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Comment la Nouvelle-Zélande a contenu le virus - témoignage

Publié le 19 novembre 2020

2000 cas et 25 décès pour 5 millions d’habitants… François Boyer a quitté la Réunion avec femme et enfants pour Auckland en 2015, « dans un esprit de challenge, pour tout recommencer ». Il décrit la situation dans un pays qui a choisi la fermeture des frontières, la quarantaine obligatoire et un système de pointage des cas pour lutter contre le coronavirus. Une réussite en termes de santé publique qui n’empêche pas des baisses de salaires et une récession économique dans ce pays qui dépend beaucoup du tourisme et des échanges avec l’extérieur.


Pouvez-vous vous présenter ?

François Boyer, 42 ans, yab de la Chaloupe Saint Leu. Je travaille actuellement dans une boite de publicité à Auckland en tant que responsable informatique.

Quelle est la situation de l’épidémie de Covid-19 en Nouvelle-Zélande ?

La Nouvelle Zélande a un système d’alerte à trois niveaux. Nous sommes actuellement en niveau 1, qui est le niveau le plus bas. Le masque n’est pas obligatoire. Le gouvernement demande aux gens de faire attention, de faire preuve de bon sens, et, surtout d’utiliser l’application de suivi. C’est a dire de pointer dans chaque lieu où l’on se rend, afin de pourvoir être contacté facilement en cas de nouvelle vague. Le nombre de cas actif à ce jour est de 44.

Quelles sont les mesures prises par les autorités pour contrer l’épidémie ?

Nous avons la chance d’être sur une île (une grande île). Donc, dès lors que les frontières sont fermées, les cas sont maitrisables. Nous avons eu deux fermetures totales des frontières (« lock down ») pour stopper deux grosses vagues. Cela a très bien marché. Depuis, les arrivées sont systématiquement contrôlées et passent obligatoirement par la case quarantaine (15 jours en fait !). Le gouvernement prend en charge les frais liés a cet isolement. Et pour les travailleurs dans les ports et les aéroports, les mesures sanitaires sont strictes et les contrôles pour les employés tous les 15 jours.


Le niveau d’alerte 1 est très relaxe. On pourrait dire que c’est la vie normale, mais on nous incite à pointer dans chaque lieu où l’on se rend, afin de pouvoir être contacté en cas de nouvelle épidémie. Les frontières ne sont toujours pas ouvertes, à part avec les petites îles voisines (Tonga, Pacific Island). C’est très important pour l’économie car l’été est là et nous avons besoin de beaucoup de main d’oeuvre pour la récolte des fruits, entre autres.

Quelles comparaisons faîtes-vous sur la manière de gérer la crise en France ?

Je pense que c’est le jour et la nuit. Il est très difficile de gérer 60 millions de personnes sur un continent, en comparaison de 5 millions sur une île. Donc, difficile de juger la gestion de la crise en France. Ca m’a quand même l’air d’être un peu l’hécatombe et c’est inquiétant. La Réunion a la chance de pourvoir fermer ses frontières, ce qui rend la gestion de l’épidémie plus ’gérable’, si je peux dire. Je suis content de voir que le Préfet s’est battu dernièrement pour ne pas avoir un nouveau confinement. Bien joué !


Aussi, je pense que d’avoir une femme à la tête du pays a beaucoup aidé. Jacinda Ardern est très humaine et elle se soucie sincèrement du bien être de la population, comme une mère. Le pays l’admire beaucoup et l’a d’ailleurs réélue. Ses décisions ne sont pas autoritaires et tranchées, mais justes, réfléchies et expliquées. D’où une adoption et une compréhension de la population et une gestion plus sereine de la crise. Ceci étant dit, la crise touche le pays durement et nous sommes officiellement en récession. Beaucoup de gens ont perdus leur travail...

Comment êtes-vous personnellement affecté par cette crise ?

La Nouvelle Zélande mise beaucoup sur le tourisme et ce secteur est fortement touché. Personnellement, nous avons perdu un salaire dans le foyer (tourisme), et pour aider l’entreprise, notre second salaire est réduit jusqu’à la fin de l’année. Le monde de la publicité n’est pas au plus fort non plus. Chaque poste de travail publié voit entre 300 et 400 postulants là où il y en avait 30 à 40 avant COVID. Le gouvernement aide les entreprises de son mieux. Les grosses entreprises aident les particuliers aussi, tant que possible. Par exemple, pendant le confinement, comme il n’y avait plus de voitures dehors, nos compagnies d’assurances nous ont remboursé le mois entier. Les mutuelles et autres banques ont aussi joué le jeu en suspendant les mensualités, gratuitement. Le pays est solidaire et nous essayons de faire de notre mieux en aident les commerces locaux. Dans la mesure de nos moyens respectifs. Au niveau santé, tout va bien, je n’ai rencontré aucun cas, ni de près ni de loin (travail, communauté, quartier, rien). Je croise les doigts, touche du bois ou la peau de singe que ça reste comme ça.


Constatez-vous que le pays est inquiet ?

La plus grosse inquiétude est sur le plan économique. L’incertitude autour de l’ouverture des frontières n’aide pas. Mais les Néo-Zélandais restent des gens positifs. Ils se disent que ça va passer et qu’ils vont s’en sortir. De plus, l’été et la reprise du rugby aide à se divertir et à penser à autre chose.

Quel est le regard sur la situation en Europe vu de Nouvelle-Zélande ?

Le regard de la Nouvelle Zélande se porte surtout sur l’Angleterre, un peu comme la Mère Patrie. Et ils sont bien évidemment choqués de voir le nombre de cas quotidien. Ce qui me connaissent en tant que Français me font juste la remarque que le pays va mal, mais sans plus. Le sujet de discussion brûlant est autour de l’Australie et de la possible réouverture des frontières à ce niveau. Il y a beaucoup d’échanges et de familles d’un côté comme de l’autre.


Est-ce que vous suivez l’état d’avancement de la situation à la Réunion ?

Oui, naturellement, tout notre famille y est, donc nous suivons cela de près. C’est la qu’mon z’ombril lé enterré ! Heureusement la magie d’internet nous permet d’avoir des nouvelles au quotidien et de savoir que tout le monde va bien. Pourvu que ca dure ! Tienbo ensemb’ !


Photos : www.facebook.com/FrancoisBoyerPhotopassion

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