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Olivier Mourgaye, directeur commercial d’une agence de com en Afrique de l’Ouest

Publié le 18 septembre 2007

Après une licence Info Com à l’université de la Réunion et quatre ans chez Factories, Olivier accepte un challenge pas gagné d’avance : prendre la tête d’une équipe de neufs commerciaux à Dakar et s’occuper de la gestion de plusieurs marques au Sénégal et dans 12 pays d’Afrique de l’Ouest. Rapidement intégré dans son nouvel environnement, Olivier se distingue en trouvant un slogan en wolof qui propulse une nouvelle marque de pâtes…

Olivier Mourgaye
Olivier lors d’une réunion de travail pour le lancement d’Orange Guinée : "système D et envie de réussir sont les maître mots dans cette Afrique de la créativité".

Racontez-nous votre parcours.

"Papa et maman habitent Le Port et le gros de ma famille est dans le Sud. Je suis issu d’une classe moyenne, mes parents sont employé à la sécu et chauffeur de camion à l’origine. Après mes études, j’ai travaillé quatre ans chez Factories à la Réunion, agence de publicité leader du marché sur l’île. J’ai enchaîné les postes de stagiaire, assistant, directeur clientèle, puis directeur du planning stratégique".

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

"C’est le plus pur des hasards. Une amie camerounaise ayant posé un CV au Sénégal, on lui demande si elle connaît un planeur stratégique et elle donne mes coordonnées. J’étais en pleine préparation d’un poulet sauce d’huître, quand la directrice de l’agence McCann Erickson à Dakar m’appelle. On parle deux heures. Le challenge me plaît et deux mois plus tard, me voilà au Sénégal, en tant que directeur commercial de McCann Erickson Sénégal. Je suis en charge de la stratégie et d’une équipe de neuf commerciaux, de la gestion de plusieurs marques au Sénégal et dans toute l’Afrique de l’Ouest et du Centre (une douzaine de pays)".

Racontez-nous vos débuts.

"Quand j’arrive à Dakar, la boîte vient de perdre son plus gros client. Les commerciaux ont déjà connu trois vagues de licenciement. Je suis le plus jeune de l’équipe et tout le monde me prend pour un toubab (zoreil) qui débarque. Je me mets au travail, avec peu de temps pour profiter du pays".

Comment faîtes vous pour imprégner de cette société sénégalaise ?

"Je décide d’habiter un quartier populaire (Front de Terre). Je deviens l’ami d’un gars croisé dans un concert bar, qui me fait découvrir de façon effrénée le Dakar by night (la nuit, parce que le jour je travaille). Entre les mamas du quartier, les soirées à discuter au coin de la rue, le thé l’après-midi, je partage des instants de vie, je regarde, j’écoute. Je pose des questions à mes collègues sur leur pays et la vie des gens".

Que se passe-t-il ?

"Quelques semaines plus tard, je trouve une accroche en wolof et propulse une nouvelle marque de pâte. Intégration réussie ! Ensuite, c’est les voyages dans les pays voisins qui s’enchaînent, d’autres rencontres. Tout va vite. Boulot, boulot, boulot... Mon job, c’est mon voyage dans la vie des gens !"

Quels sont vos projets ?

"Réussir mon plan de développement de l’agence pour les trois prochaines années. Faire briller cette région du monde via la pub (gagner des prix !), développer des études sociales pour mieux connaître cette Afrique. N’importe quoi dans mon champ de compétences, du moment que c’est un acte pionnier !"

Olivier Mourgaye
Plage de Yoff, rendez-vous dominical des Dakarois en été.

Plage immense, foule dense, chaleur écrasante, cette photo montre l’intensité de ma vie dans ce pays. Au départ on m’a pris pour un toubab qui vient profiter des plages, un amateur de l’Afrique en boubou et des djembés. Quand j’ai passé mes nuits et mes journées à bosser, tout le monde a compris que j’étais là pour faire quelque chose. L’Afrique qui m’intéresse, c’est l’Afrique contemporaine, celle des villes, des jeunes qui veulent bouger, des nouveaux artistes. L’Afrique dont personne ne parle, dont personne de rêve... L’Afrique qui ressemble étrangement à la Réunion que je connais !

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"Je me rends compte que mon expérience à la Réunion a développé des compétences que je ne pouvais apprendre ailleurs : multiculturalité, faire beaucoup avec peu, système D, adaptation aux modes de vie différents, manger des épices... Mon arrivée au Sénégal m’a rassuré sur mes compétences et sur la valeur professionnelle des Réunionnais. Le "rattrapage du retard" n’est q’une notion relative. Mon voyage m’a rendu plus fort, plus mûr et j’ai encore plus faim de vivre !"

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

"La famille et le confort de vie. La Réunion c’est tranquille. Il y fait bon et la vie est douce. Je ne m’en rendais pas compte à ce point avant les voyages".

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"On râle trop ! On se regarde trop le nombril et malheureusement quand on a un objectif, c’est toujours vers la métropole. On a du talent à offrir au monde entier. La Réunion est trop petite pour tout le monde, il faut bouger. On devrait s’investir plus dans notre région, l’océan Indien, et se développer en rythme avec elle".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Inconvénients : aucun ! Avantages : meilleur compréhension des régions dans lesquelles je travaille, expérience adaptée à la taille des marchés, contrairement à mes collègues d’Europe, ultra spécialisés et trop habitués aux grosses structures".

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

"J’ai fait venir un ami pour une mission de trois mois. Je pense qu’il a vu le challenge et va prolonger son contrat. Comme moi, il se rend compte que les Réunionnais sont adaptés à la situation et que c’est une occasion pour nous de faire briller le savoir de l’île depuis Dakar".

Quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

"Une terre vierge, pleine de talents bridés par des problèmes économiques, des complexes et un fatalisme post-colonial. L’avenir de la créativité, c’est ici que ça se passe !"

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes Réunionnais ?

"Partagez ce que vous savez, prenez tout ce que le monde a à vous donner !"

* Réunion de travail à Conakry, capitale de la Guinée, pendant une mission de repérage pour le lancement de Orange Guinée. Une réunion originale avec une boîte de production audiovisuelle qui a son bureau dans une petite gargote en plein milieu d’un quartier populaire. Peu de moyens, beaucoup de système D et une envie de réussir malgré les conditions difficiles…

Lire aussi : Elections présidentielles 2012 au Sénégal : Un Réunionnais témoigne
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