Publicité

Coralie Latchoumane, 25 ans, assistante au Beijing Tourism Group à Pékin

Publié le 6 juin 2007

"Les Chinois sont restés trop longtemps isolés, si bien qu’ils sont avides de connaître le monde qui les entoure. Le dynamisme économique provient de cette curiosité et de cette envie de faire partie du village global qu’est le monde".

Coralie Latchoumane
"montagne" + "eau" = "paysage" en mandarin. Ici au LAC LUGU dans la province du sud de la Chine, le Yunnan (littéralement "au sud des nuages"), le Paysage par excellence.

Lire sa 2e interview pour le site reunionnaisdumonde (avril 2010)

Parlez-nous de vous.

"Le fameux Confucius a écrit :"Ne parlez jamais de vous, ni en bien, car on ne vous croirait pas, ni en mal car on ne vous croirait que trop"… Me voici donc :

- Nom : Latchoumane Coralie alias "cadeau de la mer" en chinois (on fait avec les moyens du bord !)

- Age : signe du chien (= année 1982)

- Cursus : Institut d’Etudes Politiques à Aix en Provence spécialisation Chine puis Master Tourisme tourné vers le monde chinois.

- Actuellement en stage de six mois dans un Tour Opérateur 100% chinois à Pékin"

D’où êtes vous à la Réunion ?

"Je viens de la ville qui pour une fois fait parler d’elle mais pas forcément en bien : St Louis… Mon père est issu d’un milieu modeste et ma mère métropolitaine tombée amoureuse de la Réunion… Peut-on parler d’un milieu aisé ? En tout cas, comme beaucoup sur l’île j’ai eu la chance d’avoir des parents qui m’ont soutenue dans mes projets, quels que soient les revenus".

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

"La plupart des Réunionnais au sortir de leur bac veulent se donner les moyens de réussir et sont avides de découvrir le monde. Moi aussi j’ai suivi ce précepte chinois : "Il faut rajouter de la vie aux années et non des années à la vie"…"

Quel a été votre parcours ?

"Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas", tel est le conseil que prodigue Lao-Tseu, chantre du taoisme. Ma première étape a été la Métropole (Toulouse puis Aix-en-provence puis Angers) pour les raisons que l’on sait. Néanmoins, mes yeux étaient rivés vers l’Asie, terre de mes ancêtres. J’ai donc eu l’opportunité de faire un échange d’un an à l’Institut de Diplomatie de Pékin dans le cadre d’un renforcement linguistique intensif en mandarin".

Qu’avez-vous ressenti en Chine ?

"Les crachats, la cacophonie des klaxons et même les toilettes sans porte ne m’ont pas dissuadée de revenir dans ce pays si dynamique et accueillant ! Par conséquent c’est là que j’ai à nouveau posé mes valises afin d’effectuer un stage auprès d’une agence de voyage chinoise. J’ai des migraines tous les soirs, je cauchemarde sur les caractères chinois, mais c’est une expérience interculturelle très enrichissante. D’autant plus que mon mandarin fait des bonds à vitesse exponentielle !"

Quels sont vos projets ?

"Je répète toujours que les projets sont faits pour ne pas être faits… Idéalement j’aimerais travailler dans le consulting dans un cabinet-conseil afin de servir d’interface sino-occidentale pour les entreprises désireuses de s’implanter en Chine. Cependant, je ne me ferme pas les portes. Comme disait mon cher ami Lao-Tseu : "Le vrai voyageur n’a pas de plan établi et n’a pas l’intention d’arriver"…"

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"A relativiser. Ce n’est pas parce qu’on est mobile qu’on peut prétendre tout savoir sur le monde. "Ce qu’on sait, savoir qu’on le sait ; ce qu’on ne sait pas, savoir qu’on ne le sait pas : c’est savoir véritablement" (Confucius). L’important est d’apprendre constamment au fil de ses expériences et de surtout prendre son temps. "Ne craignez pas d’être lent, craignez seulement d’être à l’arrêt" (proverbe chinois)".

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"C’est ce qui manque qui donne la raison d’etre" disait Lao-Tseu. Donc tout ce qui fait ce que je suis me manque ! J’ai eu beaucoup de chance dans mon parcours mais désormais j’envisage de rentrer chez moi. Car "Maison de paille où l’on rit vaut mieux qu’un palais où l’on pleure"( ils sont forts pour les proverbes ces Chinois !)"

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"La situation géographique a longtemps été un frein à l’expansion socio-économique de l’île. Mais désormais les Réunionnais ont compris qu’il fallait sortir de cet isolement. Cependant, mobilité ne rime pas avec éloignement. En effet, "la porte la mieux fermée est celle que l’on peut laisser ouverte". Dès lors, on observe aujourd’hui un retour des "cerveaux" à la Réunion (du moins un désir de retour) ou bien une expatriation à l’étranger puisque la Métropole souvent nous déçoit".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Pour moi il n’y a que des avantages. Une fois que nous avons quitté l’île, pour nous le monde n’a plus de frontières. On est prêts à multiplier les expériences car "la rose n’a d’épines que pour qui veut la cueillir". On ose plus que les Métropolitains car on a moins peur de faire des faux-pas. L’inconvénient c’est qu’on a parfois tort de ne pas s’arrêter. La famille réunionnaise dorénavant éparpillée aux 4 coins de la planète est sacrifiée au profit de la carrière professionnelle…"

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

"J’avoue que j’ai toujours évité les regroupements afin de mieux m’intégrer. Mais je pense qu’il est important de se soutenir et de partager ses expériences car "une baguette est facile à casser, dix baguettes sont dures comme fer"."

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

"Ils sont 1,3 milliards de petits Chinois et en un an et demi j’en ai rencontré qu’un seul qui sache où se trouve notre île. Mais l’avantage est qu’ils sont toujours curieux. Selon eux, "celui qui pose une question est bête cinq minutes, celui qui n’en pose pas l’est toute sa vie". La Réunion est un mystère pour les Chinois. Ils sont restés dans l’isolement pendant trop longtemps, si bien qu’ils sont avides de connaître le monde qui les entoure. Le dynamisme économique dont on parle provient de cette curiosité et de cette envie de faire partie du village global qu’est le monde".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"Trois conseils :

- "Inutile d’enseigner aux singes à grimper aux arbres" (Lao-Tseu) : chacun construit sa route. Si certains veulent sortir de la Réunion tant mieux ; si d’autres ne le souhaitent pas, tant mieux aussi...

- "Il vaut mieux allumer une bougie que maudire l’obscurité" : cependant, s’il y en a qui se plaignent de leur sort à la Réunion, ils devraient faire comme les autres. Il ne faut pas se complaire dans sa situation. Alé bat’ karé !

- "Agissez envers les autres comme vous aimeriez qu’ils agissent envers vous" (Confucius) : no comment.

Si vous cherchez un stage/emploi en Chine, choisissez les entreprises françaises pour une première expérience. Sinon barrière de la langue et culture d’entreprise radicalement différente vous attendront".

Que pensez-vous du site www.reunionnaisdumonde.com ?

"C’est une très bonne idée. L’objectif n’est pas de tomber dans une logique communautaire mais de faire fructifier les relations et de s’aider mutuellement. Nous vivons dans une société de l’information et l’avenir appartient à celui qui détient cette information…"

Voir le profil de Coralie Latchoumane

Lire les reportages de Coralie (JO de Londres, JO de Pékin, Expo universelle de Shangai et Grippe au Mexique)

Lire sa 2e interview pour le site reunionnaisdumonde (avril 2010)

Publicité