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JR Ismaël : Le Paladin du Piton de la Fournaise (extraits)

Publié le 30 juin 2022

Il raconte dans ce roman l’ascension d’un marmaille de la Réunion devenu magnat de l’immobilier à Paris. Ce marmaille, c’est lui, Jean-Raoul Ismaël, aîné d’une fratrie de dix enfants d’une modeste famille dionysienne. Extraits du roman intitulé "Le Paladin du Piton de La Fournaise" publié aux éditions LBS - Albin Michel en mai 2022 ? avec l’aimable autorisation de l’auteur.

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Jean-Raoul Ismaël : « J’ai le plaisir de vous informer de la parution de mon 1er roman « le Paladin du Piton de la Fournaise » en librairie, à la Fnac, Amazon depuis le 17 mai 2022 qui fut dédicacé à la librairie Gallimard et vous trouverez ci-joint l’affiche et classé « coup de cœur de l’été » par France Bleu Azur. Ce livre est destiné à ceux qui viennent notamment des milieux populaires et qui ont soif de se réaliser. Il montre qu’avec du courage et de l’obstination, on finit par y arriver. »  

Résumé

Comment devenir riche quand on est un gamin de famille nombreuse, débarqué de son île de l’océan Indien et sans un sou en poche ? Comment un modeste fils de garagiste devient un magnat de l’immobilier. Aîné d’une fratrie de dix enfants, le petit Jean-René Malési est issu d’une modeste famille de La Réunion. Peu assidu à l’école, un amour impossible le mènera à Paris. Il accède à la fortune, au luxe, mais un jour, comme un revers de médaille, il est contraint à cesser son activité et perd tout. Sa capacité à rebondir et la foi en sa bonne étoile vont alors le pousser à reprendre son ascension.

Extraits (chapitres 1 et 2)

Chez les Malési, on n’était pas malheureux même si on devait faire des prodiges d’imagination pour joindre les deux bouts. On conservait les vêtements pour les plus jeunes. Jean-René, avec son statut d’aîné, avait les frusques les moins rapiécées. Il fallait bien qu’il y eût un avantage à endosser ce rôle d’aîné…
Le père ne s’arrêtait de travailler que le dimanche. On faisait quelques ablutions de bonne heure le matin, exercice pas facile quand on ne connaît pas le confort d’une salle de bains : juste un cabinet de toilette avec une grande cuvette, émaillée tout de même, et un broc plus rustique. Pas de tout-à-l’égout, on balançait l’eau usagée par la fenêtre.
On enfilait ensuite les habits du dimanche, puis on se pressait en file indienne vers l’église. Procession ordonnée, le père en tête, la mère fermant la marche avec le plus jeune des exemplaires de la famille dans les bras.
Chez les Malési, on ne plaisante pas avec les offices religieux. Alors tout le monde connaît les réponses de la messe en latin, on possède son Kyrie ou son Agnus Dei ou encore son Credo in unum Deum sur le bout des doigts. On a la religion chevillée au corps.
L’après-midi, on jouait au football ou on allait à la plage. Et puis retour au bercail. Un œil sur les devoirs et on avalait le rougail saucisse que maman Malési cuisinait si bien. Malgré son travail harassant, monmon était une fine cuisinière. Elle savait concocter des plats gourmands avec des riens.
Jean-René passait plus de temps avec les copains dans la rue qu’il n’usait ses culottes, encore courtes à son grand dam, (il aurait tellement aimé des pantalons longs comme les plus grands) sur une chaise pour lire ou apprendre ses leçons. Tout le monde disait qu’on n’en ferait pas un intellectuel. Son père en rajoutait :
— Si tu n’apprends pas, que vas-tu faire ? Tu n’es pas bon à grand-chose avec tes mains. Tout juste arrives-tu à tourner une clé à molette…
— Je me débrouillerai, ne t’en fais pas pour moi.
— Dieu t’entende.
Le fils, qui allait aborder ses douze ans, avait conscience de son problème : n’étant ni manuel ni intellectuel, qu’allait-il devenir ? Il se posait la question. Pourtant, il possédait une conviction forte en lui : il trouverait sa voie, et elle serait royale. Enfin, c’est ce que le gamin imaginait.

