je me dis car ça serait trop cher d’y emmener mes élèves…"

Quels sont vos projets ?
"Je vais bientôt commencer un programme après l’école : Broadway French Friends. Ce programme me permettrait de sensibiliser plus d’étudiants à la culture française. Je compte aussi devenir le meilleur prof des USA un jour. Non, ce n’est pas impossible ! Une prof d’espagnol de ma région vient d’être élue meilleur prof de l’état de New York. Elle va donc représenter New York a niveau national. Un jour, ce sera moi et je ferai connaître la Réunion ! Je compte aussi être à la tête du département des langues de mon district. Et j’espère créer un programme d’échange entre Elmira et la France, surtout avec la Réunion !"

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?
"Le fait de vivre loin de La Réunion me fait apprécier encore plus les trésors de mon île. Quand le temps est un peu maussade et froid, je change mes cours pour parler de la Réunion. Je fais rêver mes élèves, j’adore parler de mon île. J’ai l’impression d’ouvrir les yeux de mes élèves sur d’autres horizons".

Vous en parlez comme d’une véritable mission.
"Ma mission est de faire connaître la Réunion. A chaque fois que j’en parle, il y a plus de personnes qui connaissent notre île et désirent un jour y aller. A mon grand bonheur, je sais que ma mission est réalisable : une de mes élèves de Southside High School est en ce moment même à la Réunion. Elle a choisi la Réunion comme endroit pour améliorer son français. Elle a écrit a Mme Winston : "Devines où je suis ? A La Réunion, l’île de Mrs. Spencer !"

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?
"Ma famille bien sur. Je ne vois pas grandir mes petits cousins et cousines et surtout mes filleules. Mais je me dis que grâce à moi, ils ont un pied-à-terre aux Etats-Unis ! J’aimerais tellement que mes filles puissent passer plus de temps avec ma famille mais c’est malheureusement pas évident et très cher. Mes amis d’enfance me manquent aussi. Heureusement qu’il y a Internet ! La plage et la plongée sous-marine aussi. Et surtout, surtout un bon ti carry ti Jacques-boucané !"

Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?
"On est gâté pourri à La Réunion. Les jeunes sur l’île ont beaucoup plus de chances de réussir que les jeunes à Elmira. Drogue, violence, abus, alcool, pauvreté font partie du quotidien de la majorité de mes élèves. Malheureusement, la seule chose positive dans leur vie est l’école !"

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?
"Travaillez dur à l’école, surtout en classe de langues ! N’ayez pas peur de partir car cela vous permettra de devenir des représentants de notre chère île partout dans le monde. Grâce à ceux qui quittent La Réunion, l’île devient de plus en plus mondialement connue !"

Un dernier mot ?
"Venez me rendre visite sur ce site !"

Voir le profil de Chrystelle

Publicité