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Florence Boyer porte la danse Maloya jusqu’à Taïwan

Publié le 2 mai 2019

Florence Boyer et sa compagnie Artmayage sont actuellement à Taiwan où elle présente la danse Maloya aux Aborigènes Paiwan. La danseuse raconte ce séjour « inoubliable » à notre partenaire outremers360.com .


Si la danse Maloya résonne sur le parquet et dans les corps des danseurs contemporains aborigènes de la communauté Paiwan de Taïwan avec le célèbre Tjimur dance Theater, on peut se dire que Florence Boyer et la Cie Artmayage ont encore repoussé plus loin les frontières de la danse Maloya. Après la Norvège, l’Indonésie, Paris, Marseille, Toulouse, la Guyane, les Pays-Bas, … Florence Boyer et la Cie Artmayage font à nouveau voyager la culture réunionnaise à l’autre bout du monde.

Florence Boyer, une chorégraphe, danseuse et chercheuse en anthropologie réunionnaise qui, depuis ses débuts, n’a de cesse d’étendre les frontières de la danse Maloya au-delà des rives de son île natale. Elle avait pris le pari qu’elle pourrait faire voyager la danse Maloya au-delà des frontières réunionnaises. Et c’est ce qu’elle fait depuis les années 2000 quand la jeune chorégraphe à cette époque quitte son île pour se nourrir du « dehors », entre études universitaires et formations artistiques. Forte de son parcours artistique et de son travail de recherche anthropologique sur la danse Maloya en 2008, elle transmet et donne à voir ce patrimoine réunionnais à travers des stages, des « workshops » et des représentations dans le monde entier. Cette fois-ci on la retrouve à Taïwan où elle est invitée à donner un « workshop » aux danseurs professionnels de Tjimur Dance Theater.


Mais dans ce travail d’ambassadrice du Maloya, dont elle ne prétend pas avoir le monopole, elle n’oublie jamais de rendre hommage à ses maîtres en la matière. Elle cite toujours en effet ceux qui l’ont initié à ce savoir chorégraphique et à cet art de vivre qu’est le Maloya : Marie Marthe Bazaline dit Mme Baba, la famille de Gramoun Lélé, le groupe Lindigo Olivier Araste, Jean Claude Viadèr, Danyel Waro… Comme une promesse faîte à Marie Marthe Bazaline de transmettre sa mémoire et de porter loin les rythmes corporels de La Réunion, Florence Boyer partage ainsi cette science chorégraphique de la danse Maloya. C’est également tout l’Être au monde réunionnais qu’elle partage à travers ses workshops nous précise-t-elle. Une rencontre et un échange chorégraphique international.

Mais pourquoi Taïwan ? Les deux compagnies se sont rencontrées pendant le festival d’Avignon en 2017. Le contact se fera très naturellement entre la chorégraphe réunionnaise et la directrice artistique Ljuzem Madiljin et le chorégraphe Baru Madiljin. Découvrant les vidéos des créations de Florence Boyer, ils l’inviteront aussitôt à donner un « workshop » chez eux, dans leur studio de danse de Sandimen.


Avide de continuer à se nourrir des autres cultures du monde, c’est avec beaucoup d’entrain que la chorégraphe réunionnaise Florence Boyer s’initie, foule et intègre les pas de danse traditionnels et contemporains transmis par les danseurs du Tjimur dance Theater. Sous les conseils et regards avisés de sa directive artistique Ljuzem Madiljin et de leur chorégraphe Baru Madiljin. C’est donc dans l’échange et le partage de leurs pratiques traditionnelles, de leurs réflexions et re-créations contemporaines respectives que se situe leur rencontre artistique.

Un enseignement pluri-linguistique

Et la barrière de la langue n’existe pas pour la chorégraphe réunionnaise. Si Florence Boyer leur enseigne en anglais cette danse Maloya, le nom des pas et des personnalités réunionnaises détentrices de ce Maloya sont verbalisés et même chantés en créole réunionnais. Florence Boyer a à cœur de partager la culture réunionnaise dans toutes ses dimensions. Les danseurs professionnels répètent alors les paroles en créole réunionnais des airs traditionnels que Florence Boyer a réécrit dans sa propre poésie réunionnaise. C’est alors qu’au traditionnel « a shemin granbwa sa lé long, … » ou encore « a si mi bwa mi bwa mon larjan… a si mi tonm mi tonm dann shemin » Florence Boyer nous confie reformuler un « a shemin Sandimen sa lé long… » ou encore « si mi lèv mi lèv pou mon pèp…a si mi tonm mi dobout dobwa ».


