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Gilbert Payet, un préfet « marmaille de la République »

Publié le 7 novembre 2021

De l’enfance à St-Louis à l’engagement aux côtés d’Eric Zemmour… Haut fonctionnaire réunionnais diplômé de l’ENA, Gilbert Payet raconte son parcours dans « Marmaille de la République : Les confessions d’un préfet » paru aux éditions VA Press, où il incarne une forme de mérite à la française passant par la réussite scolaire. S’il n’approuve pas toutes les déclarations d’Eric Zemmour, Gilbert Payet dit partager l’essentiel de son diagnostic et a justifié son engagement sur France Bleu : « Plus je vois l’évolution du débat politique actuel, plus je me dis que finalement ses déclarations parfois excessives valent mieux que la bien-pensance et la langue de bois qui prévaut ailleurs ».

Interview exclusive : Réunionnais du monde - Photos transmises par Gilbert Payet


Pouvez-vous vous présenter ?

Gilbert Payet, 68 ans. Je suis né à La Rivière Saint-Louis, avant que mes parents ne s’installent à Saint-Louis. Je suis issu d’un milieu modeste même si dans cette Réunion des années 50, mes parents, employés tous les deux, étaient déjà des privilégiés.

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

Dès l’âge de 9 ans j’ai voulu être préfet, après avoir rencontré dans des circonstances dramatiques (décès de ma sœur Jeanine dans le cyclone Jenny) le préfet Perreau-Pradier. Mon prof de philo au lycée, qui était conseiller d’orientation, avait échoué au concours de l’ENA et on s’est juré que j’allais le venger. C’est ainsi que je suis allé en métropole faire « l’école des préfets » selon l’expression de mes camarades de lycée. Je suis aussi parti avec le soutien de mes parents. Je ne serais pas arrivé là s’ils ne m’avaient pas soutenu dans mon rêve un peu fou.

Où vivez-vous et quelles sont vos activités aujourd’hui ?

Je vis dans le 13ème arrondissement de Paris et me partage entre Paris, La Réunion où j’ai un petit pied-à-terre, le sud de la France où vit ma sœur et plusieurs amis, mais aussi l’Est, l’Ouest, le Nord… Je ne reste jamais longtemps sur place. Je ne conçois pas les choses en terme de mobilité mais de projet. Aujourd’hui, nous avons la chance d’avoir la planète comme terrain de jeu. Et on y vit la partie qu’on a choisie.

Enfance réunionnaise

Qu’est-ce qui vous manque de votre île lorsque vous n’y êtes pas ?

Beaucoup de choses. Ses paysages majestueux. Un art de vivre même, si sa « durabilité » est remise en cause par l’évolution de notre société. Le créole, avec cette inventivité extraordinaire. La musique, entre séga et maloya…

Quels objets de la Réunion avez-vous apportés dans vos valises ?

Une anecdote : un jour en préfecture, j’ai trouvé mon uniforme de préfet bien positionné sur un « valet de chambre » au pied duquel se trouvait... une paire de « savates 2 doigts » (tongs). Je n’ai jamais pu m’en passer !

Prise de fonction en tant que préfet des Pyrénées-Atlantiques en 2017 (photo : Sud Ouest)

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

J’ai appris depuis longtemps à ne pas me prononcer à la légère sur de telles questions. Je me bornerai à dire que le terme de modèle réunionnais me paraît galvaudé et que je plaide pour une plus grande adaptation des textes au contexte local. J’ai toujours considéré que le droit est un instrument au service d’une politique et qu’il doit s’adapter à la société qu’il prétend régir.

Pouvez-vous nous parler de votre livre « Marmaille de la République : Les confessions d’un préfet » ?

Le titre d’abord, pour rappeler le parcours d’un « marmaille la cour » devenu préfet de la République. Le contenu : un rappel de mon enfance réunionnaise, de mon adolescence partagée entre le lycée Roland-Garros au Tampon et des études à Aix-en-Provence. Puis, après la réussite au concours de l’ENA, mon parcours professionnel. Mais une bonne partie de l’ouvrage est consacrée à mes réflexions sur de grandes thématiques : absurdités du droit des étrangers, problématique d’une certaine interprétation de l’islam dans nos écoles et nos quartiers, excès du principe de précaution en matière environnementale… L’ouvrage est déjà disponible à la commande sur le site de l’éditeur VA Editions, prévu pour une sortie en librairie en janvier 2022.


