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Émilie Séry, diplômée de l’Institut maritime du Québec

Publié le 11 août 2020

"Je voulais autre chose. Un défi et une promesse d’avenir : le Québec a été mon évidence"… Après avoir échoué à trouver du travail sur son île, Emilie s’est expatriée au Québec, où elle vient d’être récompensée d’une Médaille académique pour sa réussite scolaire. Elle raconte son parcours à Réunionnais du monde.


Pouvez-vous vous présenter ?

Émilie Séry, 33 ans. Je suis originaire de Saint-Denis, d’une famille très modeste mais où la réussite scolaire a toujours été importante. En effet, obtenir des diplômes était pour mes parents la meilleure façon de s’en sortir et d’améliorer sa condition. Après avoir obtenu ma licence en droit à l’université de la Réunion, je suis partie pour la Métropole pour continuer en Master à l’université de Toulouse Capitole. Je suis restée dans la ville rose de 2011 à fin 2015 soit quatre ans enchaînant les petits boulots.

Et ensuite ?

Après quelques mois à Creil pour une formation qui n’a pas aboutie, je suis rentrée à la Réunion. À nouveau, un contrat temporaire et une situation instable m’ont décidé à quitter mon île et c’est là que j’ai repensé au Québec... Je m’étais déjà renseignée à la fin du lycée, mais mes proches m’avaient dissuadée me jugeant trop jeune à l’époque. Cette fois-ci, je n’ai fait part de mon projet qu’une fois les démarches enclenchées et le doute n’a pas eu sa place. Je voulais autre chose, un défi et surtout une promesse d’avenir : le Québec a été mon évidence. Mon choix s’est porté sur la logistique du transport. Le domaine me paraissait suffisamment vaste pour que j’y trace ma voie et surtout la pénurie d’emploi dans ce secteur était réelle.


Racontez-nous votre arrivée au Québec.

C’est en août 2017 que j’ai mis les pieds à Rimouski dans le Bas Saint-Laurent pour la toute première fois ! Le trajet de Montréal est de six heures et mon compatriote et moi avions déjà nos petits chocs culturels : difficultés de compréhension de par l’accent, bonjour pour dire au revoir et à notre descente du bus, agréable surprise quand notre comité québécois a fondu sur nous pour nous faire la bise, alors qu’il nous avait été dit que ce n’était absolument pas dans les mœurs. Un baume au cœur quand on arrive en terrain inconnu avec la fatigue du voyage...

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Je suis fraîchement diplômée de l’Institut maritime du Québec en logistique du transport. J’ai reçu la Médaille académique du Gouverneur général, une des plus prestigieuses distinctions décernée à des étudiants au Canada pour leur réussite scolaire (moyenne générale supérieure à 93%). Surtout, je viens d’être engagée par mon école pour exercer les fonctions de technicienne en administration des stages. Je vais accompagner les élèves officiers dans la réalisation de leurs stages en mer.


Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

Le Bas Saint-Laurent et Rimouski sont de très beaux endroits. Les paysages sont beaux, l’air est pur et la proximité du Saint-Laurent est un vrai bonheur. J’ai eu de bons moments avec mes connaissances québécoises, de belles découvertes, mais il y a eu aussi quelques mauvaises surprises. Ça fait partie de l’expérience d’expatriation et on relativise comme on peut. Il n’en demeure pas moins que le Bas Saint-Laurent est un endroit où il fait bon vivre.

Quels sont vos projets ?

Je compte bien me bâtir une solide expérience professionnelle. Mon emploi actuel va me permettre de me faire des contacts dans le monde maritime et d’en apprendre davantage sur les certifications. J’aimerais également suivre d’autres formations en parallèle. Bref, je continuerai d’ajouter des cordes à mon arc. Pour ce qui est du processus d’immigration, je suis en attente de mon permis de travail post-diplôme et je compte lancer dès que possible les démarches pour la résidence permanente. Une fois obtenue, le Canada entier me sera ouvert et qui sait… l’aventure ne fait que commencer !


Que vous a apporté l’expérience de la mobilité ?

La mobilité m’a permis de prendre davantage confiance en moi, d’oser plus de choses, d’être plus débrouillarde, plus aventureuse aussi. Venir de la Réunion est un atout en soi. Un atout parce bien que l’on vienne d’une petite île du bout du monde, nous sommes ouverts, curieux des autres, chaleureux et adaptables. Cependant, on demeure des étrangers qui doivent prouver leur valeur et dont les valeurs rebutent parfois. On apprend à nos dépends…

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

La Réunion est souvent méconnue. Très peu de gens sont en mesure de la placer correctement sur une carte et les préjugés sont nombreux : avez-vous des routes ? Internet ? Un roi ? Nous sommes les meilleurs ambassadeurs de notre île et avec patience, nous sommes en mesure de présenter notre petit paradis et de donner envie aux personnes de venir visiter et se laisser porter par la chaleur 974 !

Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre de revenir habiter à la Réunion ?

Un emploi stable avec des perspectives d’évolution. Des beaux projets qui permettent de faire avancer encore plus notre belle île.


Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

Ma famille, les gens, le climat, la nourriture, les paysages, la convivialité, la tolérance. Mon île entière me manque. Ici j’ai apporté mon savate deux doigts, mon piment la pâte, mon porte-clés margouillat… de petits objets qui me rappellent mon île. Ils sont toujours avec moi et ma famille veille toujours à me réapprovisionner, surtout en termes de nourriture.

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

J’ai eu la chance d’avoir un Réunionnais de mon âge qui retournait aux études dans la même école que moi. Nous nous sommes trouvés beaucoup de points communs et nous sommes devenus amis. Il a été et est toujours un soutien immense. Nous avons rencontré quelques Réunionnais et c’est toujours avec plaisir que nous échangeons nos expériences et que nous nous réunissons pour partager un bon cari créole.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

J’ai quitté mon île parce qu’il est trop difficile d’y trouver un emploi. J’ai un peu un goût amer en pensant que notre jeunesse talentueuse et dynamique doit quitter l’île par manque d’opportunités. Il faut donner la priorité aux jeunes et faire confiance, car sans première expérience, difficile d’acquérir une expérience.


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