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Jean-Max Cotte, 50 ans, paysagiste à Mont-Tremblant au Québec

Publié le 24 mai 2006

« Né à Bras-Panon, j’ai quitté l’île pour faire carrière dans l’armée. J’ai vécu dans de nombreux pays, notamment en Afrique, avant de prendre ma retraite et de m’installer au Canada. J’ai repris des études de ressources humaines à l’Université HEC de Montréal et en horticulture ! Aujourd’hui, à 50 ans, je suis paysagiste et responsable du recrutement chez Northland, à Mont-Tremblant au Québec. Je me sens très bien dans cette entreprise. J’ai des responsabilités et je contribue à l’amélioration de l’environnement des gens ».


Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’Île ?

"D’un milieu modeste, j’ai quitté l’île en 1974, à l’âge de 17 ans, pour m’engager dans l’Armée chez les Marsouins (Troupes de Marine). C’était une vocation. J’avais même essayé en 1973, d’aller dans la toute nouvelle École Préparatoire Militaire du Tampon ; j’avais un an de trop…"

Quel a été votre parcours ?

"J’ai fait mes classes à Fréjus, sur la Côte d’Azur. Puis, j’ai changé d’affectation à peu près à tous les deux ans, allant de France en Afrique. C’est ainsi que je fus en poste en France : Rennes, St-Malo, Vannes et Paris ; en Afrique : Sénégal, Côte-d’Ivoire, Tchad, République Centrafricaine et Djibouti. J’ai fini ma carrière en 1989 en Martinique. J’ai pris ma retraite, après 15 ans d’Armée, en 1990. Puis, le globe-trotter s’en est allé au Québec, avec sa compagne de l’époque, une Parisienne. J’y vis depuis ce temps là".

Comment s’est passée votre arrivée au Québec ?

"Arrivés en pleine récession économique, cela n’a pas été de la tarte pour trouver un travail. Elle, qui avait fait des études à la Sorbonne, a trouvé un travail… dans un hôpital comme secrétaire. Moi… j’ai appris très vite ce que c’était une mop (serpillière). J’ai trouvé un petit boulot de nuit, dans ce qu’on appelle ici un Dépanneur : une sorte de boutik chinois, qui vend aussi de l’essence. J’ai passé la mop toute la nuit, tout en vendant de l’essence. J’ai fait ce travail une seule nuit…"

Qu’avez-vous fait ?

"Une centaine de CV plus tard, j’ai décroché un emploi comme secrétaire dans une station radio. Elle ferma ses portes deux ans plus tard ! Qu’à cela ne tienne, je suis allé à l’Université HEC de Montréal (excellente École de Commerce, soit dit en passant). Puis, un diplôme en Horticulture en poche, je suis devenu Paysagiste et responsable du recrutement, depuis 10 ans".

Quels sont vos projets ?

"Je suis très bien dans cette compagnie. Les patrons sont très humains et à l’écoute de leurs employés. J’ai des responsabilités. Je contribue à l’amélioration de l’environnement des gens. De plus, je travaille dans une belle région, les Laurentides (au Nord de Montréal). La majorité de nos clients vivent autour d’un des plus beaux sites de villégiature quatre saisons en Amérique du Nord, la Station du Mont-Tremblant. Mais, je suis ouvert à d’autres perspectives, ici, comme ailleurs".

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"La mobilité permet de voir le monde autrement. Si les voyages forment la jeunesse, ils forgent aussi beaucoup la personnalité. On devient plus tolérant, combatif et j’irai jusqu’à dire que l’on améliore notre compassion, car quand on se compare, on se console parfois…"

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"Je vais peut être vous étonner : pas grand-chose ! Mais en y pensant je m’aperçois que ne serait-ce que parler créole, cela me manque ! Ce qui pourrait me manquer aussi : une grappe de letchis, une mangue, quelques goyaviers, cueillis et mûris sur pied… c’est le bonheur ! Les fruits exotiques qui arrivent sur nos marchés en Amérique du Nord, cueillis souvent encore verts, ne goûtent pas grand-chose, quand on a connu les fruits réunionnais…"

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Le talent des Réunionnais dans les sports de toutes sortes est reconnu, ce qui ne nuit pas à l’intégration. Ici, les Québécois apprécient un Punch fait maison, avec un peu de vanille de la Réunion, bien sûr… De plus en plus de Réunionnais viennent travailler au Québec. C’est un grand espoir. C’est encourageant pour l’avenir de l’île et son enrichissement".

Jean-Max Cotte
Dossard 108, avec un dalon, au Sénégal, lors d’un semi-marathon.

