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Méline Payet-Clerc : la passion des volcans

Publié le 21 septembre 2022

Jusqu’à Reykjavik en Islande, cette Cilaossienne diplômée de l’Institut de Physique du Globe de Paris a décidé de poursuivre ses études en volcanologie par un doctorat. Elle nous raconte son parcours guidé par la passion des volcans et ce qu’elle aimerait apporter à la recherche réunionnaise sur le Piton de la Fournaise.


Pouvez-vous vous présenter ?

Méline Payet-Clerc, je viens de Cilaos. J’ai 23 ans et je viens de terminer un master en géologie à l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP). Mon stage de mémoire a porté sur l’étude du panache de cendre de l’Eyjafjallajokull en 2010, dans le groupe de Volcanologie et risques naturels de l’Université d’Islande à Reykjavik. Notre groupe de recherche a été directement sollicité et impliqué dans l’étude de la nouvelle éruption en Islande. J’étais présente aux Jours du Feu de Sainte-Rose pour présenter les travaux de notre groupe de recherche au public réunionnais. J’aime partager mon expérience à l’étranger, car ce sont des témoignages de chercheurs qui m’ont poussé à sauter la mer pour la première fois ! Si mon témoignage peut créer des vocations ou aider les jeunes à sauter le pas comme cela a été le cas pour moi, j’en serai honorée...

Racontez-nous votre parcours.

Ma première mobilité s’est déroulée lors de ma dernière année de licence en Sciences de la Terres à l’université de la Réunion. La possibilité de partir en Erasmus s’est présentée et je l’ai saisie : direction l’Islande pendant 7 mois ! Puis, par manque de choix de master à l’Université de la Réunion, j’ai une nouvelle fois sauté la mer pour effectuer mon master à Paris.


N’étant pas une grande amatrice des grandes villes comme notre capitale, j’ai demandé à mes anciens enseignants islandais s’ils acceptaient de m’encadrer pour mon mémoire. Ils ont accepté et en collaboration avec un de mes enseignants à l’IPGP, nous avons créé mon sujet de mémoire portant sur le panache éruptif du volcan Eyjafjallajökull qui avait mis à mal le trafic aérien en 2010.

Et ensuite ?

Une semaine avant la date finale de rendu, une éruption a commencé en Islande ! Venant de la Réunion, une éruption n’était pas quelque chose de nouveau pour moi. Cependant, travailler avec des volcanologues sur le terrain dans ces conditions était une première. Cela a été particulièrement enrichissant de part tous les échantillonnages et mesures que nous avons effectués sur le terrain. 


Quel est votre regard sur l’Islande ?

Les paysages glaciaires sont magnifiques, les aurores boréales grandioses. La Réunion et l’Islande sont à la fois ressemblantes et différentes : le chaud est remplacé par le froid. Un point commun : les Islandais ont le coeur sur la main. J’admire les politiques de ce pays qui sont très abordables. Vous pouvez les croiser en faisant vos courses, et ils sont très axés sur la protection de l’environnement et la libération de la parole chez les personnes opprimées. J’ai l’image d’un pays, l’Islande, qui vous donne votre chance. Il y a toujours des opportunités, toujours une main tendue qu’il suffit d’attraper. Les gens sont humbles et généreux tant que l’on respecte leurs limites. Mais attention, business is business ! En Islande tout se négocie.

Que vous a apporté l’expérience de la mobilité ?

Cette mobilité a vraiment été un rêve éveillé, qui m’a aidée à me construire en tant que personne… Ces séjours en Islande m’ont permis d’élargir mes compétences et connaissances en volcanologie ainsi que mon cercle professionnel. De plus, j’ai pu découvrir un nouveau pays, un nouveau climat et une nouvelle culture. Venir de la Réunion, où il existe une grande diversité, a été une force pour s’adapter à cette nouvelle culture. En revanche, les climats étant opposés entre l’Islande et la Réunion, l’adaptation au froid a été compliquée...


Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

Du piment zoizeau, des lentilles de Cilaos, une marmite à riz et les photos de ma famille. Ces objets me suivent partout et je ne suis pas prête de m’en débarrasser. Toutes ces choses me permettent de toujours avoir une part de chez moi, même à des milliers de kilomètres. La nourriture m’aide à me sentir chez moi, et les photos réchauffent le cœur quand la maison et la famille nous manquent. 

Aujourd’hui quels sont vos projets ?

Je souhaite poursuivre par un doctorat en volcanologie à l’étranger. C’est un projet qui est en cours de concrétisation au moment où j’écris ce texte. J’espère de tout coeur qu’il se concrétisera car c’est réellement la voie professionnelle que j’aimerais suivre afin de devenir chercheuse en volcanologie. Cela dans le but d’apprendre le plus possible et d’un jour rentrer chez moi afin d’enrichir, je l’espère, la communauté scientifique de la Réunion. 


Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre de revenir habiter à la Réunion ?

Une offre d’emploi dans la recherche en volcanologie ! J’aimerais beaucoup rentrer vivre à la Réunion dans quelques années. Cependant, le secteur de la volcanologie est très restreint et il me faudra surement attendre une offre ou une libération de poste afin de pouvoir rentrer définitivement sur mon île. J’ai toujours gardé le lien avec la Réunion… J’ai effectué un stage à l’OVPF en 2019. L’IPGP où j’ai effectué mon master est la maison mère de l’observatoire du Piton de la Fournaise.

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

Je suis quelqu’un de très proche de ma famille et le fait de ne pas pouvoir rentrer chez moi le weekend ou même de temps en temps est pesant. Ce qui me manque aussi c’est de manger des légumes et des fruits qui ont du goût ! Cela peut paraître bête, mais en Islande tout est importé ou produit en serre et je peux vous dire qu’entre une tomate qui a grandi sous le soleil réunionnais et une tomate qui a poussé en serre, le rougail tomate lé pa pareil du tout...

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Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

Les gens sont surpris quand je leur dis que ma famille vient de la Réunion et que j’y ai toujours vécu. Les gens imaginent souvent que nous vivons dans une société précaire, d’autres que nous vivons sur un paradis sur terre où la vie est belle. Il y a donc plusieurs visions de notre ile, en fonction de ce que les gens ont entendu ou vu à la télévision, sur les réseaux sociaux, etc.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

Ma réflexion sur ce sujet est immature, mais j’ai l’impression que notre économie est gouvernée par des personnes qui sont là depuis bien trop longtemps. Je pense aussi que l’on devrait se laisser tenter par nos jeunes qui se lancent en politique et qui souhaitent faire bouger les choses. Il faut relancer les filières agricoles locales afin de moins dépendre de l’importation.

« Je ne serais pas arrivée là si ma mère ne m’avais pas autant poussé à suivre mes rêves. Ma maman m’a toujours aidé, même quand c’était financièrement compliqué. Je ne la remercierai jamais assez ! »


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