Publicité

Jérôme Amano, 24 ans, infirmier militaire à Marseille

Publié le 12 janvier 2007

Originaire de St Joseph, Jérôme a quitté l’île après le Bac. Ayant arrêté ses études pour devenir manager chez Mac Donald’s, c’est finalement à l’armée qu’il a trouvé sa voie et la possibilité de fonder une famille. Il suit depuis 2004 une formation d’infirmier militaire.

Jérôme Amano
Jérôme a fondé une famille à Marseille.

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

"Je voulais m’offrir le plus d’opportunités possibles et surtout me débrouiller un peu seul, même si c’est vrai, j’ai eu une aide financière de la famille quelques années. Je me suis d’abord établi en Ile de France dans le but de poursuivre mes études après le Bac, études que j’ai rapidement laissées de coté au profit de mon emploi au Mac Donald’s".

Parlez-nous de votre expérience chez Mac Donald’s.

"Du job d’étudiant à mi-temps, je suis devenu manager dans cette entreprise où j’ai passé trois ans particulièrement enrichissants sur le plan relationnel, professionnel, et dans la connaissance et la maîtrise de moi. Mais ce qui m’a le plus plut, c’est le nombre de rencontres différentes que j’ai pu y faire. Elles m’ont ouvert les yeux sur les cultures, habitudes et façons de penser de divers milieux sociaux et pays aux quatre coins du globe. Bref, bien que ce travail soit tout à fait asservissant et dévalorisant pour la plupart des employés (à mes yeux), je ne regrette pas du tout d’être passé par là".

Votre parcours n’a pas été si simple…

"L’insertion en Ile de France s’est faite assez simplement, même si j’ai eu du mal à me positionner. Je me suis souvent retrouvé à "jouer des rôles" dans les différents milieux où j’évoluais, au point de ne plus savoir qui j’étais réellement. Le plus difficile a été l’insertion dans l’armée, confronté qu’on y est pafois au racisme, aux préjugés idiots et à l’ignorance".

Jérôme Amano

Aujourd’hui quels sont vos projets ?

"Mon projet est de profiter de ma profession pour voyager un maximum et ensuite, d’acquérir plus de connaissances voire de diplômes pour m’installer dans une quinzaine d’années à Madagascar ou dans un autre pays du Sud. Vivre comme un "ti colon" et peut-être faire quelque que chose de bien dans ma vie pour les autres, comme monter un projet de développement durable au niveau local".

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"Essentiellement la simplicité de la vie et des gens, et aussi la famille".

Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

"Elle m’oblige à m’ouvrir sur d’autres horizons et voir plus grand. Je ne crains plus de me trouver sans repère, car mon repère c’est moi, ce que l’on m’a appris, et aussi tout ce que je peux voir. Je suis en outre tombé amoureux de la créolité, car j’ai pu rencontrer des créoles d’un peu partout et m’enrichir de leurs histoires..."

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"Je trouve regrettable l’état de dépendance dans lequel est entretenue la "masse populaire" et regrette la timidité et le manque de soutien pour les initiatives "péi". Bien que ça bouge de plus en plus. Je suis d’avis que notre statut de DOM est une véritable chance et une réelle opportunité pour notre développement. Mais on ne doit surtout pas se restreindre à cette assimilation dans laquelle on a tenté de nous faire entrer pour effacer notre identité aux vues de je ne sais quels profits".

Jérôme Amano

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Il y a eu plus d’inconvénients, à cause de mon physique et de mes orientations idéologiques qui, mine de rien, influent sur mes actes".

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

"J’ai la chance de connaître quelques Réunionnais dans ma profession mais aussi en dehors, sans m’inscrire dans aucune communauté. Cela fait plaisir de pouvoir parler créole, mais j’aime aussi évoluer dans les autres communautés !"

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

"Cela m’a étonné que les gens la connaissent si peu, nous prenant pour des Antillais. Malheureusement encore trop de gens nous imaginent "sous développés" (je n’aime pas cette expression mais elle résume bien ces idées). Néanmoins la plupart des militaires y sont déjà allés et ont aimé ses charmes".

Vous-même, quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

"J’aime beaucoup Marseille, bien que ce soit une ville très désordonnée et très sale par endroits. Le côté frontière afro européenne est particulièrement séduisant. Les Marseillais sont assez accessibles et simples".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"Soyez vous-mêmes et n’ayez pas peur de tenter tout ce qui vous attire. Voyez grand pour vous-même et pour notre île. La discrétion est une grande qualité, mais on a tous notre place et il faut l’arracher".

Publicité