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

"Maintenant oui, grâce à votre site ! La perspective de renouer avec des créoles scelle un retour aux sources des plus excitants. C’est une occasion de m’impliquer dans la communauté. C’est également très rafraîchissant de côtoyer toute cette jeunesse talentueuse qui mord dans la vie".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"La misère de l’époque où nous vivons, c’est que nombre de jeunes, sur l’île comme ailleurs, ne trouvent pas leur talent. Je ne parle pas nécessairement d’avoir une vocation ; mais d’avoir une idée de ce que l’on veut faire dans la vie. Pour cela, je dirais aux jeunes d’oser. Oser quitter l’île ; oser quitter ce petit paradis pour s’engager dans des études, un métier (zot les capable, oté !). Qui sait, ils trouveront au passage leur passion. Oser se prendre en charge. Oser apprendre à se connaître. En définitive, je dirai aux jeunes : faîtes ce que vous voulez, mais osez… pour devenir vous-mêmes !"
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Complément d’interview spécial « Salon de la Maison 2007 » sur le thème du développement durable

Jean-Max Cotte

Dans votre métier, avez-vous l’occasion de manier la notion de développement durable ?

"Dans l’entreprise où je travaille depuis maintenant 10 ans, cela fait quelques années que nous avons amorcé un virage vert. Bien avant la Loi sur l’épandage de pesticides, nous avons commencé à épandre dans les jardins de nos clients des engrais naturels. Les sols sont trop acides au Québec, pour ce faire nous épandons un produit naturel, la Chaux Dolomitique, pour équilibrer le PH du sol. Je conseille personnellement à mes clients qui ont un potager, de mettre de la cendre de bois, pour rendre leur sol plus alcalin… Les tomates sont par exemple plus belles, grâce au calcium et au potassium contenu que dans la cendre de bois".

Avez-vous d’autres exemples de méthodes écologiques employées chez vous ?

"Nous sommes proactifs en matière phytosanitaire. Au printemps, nous pulvérisons de l’Huile de dormance sur les arbres susceptibles de maladies, plutôt que d’employer des produits systémiques nocifs pour l’environnement. Nous disposons aussi de boyaux d’arrosage goutte à goutte, à la fois efficaces et économes en eau. Les résidus de branches, restes de plantes, etc., sont mis sur un tas, au fond de la cour. À chaque automne, une machine transforme ces résidus en terre, que l’on réutilise comme base pour la pelouse".

Le développement durable est-il une notion centrale au Canada ?

"Au Canada, le débat fait rage autour du Protocole de Kyoto. Le gouvernement fédéral dit que cela va coûter cher de mettre en oeuvre cet accord. Les écologistes pensent quant à eux, que cela va coûter encore plus cher si on ne fait rien ! Hubert Reeves, astrophysicien bien connu, abonde dans le même sens. Plus globalement, les exemples de mesures environnementales sont nombreux".

Pouvez-vous en donner quelques-uns ?

"Dans la Belle Province (le Québec), des mesures concrètes ont été mises en place. Par exemple, la société d’état Hydro-Québec a un programme d’isolation des vieilles maisons, pour faire baisser la consommation d’énergie. On isole aussi les maisons avec le foin qui sert pour le pâturage. Dans la métropole de Montréal, il y a un système de ramassage des feuilles mortes à l’automne, qui donnent du compost redistribué aux citoyens le printemps suivant. Cela fait quelques années également que le recyclage du plastique, verre, papier, est mis de l’avant. L’éolienne est une nouvelle venue sur la Péninsule Gaspésienne. La géothermie, qui consiste à aller chercher la chaleur dans le sol pour chauffer les maisons en hiver et les climatiser en été, est aussi en vogue".

Qu’en est-il du problème de l’eau ?

"L’eau est abondante au Québec, grâce à ses nombreux lacs et son fleuve, le St-Laurent. Mais les erreurs du passé ont pollué ces eaux : pesticides qui se retrouvent dans le fleuve, azote (de l’engrais azoté ou du lisier de porc) sont responsables de l’accroissement d’algues qui bouchent l’entrée des lacs. Cet azote s’infiltre également dans les nappes phréatiques. Gouvernements et écologistes réfléchissent sur cette richesse naturelle, à la fois épuisable et de plus en plus polluée. Par ailleurs, il y a un débat concernant l’eau du robinet : on la désinfecte avec du chlore et on y ajoute du fluor, dont les uns disent du bien, tandis que d’autres pensent que c’est une grande erreur scientifique…"

Quel développement durable imaginez-vous pour la Réunion ?

"C’est bien parti, si je me fie aux informations véhiculées dans les différents médias, par exemple ce qui a trait à l’énergie solaire. Comme souvent, c’est dans les gestes simples que tout citoyen peut faire sa part pour rectifier certaines façons de vivre. Le retour à la cuisine au feu de bois, par exemple, est intéressant d’un point de vue culturel, à condition que l’on ramasse du bois mort… Mettons-nous encore de l’engrais dans notre potager ? A-t-on toujours besoin de prendre son véhicule pour aller faire une course ?
Enfin, nous nous apercevons que les enfants sont plus écologistes que leurs parents. C’est par eux que nous sommes entrain de changer notre façon de vivre…"

Jean-Max cite en référence un site québécois : www.novae.ca . « Novae se donne pour mission d’aider les professionnels à adopter de nouvelles pratiques d’affaires, à la fois performantes et respectueuses des individus et de l’environnement. »

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