Une seule lecture le retenait : les Fables de Jean de La Fontaine. Il avait un faible pour Le Lièvre et les grenouilles. À cause de ce passage : « Un lièvre en son gîte songeait, (Car que faire en un gîte, à moins que l’on ne songe ?) Dans un profond ennui ce lièvre se plongeait...
Oui, c’était bien là son drame : Jean-René s’ennuyait. L’île était trop exigüe pour ses rêves et ses ambitions. Il ne les avait pas encore identifiées mais il les sentait, tel un principe ancré en lui, une idée fixe aux contours imprécis.

Volcan l’a pété !
La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre. De toute manière, pas question de l’ignorer, le panache de fumée et le nuage d’eau montent jusqu’à plus de 3000 mètres. Du jamais vu, un tel phénomène pour cette génération !
...
On est le mercredi 5 avril 1961. Jean-René Malési, pour une fois qu’il se passe quelque chose d’important sur l’île, ne veut pas manquer le spectacle :
— On va y aller dimanche, n’est-ce pas, papa ?
...
C’est ainsi que Jean-René Malési eut le premier gros choc de sa vie. Un tournant aux conséquences inattendues.
Le voyage fut interminable. Il fallut plus de deux heures pour atteindre Saint-Benoît. Le panache de fumée titillait la voûte céleste. La pluie rageuse les avait accompagnés depuis Saint-Denis, mais avait cessé bien avant Sainte-Rose. La colère des entrailles de la Terre avait pulvérisé les stratus poussés par les vents dominants d’est.
On arriva à trouver sur la berme un endroit pour remiser la vieille Traction hoquetante. Le temps de grimper sur un morne et, au milieu de centaines de curieux, on aperçut enfin les coulées de lave bouillonnante dévalant le nouveau cratère pour se hâter de gagner la mer, brûlant tout sur leur passage. Un fleuve incandescent que rien ne pouvait arrêter dans sa course folle. Les quelques gendarmes présents empêchaient les plus téméraires de s’approcher davantage. Certains badauds, plus prudents, portaient des masques pour se protéger de gaz éventuellement nocifs, cela s’était déjà vu...
Jean-René apercevait depuis son promontoire le feu d’artifice qui jaillissait des profondeurs de la Terre. « Quelle force, se dit-il, on ne peut rien contre elle. Voilà ce qui arrive quand on comprime trop l’énergie, elle finit par tout faire péter, elle emporte tout ».
Il se frotta le front légèrement humide et comprit le symbole de ce phénomène hors du commun : lui aussi finirait par exploser et libérer ce qui s’accumulait en lui. C’était évident. Ce n’était plus qu’une question de temps et d’opportunité.
Il demeura pétrifié, perdu dans ses pensées. Le piton de la Fournaise, c’était lui, son explosion aurait lieu un jour. Ce qui bouillonnait en lui sortirait, et là on verrait bien ce dont il serait capable.
Sur le chemin du retour, Jean-René commença à s’imaginer un avenir à défaut d’un destin mais, diable, par où commencer quand on a si peu d’idées et encore moins de projets... Son optimisme naturel lui faisait espérer un coup providentiel, un petit train avec un wagon chargé d’ondes positives qu’il suffirait de prendre. Ce qui était sûr, c’est que si ce convoi passait devant lui, il ne le laisserait pas filer. Un seul bond et il se hisserait dedans. N’avait-il pas lu quelque part cette phrase qu’il avait soigneusement notée sur un cahier d’écolier : « Le hasard ne favorise que les esprits préparés » ? Louis Pasteur avait raison. Malési était convaincu du principe, restait à trouver... la préparation.
Ce soir-là, pour une fois, dans son lit, le gamin ne connut pas l’ennui. Et s’il songea, c’est en s’imaginant des destins plus glorieux les uns que les autres. Chimères, oui, sans doute, mais premières ébauches, propres à redonner le sourire. Le piton de la Fournaise avait rendu son oracle. Il pouvait donc patienter encore quelque temps. Son heure viendrait.

L’AUTEUR : 

Comme son héros, Jean-Raoul Ismaël a connu une enfance sans souci dans une famille modeste de dix enfants à Saint-Denis de la Réunion. Grand professionnel de l’immobilier, il est un catholique convaincu et pratiquant. Sans doute le plus intuitif des grands capitaines d’industrie. Une réussite étonnante malgré un environnement social peu favorable. Au fil des ans, il consacre une partie de son temps à la peinture et à La Réunion. Il co-crée avec un artiste réunionnais le festival Street-Art dans sa ville natale.


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