Publicité

Olivier Hoarau, 28 ans, auditeur senior chez Ernst & Young en Australie

Publié le 13 novembre 2006

Après un BTS au lycée St Charles de St Pierre et une école de commerce à Bordeaux, Olivier travaille depuis quatre ans pour le cabinet d’audit Ernst & Young. Un poste qui lui permet de voyager et de choisir ses destinations dans le monde : après le Luxembourg et Montréal, c’est à Sydney qu’il vient de s’installer avec sa compagne. De l’obtention d’un prêt étudiant à ses derniers succès professionnels, il nous raconte ici son parcours.

Olivier Hoarau

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

"J’arrivais à la fin de mon BTS Commerce International et je me demandais quoi faire ensuite… C’était soit une licence d’AES pour m’orienter vers le professorat, soit quitter la Réunion pour faire une école de commerce. J’ai décidé de quitter la Réunion pour ne rien regretter, car j’avais la chance d’être admissible au concours de l’INSEEC à Bordeaux".

Comment avez-vous financé ces études réputées chères ?

"Le problème, c’est que mes parents avaient juste les moyens de subvenir à mes besoins primaires sur place (loyer et nourriture). Je n’avais pas de quoi payer l’école (environ 7 000 euros par an pendant 3 ans + une session d’été en Université a l’étranger : 7 000 euros supplémentaires). J’ai eu de la chance sur ce coup là, car c’est la première année que le Conseil Général attribuait une bourse aux étudiants qui partaient en école de type ingénieur ou commerce. Mes trois années d’école étaient donc prises en charges, mais il me restait à financer la session d’été, plus un petit capital pour m’installer, plus les voyages pour les stages à l’étranger qu’imposait l’école".


Qu’avez-vous fait ?

"La solution qui s’imposait était de souscrire un prêt étudiant (les taux tournent autour de 4.25 - 5% en métropole), tout en me procurant ponctuellement des jobs pour « l’argent de poche ». Il est vrai que ces études sont coûteuses, mais le bénéfice qu’on en retire est considérable. C’est un peu comme si on investissait dans son avenir".

"Les écoles de commerces donnent en général accès à des postes exposés et qualifiés. Les possibilités d’avancer dans la hiérarchie sont grandes, sans rester cinq ans au même grade. Ces emplois sont généralement bien rémunérés, ce qui permet de rembourser votre emprunt sans trop de difficulté. Le risque de l’emprunt est finalement moindre. Là où je veux en venir, c’est que le manque de moyens ne doit pas être un obstacle pour les jeunes qui veulent partir et réussir. Ce système des écoles de commerce est tout sauf « juste » dans la mesure ou elles coûtent cher, mais on ne peut rien y faire (en tout cas, on ne peut pas attendre que ça change !). Il y a la solution d’emprunter et cela vous donne une sorte de fierté intérieure. Celle de se dire « j’y suis arrivé seul, sans sur-endetter mes parents ».

Racontez-nous votre arrivée.

"J’ai eu la chance d’avoir une amie de la Réunion qui était à l’INSEEC et qui m’a hébergé les deux premiers mois pour que je puisse trouver un appart sympa. Une fois intégré dans l’école (ce qui est assez facile étant donné que tout le monde vient des quatre coins de la France et doit se faire un nouveau cercle d’amis), tout s’est bien passé. Les fêtes hebdomadaires ont vite fait oublier que la Réunion est loin !"

La transition entre les études et le monde professionnel s’est faite naturellement…

"Le programme de l’INSEEC vous oblige à voyager pour faire vos stages, et c’est ce que j’ai fait : Angleterre, Mexique et Luxembourg. Un job peut en amener un autre… Lors d’un job d’été au Club Med en Turquie, j’ai sympathisé avec un client. Cette personne en est venue à me dire que si je cherchais un jour un stage de longue durée dans la Finance, je n’hésite pas à l’appeler. C’est ce que j’ai fait un an après lorsque j’ai dû trouver mon stage de fin d’études de six mois. Cette personne travaillait chez Ernst & Young au Luxembourg. J’y suis finalement resté pendant deux ans. C’était mon premier emploi…"

En quoi consistait-il ?

"J’étais (et je suis toujours) auditeur. Je m’occupe de la certification de comptes pour des clients comme des fonds d’investissement et des entreprises de technologie, communication et divertissement. Le Luxembourg était une étape difficile, mais c’était aussi une des seules solutions pour un étudiant n’ayant pas fait une des 10 premières écoles de France de se faire embaucher dans un cabinet de l’envergure d’Ernst & Young. Je suis rentré par la porte de service en quelque sorte".

