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Eugène Gonthier : du graphisme à l’infographie

Publié le 14 janvier 2022

Créateur du graphisme et du concept « Rhum Charrette », cet originaire de la Plaine des Cafres aujourd’hui à la retraite raconte son parcours d’autodidacte, qui a vu l’apparition de l’informatique dans la création publicitaire.

Lire aussi : Il a créé le visuel et le concept du Rhum Charrette


Pouvez-vous vous présenter ?

Eugène Gonthier, 71 ans. Né en 1950 à la Plaine des Cafres, je suis le grand frère des Pat’Jaunes. Graphiste puis infographiste, ingénieur en informatique à la retraite, j’habite depuis plus de 40 ans près de Toulouse, actuellement à Grenade sur Garonne, petite ville située non loin d’Airbus. Marié à Saint-Denis à Nicole (née Chautard), je suis père d’un enfant et grand-père de deux petits enfants.

Racontez-nous votre parcours.

J’ai passé toute mon adolescence chez les Frères des écoles chrétiennes : Saint-Michel à Saint-Denis, puis Maison Blanche au Guillaume Saint-Paul... pour devenir "Frère". Ce n’était pas une vocation, c’était un choix dicté par mon père. Dès l’âge de 6 ans, il s’inquiétait de notre avenir et nous posait cette question : "que veux-tu faire quand tu seras grand : Prêtre ou Frère ?". Le choix était assez limité ! Moi, je voulais être peintre (ou dessinateur). Voeu exaucé ! Il m’a fait repeindre toutes les portes de la Sica-Lait (mon père a été un des fondateurs avec Charles Isautier de la Sica-Lait). J’en ai profité pour réaliser mon premier tag publicitaire sur la citerne qui dominait l’usine, avec des pots de peinture fournis par Paul Martinel, futur directeur...


Mai 68, je l’ai "vécu" au lycée Roland Garros, au Tampon. Nous faisions grève "en soutien à nos camarades de la Métropole". C’était bon enfant et cela nous permettait surtout de ne pas aller en cours. Mémona (Hintermann) Afféjee était alors jeune lycéenne également dans cet établissement à cette époque.

En août 1970, trois mois avant ma vingtième année, je fais un devancement d’appel (la majorité était encore fixée à 21 ans) afin "d’aller en France", pays de cocagne, là où tout est possible, là où l’on peut tout apprendre… Je profite de ce séjour en Métropole pour m’inscrire par correspondance à des cours de dessin auprès d’une école en Belgique : « Institut Européen Tecnic » et je reçois des cours de … mécanique générale ! Je croyais m’être trompé dans mon choix et me voyais déjà finir mécanicien dans un garage ou chef de chantier. Mais comme je m’étais engagé (avec le soutien de mon frère Jean-Paul), j’ai continué. Passionné de mathématiques et de physique, cette formation m’a beaucoup aidé par la suite à comprendre ce que me demanderaient plus tard les ingénieurs du CNES et des essais en vol d’Airbus.

En 1972 : "mal du pays". Je profite de mon billet retour de l’armée pour rentrer à la Réunion. Une annonce attire mon attention : "Pompier à Gillot". Pourquoi pas ? J’ai 22 ans, je fonce et je suis embauché. Je fais partie de la première section des plongeurs de Gillot : baptême à -40 mètres, plongée de nuit à à Sainte-Rose… C’est juste le temps de financer mes cours par correspondance, mon rêve premier est toujours là : devenir dessinateur. Henri Cazal m’offre cette opportunité en m’embauchant au Journal de l’Ile en tant que maquettiste, avec pour parrain Gérard Piednoir. De son côté, Le "Quotidien" démarre. Havas cherche un nouveau dessinateur.


Je me présente et rencontre Yann Gaffori qui me fait passer un test… C’est la création de l’étiquette et du concept « Rhum Charrette »*. Je suis embauché chez Havas Réunion Publicité de 1976 à 1979 où je me lance à mon compte.

En 1979, c’est le lancement des premiers JIOI. Un concours est lancé pour la création d’un drapeau. J’y participe en tant que free-lance et la maquette de mon drapeau est retenue. J’ai l’honneur d’assister à la première présentation officielle de mon drapeau !


En 1980, je quitte l’île pour rejoindre une agence de publicité à Toulouse : PBC J’annonce ! A l’époque, l’ordinateur commençait à faire son apparition et prétendait déjà faire le même boulot qu’un graphiste. Moi, j’ai voulu aller plus loin, comprendre comment un ordinateur pouvait faire de l’aérographe comme moi... ou mieux que moi. J’étudie alors l’informatique et me passionne pour Fortran, Turbo Pascal, Visual Basic puis Windev. J’obtiendrai mon titre d’ingénieur en informatique en 2001.

En 1985, je découvre l’univers d’Airbus, l’univers de l’Aéropastiale, le CNES... Embauché par Aeroconseil International, je suis détaché en tant que consultant communication auprès de Mediatec, qui m’a également permis de côtoyer ceux qui ont participé aux premiers lancements d’Ariane 5. Mon travail : vulgariser les résultats scientifiques auprès du grand public à travers des dessins et illustrations.


Quels liens gardez-vous avec la Réunion ?

Je rentre régulièrement sur l’île. Les Réunionnais que je rencontre en Métropole souvent se plaignent : "là-bas lé meilleur, là-bas n’avait ci, n’avait ça...". J’ai envie de leur dire : « qu’est-ce que tu fais là ?" Pour moi, créole de 70 ans et plus, je constate une chose vue de France : la route en corniche est en construction depuis 1963 ! Je l’ai faite, gamin, en petit train jusqu’à la Possession ! Mais bon... je suis à côté de la plaque !

Qu’est-ce qui me manque de votre île ?

La sérénitude... la joie de parcourir les espaces, la joie de pouvoir retrouver ma jeunesse, celle que j’ai éprouvé en "taillant" le "sentier des scouts" ! J’ai ramené un morceau de lave récupéré en haut du volcan par ma fille à l’âge de 9 ans. C’était encore possible dans les années 80... Il fait l’admiration de mes amis "zoreilles" ; moi , il me rappelle toujours "ma" Plaine des Cafres.


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