Au-delà de vos fonctions de "conseiller technique et juridique", quel est le sens de votre engagement aux côtés d’Eric Zemmour ?

C’est Sarah Knafo, stagiaire ENA à Pau alors que j’y étais préfet, qui m’a sollicité. J’ai accepté bien volontiers après un temps de réflexion, conscient des interrogations qu’un tel engagement susciterait. Je ne partage peut-être pas toutes les prises de position d’Eric Zemmour, mais mon livre, écrit en 2020, donc bien avant cet engagement, explique aussi en quoi nos analyses se rapprochent sur bien des sujets. Par ailleurs, ses prises de position à caractère national concernent aussi directement les outremers.

La vision historique d’Eric Zemmour s’accorde-t-elle avec le vécu des Ultramarins ?

Là encore une anecdote racontée dans mon livre. Lors de ma scolarité à l’ENA, j’a été amené à travailler sur « La justification de notre présence outre-mer ». Pour un Réunionnais, c’est un peu lui demander la justification de sa présence sur Terre. Mais cela rappelle une des spécificités des territoires ultramarins. Pour une bonne partie de l’opinion publique, nous sommes réellement une pièce rapportée... comme d’autres communautés. Et aux Réunionnais de s’inspirer de l’exemple des Antillais car ils ont davantage su en faire une force je pense.


Les confessions d’un préfet (246 pages) – Résumé de l’éditeur :

De « Marmaille la cour », ou enfant élevé en plein air à La Réunion, à Préfet de la République, Gilbert Payet nous dépeint un parcours d’une richesse et d’une diversité exceptionnelles. Son regard acéré et sa capacité de recul lui permettent d’analyser sans détour les maux de notre État et de notre administration : Hypertrophie des administrations centrales, culte du présentéisme, dérives de notre monarchie républicaine.

S’appuyant sur des exemples concrets, il livre une analyse impitoyable des incohérences de notre droit et des entraves mises à l’action de ceux qui sont chargés de sa mise en œuvre : étrangers condamnés et interdits du territoire mais circulant librement munis d’une convocation en préfecture ou sous protection de l’autorité judiciaire ; quartiers ou écoles sous emprise salafiste ; mais aussi entreprises françaises confrontées à une concurrence déloyale sous le couvert d’une règlementation européenne aussi injuste qu’inadaptée ou croulant sous les charges d’un modèle social aujourd’hui dépassé.

Cette analyse s’accompagne de propositions personnelles en faveur de la reconquête de notre souveraineté et du retour à la reconnaissance du pouvoir discrétionnaire de l’administration lorsque la sécurité de nos concitoyens est en jeu.


Commander sur le site de l’éditeur : www.va-editions.fr/marmaille-de-la-republique-c2x36228143


Gilbert Payet - bio express :

Originaire de Saint-Louis, diplômé en droit et en économie, le Réunionnais Gilbert Payet a ensuite intégré l’ENA d’où il est sorti diplômé dans la promotion Droits de l’Homme (1979). Il a ensuite été nommé préfet de Haute-Corse, de la Nièvre, des Vosges, de Saône-et-Loire, et a terminé en 2019 comme préfet des Pyrénées-Atlantiques, où il a été un acteur majeur de la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées. Conseiller technique de Jean-Pierre Raffarin à Matignon en 2004, directeur des stages de l’ENA de 2009 à 2013, ce haut fonctionnaire, ancien membre de l’Association des étudiants réunionnais en France, a été distingué Officier dans l’Ordre national du Mérite et Chevalier de la Légion d’honneur. Il a été sollicité pour apporter un appui à la fois juridique, technique à l’équipe d’Eric Zemmour, notamment par rapport à la mécanique des comptes de campagne, en tant qu’ancien chef du bureau des élections du ministère de l’Intérieur.

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