Et ensuite ?

"Ayant fait le tour du Luxembourg, je décidais que c’était tout, sauf un endroit où je voulais m’établir. Ayant du mal à trouver du travail en France, nous avons décidé avec ma copine de regarder ce que pouvait proposer l’étranger. Le Canada nous plaisait beaucoup. Par chance il y avait une annonce sur le site interne d’Ernst & Young pour un poste à Montréal à laquelle je me suis empressé de répondre. Nous sommes donc arrivés à Montréal, au début du mois de février 2004, en plein hiver ! -30 degrés… Le choc pour un Réunionnais ! L’étape Montréal a duré deux ans et demi. Un endroit exceptionnel, mais avec des hivers trop longs pour nous. Cinq mois de neige, c’est beaucoup. L’océan nous manquait".

C’est alors que vous avez pensé à l’Australie.

"Ma fiancée avait été à Sydney et elle avait trouve l’endroit exceptionnel. Nous nous sommes dit pourquoi pas ? Même principe : candidature, entrevues téléphoniques et puis hop, l’avion pour Sydney ! Le choc thermique s’est fait dans le bon sens cette fois-ci. L’hiver, il fait entre 5 et 15 degrés (mais il fait toujours beau) et autour de 30 degrés l’été. Cela fait deux mois que nous sommes installés. On n’est pas encore certains de se plaire à 100%, mais avoir la mer devant chez soi et une ambiance relax (sans être nonchalante), c’est très appréciable".

Quels sont vos projets ?

"Rester deux ans à Sydney ou peut-être un peu plus. Cela dépendra des opportunités. Ensuite prospecter du côté de la Réunion ou Bordeaux. Là aussi ça dépendra des opportunités. A terme, je souhaiterais monter ma propre entreprise".

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"Ouverture d’esprit, flexibilité, capacité d’adaptation, bilinguisme, expérience professionnelle très valorisante, un regard différent…"


Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"Je trouve inadmissible le coût de la vie à la Réunion. Les frais d’importations sont loin de suffire à justifier les prix des produits de première nécessité. Une chose est curieuse : les ordinateurs et autres produits d’électroménager sont sensiblement au même prix qu’en France, alors que les produits de base sont entre 25 et 50% plus chers ! Ma conclusion (aussi hâtive soit-elle) serait que les grandes surfaces font beaucoup trop de profit sur des produits comme la nourriture, alors que les gens ont besoin de manger. Je trouve ça vraiment malsain. Autrement, je pense qu’il y a de place à la Réunion pour faire de belles choses et générer de l’emploi".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Avantages : c’est exotique et les gens se souviennent de vous (ce qui n’est pas négligeable), c’est beau et tout le monde vous envie d’habiter là, on prend le stress avec philosophie, le sentiment d’appartenance à un endroit est plus fort… Inconvénient : Les gens croient parfois que c’est plus facile à la Réunion".

Vous-même, quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

"Je respecte beaucoup les Australiens parce qu’ils sont très respectueux de la nature et assez civiques dans l’ensemble. Le mode de vie est très semblable à celui de la Réunion dans le sens où les habitants vivent avec le soleil. Tout le monde est chez soi lorsqu’il fait nuit et sort aussitôt que les premières lumières du jour apparaissent. D’ailleurs ils font du sport le matin très tôt avant d’aller travailler. C’est impressionnant de voir autant de monde sur la plage en train de faire un jogging alors qu’il est 6h30 du matin. Les Australiens font attention à leur santé en général. Ceci dit, ce sont de bons vivants. Ils aiment boire des bières et sortir entre amis".

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes réunionnais ?

"Et bien je leur dirais de ne pas avoir peur d’aller voir ce qu’il y a ailleurs s’ils en ont les moyens. Le cadre des études reste de loin le meilleur en terme d’intégration, même si partir juste après le Bac est parfois un peu prématuré. Je n’ai quitté la Réunion qu’à 20 ans, ce qui m’a permis de mieux affronter les difficultés que j’ai rencontrées en arrivant".

Que pensez-vous du site www.reunionnaisdumonde.com ?

"L’idée du site est brillante. On retrouve des personnes qu’on avait perdues de vue… c’est vraiment terrible !"
Voir le profil d’Olivier

Publicité