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Coronavirus en Inde : une Réunionnaise témoigne

Publié le 9 avril 2020

Suite du tour du monde... Cette Salazienne installée à Pondichéry fait le point sur la situation dans le deuxième pays le plus peuplé du monde, où la décision d’imposer un confinement général a brutalement privé les travailleurs pauvres de ressources, les obligeant à fuir les villes.


Pouvez-vous vous présenter ?

Daphné Parisot Voegtlin, 35 ans, originaire de Salazie. J’ai grandi dans un gîte à Hell-Bourg. A la maison, on avait l’habitude de recevoir des personnes de différentes nationalités… Cela m’a donné l’envie de voir le monde, de voir ce qu’il y avait au-delà de nos frontières ! Après avoir travaillé dans la communication et le marketing à Madagascar pendant six ans, j’ai suivi mon mari en Inde à Pondichéry suite à sa mutation au Lycée Français International de Pondichéry.

Quelle est la situation de l’épidémie Coronavirus en Inde ?

A ma connaissance, l’Inde compte 5 000 cas actifs et 137 décès du Coronavirus. Des chiffres qui ne représentent probablement pas la situation réelle. Peu de tests ont été faits pour le moment mais il me semble que les autorités indiennes prévoient un dépistage plus massif via des tests rapides du Covid-19. Un confinement gigantesque est réalisé en Inde, mais il est difficile de confiner plus d’un milliard de personnes...

Quelles sont les mesures prises par les autorités pour contrer l’épidémie ?

Les mesures de confinement « lock-down » annoncées le 24 mars par le Premier ministre Modi pour endiguer la propagation de l’épidémie sont en vigueur dans l’ensemble de l’Inde. Nous avons reçu de nombreux textos nous demandant de nous laver les mains, de rester chez nous, d’éviter les rassemblements... Quand nous appelons une personne par téléphone, avant d’entendre la sonnerie nous pouvons entendre une voix enregistrée tousser puis alerter sur la situation de la pandémie. A Pondichéry, nous pouvons nous déplacer pour aller faire des courses, aller à la pharmacie, faire le plein d’essence entre 6h et 14h30. Il est interdit de se déplacer après ça sauf en cas d’urgence. Un numéro vert a été mise en place par le gouvernement.

Comment avez-vous personnellement vécu cette crise ?

Nous nous sommes « auto confinés » depuis le 17 mars et nous avons fait des provisions pour deux mois. Nous avons la chance d’avoir une maison avec assez d’espace et une piscine. Ça aide beaucoup à « vivre bien » son confinement avec un enfant et 40 degrés dehors. Comme beaucoup de personnes, nous faisons beaucoup d’apéros Skype…


Mon mari est professeur, il donne ses cours en vidéo conférence car le lycée est fermé depuis le 17 mars. Mon fils à trois ans. Nous suivons des animations réalisées par sa maîtresse via Whasapp et Zoom. Nous ne pouvons pas sortir pour promener les chiens (nous en avons deux), ou faire un footing, ou même juste se promener. La police est très vigilante et fait appliquer le confinement avec fermeté. Il est possible de demander à des personnes de faire des courses pour nous et les autorités s’engagent à faire déposer le tout devant notre porte.

Avez-vous des contacts avec vos voisins ?

Nos voisins nous ont interrogé avec une certaine anxiété sur la situation en Europe, mais ils ne nous perçoivent pas comme des vecteurs potentiels du virus puisque nous n’avons pas quitté le pays depuis Noël et que nous ne voyons personne depuis trois semaines. Ici les gens sortent encore pour aller chercher l’eau à la source du village, pour faire la vaisselle devant celle-ci ou faire le linge. Mais nous nous inquiétons pour nos voisins. Nous vivons à Kottakuppam, dans un village populaire de pêcheurs et d’ouvriers, et le confinement les empêche de travailler. Le Premier Ministre a débloqué 24 milliards de dollars pour des rations alimentaires gratuites pour 800 millions de personnes défavorisées, des aides en espèce pour 204 millions de femmes pauvres et du gaz de cuisine gratuit pour 80 millions de ménages au cours des trois prochains mois... J’espère que l’aide va vite arriver. Les Indiens font face à la crise avec fermeté et courage. Mais les gens ont peur que ce confinement se poursuive. Ils veulent retourner travailler.


Constatez-vous que votre entourage est inquiet ?

Nos familles respectives nous demandent de rentrer en métropole ou à La Réunion pour passer le confinement. Mais pour le moment, nous sommes bien chez nous et prenons les mesures nécessaires pour ne pas tomber malade. Nous suivons quotidiennement les nouvelles de France et d’Inde. Le consulat Général de Pondichéry est en alerte. Nous avons un numéro de téléphone pour les Français de Pondichéry en cas de symptômes, et nous avons une cheffe d’îlot qui nous tient au courant des dernières nouvelles de la circonscription.

Est-ce que vous suivez l’état d’avancement de la situation à la Réunion ?

Oui, je pense que nous ne sommes qu’au début de la pandémie, qu’il va falloir prendre son mal en patience et s’adapter à cette situation. Mon avis est que le pays ne pourra pas se permettre trop longtemps de ralentir son économie, car la récession serait encore plus forte. Je pense que nous allons donc tous reprendre le cours de nos vies et faire face à ce virus à un moment ou à un autre. J’espère juste que le personnel hospitalier aura tout l’équipement nécessaire pour se protéger et de la place pour soigner tout le monde.


Voir le profil de Daphné : www.reunionnaisdumonde.com/membre/daphne-parisot / D’autres témoignages sur le Coronavirus

Avant le Coronavirus...
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