Paroles auxquelles répondent en chœur les danseurs Paiwanais

« A ti pa ti pa na rivé »…« ma lé rodé ma la rodé ma lé rodé…inn ti dans pou mwin… ma lé rodé ma lé rodé ma lé rodé bann dalon alon ! » Un texte qu elle a voulu réécrire comme pour témoigner de ses propres aspirations, des phrases que la chorégraphe traduit en anglais pour les danseurs professionnels et qu’elle nous traduit ici en français par : « Ah que le chemin vers Sandimen- le village Paiwan où se trouve la compagnie de danse Tjimur- est long…petit pas par petit pas nous y arriverons… ». « Si je me lève…si je danse…je me lève…je danse pour mon peuple…et si je tombe…je me relèverai encore, … la tête haute, ancrée, enracinée tel un arbre…sur ma terre, dans ma culture réunionnaise ».

Le Tjimur Dance Theater

Le Tjimur dance theater, compagnie taïwanaise programmée à nouveau au festival « in » d’Avignon en 2018. Fondé en 2006, le Tjimur Dance Theatre est la première compagnie de danse contemporaine dédiée à la culture aborigène Paiwan de Taiwan. Les efforts de son directeur artistique, Ljuzem Madiljin, et de son chorégraphe, Baru Madiljin, ont valu à Tjimur un succès critique à Taiwan et à l’étranger avec le charme de son interprétation contemporaine des anciennes danses et mélodies de Paiwan. En explorant le patrimoine culturel de Paiwan, Tjimur a créé un style unique et novateur de danse contemporaine qui représente « l’esthétique corporelle moderne du peuple contemporain de Paiwan »


Une prochaine collaboration artistique internationale : La Réunion et Taïwan

Outre les fondamentaux du Maloya, la chorégraphe réunionnaise transmet également un extrait de sa dernière pièce chorégraphique Kaniki – évoquant l’histoire des réunionnais déplacés notamment dans la Creuse -. De ces premiers jours de rencontres, les danseurs taïwanais témoignent de la grande richesse et complexité de la danse Maloya qu’ils sont ravis de traverser.

Florence Boyer nous confie de son côté ce qui la frappe d’emblée dans cette rencontre ; ce sont les résonances qu’elle découvre entre les pas de base de la danse païwan – une danse guerrière à l’origine – et ceux du maloya. Résonances aussi sur le plan de la démarche artistique : Tjimur Dance Theater et Artmayage nous dit Florence Boyer, puisent toutes les deux dans des traditions qui, longtemps, ont été niées pour déployer des voies inédites dans la danse contemporaine. Tout comme le Maloya et le créole à La Réunion, l’ensemble des cultures aborigènes étaient interdites à Taïwan. « Francisation » à la Réunion, « Sinisation » (imposition de la culture chinoise majoritaire) à Taïwan, dans les deux cas, un même processus d’assimilation fut mis en œuvre sur plusieurs décennies nous précise Florence Boyer. Aujourd’hui, nous dit-elle encore, que ce soit dans la République de Taïwan ou dans la République française, on semble avoir enfin compris, même si des efforts restent à faire, que la singularité peut être source de richesse et non de désunion.


On ne peut donc qu’appeler de nos vœux la concrétisation de ce projet de création commun aux compagnies de Florence Boyer – Artmayage et Tjimur Dance Theatre, mêlant maloya et danse païwan, dans une perspective contemporaine. Florence Boyer nous confie que son travail notamment la dernière création Kaniki a par ailleurs beaucoup plus à Taïwan. Nous ne serions donc pas étonnés de la voir programmée dans les théâtres de Taïwan l’année prochaine.

Travail en cours

Les workshops se poursuivent alors jusque début mai dans le village de Sandimen à Taïwan. De cette rencontre devrait naître un prochain projet de co-création chorégraphique. Voilà de quoi nourrir les échanges artistiques entre ces » deux îles des Suds ». Une collaboration qui ne devrait pas laisser indifférent les amateurs de projets originaux. 

Photos : ©Facebook / Compagnie Artmayage / + d’infos : www.facebook.com/artmayage.cieflorenceboyer


Voir le profil et les articles de Florence Boyer / www.reunionnaisdumonde.com/t/4/Culture-Sorties / www.reunionnaisdumonde.com/r/6/Asie


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