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Frédéric Grondin, Docteur en Mécanique, maître de conférences à Centrale Nantes

Publié le 6 novembre 2007

Originaire de Parc-à-Moutons dans les hauts de Saint-Joseph, Frédéric se verra remettre un prix Talent de l’Outre-mer le 12 novembre au Palais de l’Iena. Il nous raconte ici son parcours, qui l’a conduit des bancs de l’UR jusqu’au poste de Maître de Conférences en Mécanique et Génie Civil à l’Ecole Centrale de Nantes. Il a 30 ans.

Frédéric Grondin
"Pendant mes études, je vivais simplement avec une bourse et des petits boulots comme facteur à Paris".

Racontez-nous votre parcours.

"Je suis originaire du village de Parc-à-Moutons dans les hauts de Saint-Joseph, d’un milieu très modeste. Après avoir obtenu un bac S au lycée Pierre Poivre à Saint-Joseph et un Deug MIAS à l’université de La Réunion, je suis venu à Paris en 1998 pour poursuivre une licence puis une maîtrise de Mécanique à l’université Pierre et Marie Curie".

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

"J’ai quitté La Réunion dans le seul objectif de poursuivre des études en Mécanique. On choisit rarement son destin. Dans mon cas, sans la complexité de l’administration de l’université de La Réunion, je ne serais peut-être là où je suis, en mieux ou moins bien, je ne sais pas. Au lieu de Paris, j’avais d’abord choisi l’université de Marseille qui avait accepté ma candidature en Licence et me demandait simplement de demander à l’université de La Réunion de leur envoyer mon dossier d’étudiant. Mais l’université de La Réunion voulait que je demande à l’université de Marseille si elle acceptait de recevoir mon dossier ! Ce qui a réellement compliqué les choses, et même stoppé mon inscription à Marseille. Heureusement, un de mes cousins, étudiant à Paris 6, m’a permis de m’y inscrire".

Et ensuite ?

"J’ai ensuite continué en DEA pour me spécialiser en Mécanique du Solide. Durant cette année de DEA, j’ai effectué un stage au Centre Scientifique et Technique du Bâtiment, suite auquel on me proposa de réaliser une thèse de doctorat qui me permit d’obtenir le titre de Docteur en Mécanique de l’université Pierre et Marie Curie en 2005. J’ai obtenu, dans la foulée, un emploi d’Attaché Temporaire à l’Enseignement et à la Recherche à l’Institut de Recherche en Génie Civil et Mécanique à l’IUT de Saint-Nazaire. L’année suivante, j’ai décroché un poste de Maître de Conférences en Mécanique et Génie Civil à l’Ecole Centrale de Nantes où je suis actuellement".

Avec le recul, comment expliquez vous votre parcours ?

"La thèse de doctorat et mon poste de Maître de Conférences sont une suite de bonnes rencontres et d’un peu de chance. J’étais effectivement le seul de ma promotion de DEA de Paris 6 à vouloir effectuer un stage dans le domaine du génie civil. Ce qui m’a permis d’intégrer le CSTB et de rencontrer des personnes formidables qui m’ont fais confiance pour réaliser une thèse. Grâce à eux, mon travail intéressa l’IUT de Saint-Nazaire et les chercheurs du GeM qui m’embauchèrent en tant qu’ATER pendant une année. Avec un pied dans le GeM et ma rencontre avec d’autres personnes formidables, j’ai pu obtenir un poste de Maître de Conférences à l’Ecole Centrale de Nantes".

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"Cette expérience m’a apportée beaucoup de bonnes choses, sur le plan professionnel et sur le plan personnel. Une rencontre avec des cultures différentes, une ouverture d’esprit et la chance d’avoir un métier passionnant".

Quels sont vos projets ?

"Mon premier projet est d’abord de faire connaître mon expérience aux jeunes réunionnais qui doutent de leur capacité à réussir en métropole. Certes, j’ai eu quelques coups de pouce. C’est pourquoi je réfléchis en ce moment à un moyen d’aider les jeunes étudiants réunionnais en métropole dans leur choix de cursus universitaire. Notamment ceux issus de milieux modestes. Moi-même je vivais simplement avec une bourse et parfois de quelques petits boulots à Paris".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Je ne serais pas capable de répondre à cette question car on n’a jamais mis en avant le fait que je suis réunionnais. J’ai eu la chance de rencontrer des personnes pour qui ça n’avait pas d’importance".

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"Principalement ma famille. Ma mère, tout particulièrement. Ensuite, la mixité de la population, qu’on ne retrouve pas en métropole. Et enfin, « bat karé dan lé o, manz in bon kari, kas la blag èk lo bann dalon »".

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"Inquiet. Beaucoup d’argent dépensé par les collectivités et les grandes entreprises pour donner une bonne image de La Réunion à l’extérieur, mais très peu dans la création d’emplois. L’île est petite et très jeune, mais les entreprises réunionnaises se portent bien, pour la plupart. On n’est pas obligé d’attendre que le gouvernement diminue un jour le nombre d’heures à 30 par semaine pour augmenter les emplois. Les entreprises réunionnaises ont les moyens de le faire. Les inégalités entre les pauvres et les riches augmentent et créent de nouvelles tensions. Il serait temps d’agir rapidement".

Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

"En ce qui concerne la situation géographique de Nantes, il n’y a rien à redire. On est proche des côtes bretonnes, des plages de Vendée, et à deux heures de train de Paris. Mais il n’est pas facile de se faire des amis sauf quand vous rencontrez des immigrés comme vous pour parler du pays. C’est souvent à vous de faire le premier pas".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"Larg pa lo kor ! Le système de formation réunionnais est assez limité pour le moment. Il ne faut pas avoir peur de venir en métropole pour essayer de rentrer à La Réunion avec des bagages. Il y a des réunionnais partout en métropole et de nombreuses associations. Néna touzour lokaziyon koz kréol èk domoun. Quant à www.reunionnaisdumonde.com, c’est un très beau site, complet et efficace. Continuez !"

Voir le profil de Fédéric Grondin

Lire aussi : Frédéric Grondin, prix Talent de l’Outre-mer 2007]

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