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Radj Koytcha, un entrepreneur réunionnais à Miami

Publié le 25 août 2014

A 44 ans, le fondateur du cabinet de gestion de patrimoine Koytcha Conseil a décidé de s’implanter aux Etats-Unis pour y développer des investissements. Récit d’une success story réunionnaise, qui est aussi celle d’une entreprise familiale bien enracinée sur l’île mais qui ne craint pas de partir à la conquête de nouveaux marchés.


Radj Koytcha, un entrepreneur réunionnais

Racontez-nous votre parcours.

Je suis né à Rouen mais je suis arrivé à la Réunion à l’âge de 5 ans. J’ai grandi à Saint Denis et effectué une première partie de mes études sur l’île, en passant une Maîtrise de Sciences Economiques (1991). Je me suis ensuite expatrié en métropole pour une maîtrise de Finance à Montpellier (1992), puis une école de commerce (EM Lyon en 1994). J’ai créé un cabinet de défiscalisation à la Réunion dès ma sortie de l’EM Lyon en 94. Deux ans après, j’ai effectué un intermède d’un an dans un cabinet de gestion de patrimoine qu’avait constitué un important cabinet d’expertise comptable de la Réunion. J’ai alors décidé de m’installer comme gestionnaire de patrimoine indépendant en 1997 avec deux axes forts : spécialisation sur les chefs d’entreprises et les professions libérales, et facturation du conseil sous la forme d’un abonnement indépendamment de la vente de produits (assurance vie, défiscalisation, immobilier, etc.).

Et ensuite ?

Une fois installé comme gestionnaire de patrimoine, j’ai passé le DES de Gestion de Patrimoine à Clermont-Ferrand en 2001. Il s’agit du diplôme référence dans notre profession et l’idée était de valider la pratique par une formation théorique reconnue. La société Koytcha Conseil a ensuite pris un essor que je ne soupçonnais pas. Nous sommes aujourd’hui environ 20 personnes, présents à la Réunion, Mayotte, Nouvelle-Calédonie, Madagascar et les USA. Cet essor est fortement dû à l’arrivée de mon cousin Salim et mon frère Kouresh mais aussi à l’existence d’une équipe de grande qualité à nos côtés, collaborateurs comme associés.

Dans quelle circonstances avez-vous décidé de « sauter la mer » pour les Etats-Unis ?

Notre métier de gestionnaire de patrimoine ne nous prédispose pas à quitter la Réunion. Nous sommes des spécialistes de la fiscalité française et il s’agit à priori de quelque chose de peu « exportable ». Néanmoins, nous avons toujours souhaité regarder ailleurs et nous avons réalisé une première expérience d’investissements immobiliers en Nouvelle Calédonie qui a plutôt bien fonctionné. Nous nous sommes aussi intéressés au marché immobilier américain juste après la crise en 2011 et nous avons donc décidé de proposer à nos clients d’investir avec nous dans ce secteur qui présentait de nombreux avantages. Les prix des villas dans des villes comme Miami, Atlanta, Memphis, Tampa, etc. étaient en dessous des 800 € le m2, les rentabilités nettes approchaient les 10%. La décision de s’implanter a été prise lorsque le volume d’investissements de nos clients a commencé à dépasser nos prévisions. Le cabinet Koytcha Conseil étant géré familialement, nous avons décidé que je m’y installerais pour deux ans afin de mieux superviser nos investissements sur place.

Quel contexte d’affaires avez-vous trouvé en arrivant à Miami en janvier 2014 ?

C’est un vrai choc de mentalité. Aux USA, tout tourne autour de l’argent et la réussite fait partie intégrante de l’état d’esprit américain. La flexibilité du travail est très impressionnante. Elle fait partie du mode de fonctionnement des patrons comme des salariés. Je suis très surpris du turn-over important de la main d’œuvre américaine qui n’hésite pas à changer de travail pour des considérations salariales, géographique, d’état d’esprit ou autre. Notre première secrétaire a ainsi démissionné au bout de deux mois car elle avait une offre plus intéressante ailleurs. Je le constate tous les jours : les Etats-Unis sont le pays de la réussite et le meilleur endroit pour qui veut réaliser de grands projets ou s’accomplir professionnellement. En contrepartie, il ne faut pas chercher ici la richesse culturelle et les rapports humains comme on peut les trouver en France.

Vous êtes arrivé avec femme et enfants. Comment se passe votre « expatriation » au niveau familial ?

Cela se passe plutôt bien du fait qu’elle est limitée dans le temps à deux années. Ma famille et moi sommes dans une situation où nous profitons de tous les instants. Je suis agréablement surpris par le système scolaire américain. Nos deux enfants ont fait leur premier semestre dans des écoles publiques. Du coup, nous n’avons absolument rien payé – à part les uniformes – et le niveau scolaire est plutôt bon avec beaucoup de travail d’expression orale, des travaux de groupe... et le traditionnel hymne national américain chaque matin, que mon fils de 9 ans connait par cœur ! Les deux principaux chocs pour des Français sont l’éducation et la santé qui sont de ici des secteurs commerciaux. Il est assez étonnant de voir les activités de santé se livrer une guerre du client à laquelle nous ne sommes pas vraiment habitués chez nous.

Nahya et Shanti, deux petits réunionnais à l’école américaine. Au programme : uniforme et hymne national tous les matins.

Quel regard portez-vous sur la situation socio-économique de la Réunion ?

Je suis comme la plupart des Réunionnais : très inquiet sur son évolution. En tant que chef d’entreprise, nous avons souvent du mal à recruter du personnel qualifié dans nos domaines d’expertise. Les profils intéressants ont souvent peur de la petite PME qu’ils considèrent comme risquée. Il y a aujourd’hui un état d’esprit « fonction publique » des salariés que je regrette. Nous subissons aussi un contexte macroéconomique négatif qui freine notre développement actuel, sans parler de l’environnement politique compliqué qui n’offre pas de stabilité et de visibilité. Prenons l’exemple des multiples modifications des lois fiscales ou l’abandon du projet GERRI qui était une véritable opportunité pour la Réunion. Mais ce que je déplore le plus, c’est cet état d’esprit « crise » qui maintient l’ensemble des agents économiques à une attitude de frilosité, de peur de l’avenir alors que justement il faudrait se mobiliser et se montrer encore plus conquérant dans un tel contexte. Ce qui est appréciable dans la mentalité américaine, c’est qu’au pire de la crise « Subprimes », ils étaient prêts à rebondir et croyaient fermement à des lendemains meilleurs.

Pensez-vous que l’expérience de la mobilité soit nécessaire sur le CV d’un jeune aujourd’hui ?

Je pense que c’est une absolue nécessité et c’est que nous souhaitons pour nos propres enfants. Notre aîné fait ses études en Australie. Il est indispensable qu’ils aillent voit ailleurs, même s’ils envisagent ensuite un retour au pays. Ce sera autant de matière grise plus compétente pour le développement de la Réunion. De plus les perspectives d’emploi localement ne peuvent que pousser les jeunes à tenter l’expérience étrangère.

Si vous deviez envisager une autre expérience de mobilité, dans quel pays souhaiteriez-vous aller ?

Je reviens juste du Canada et j’avoue qu’il y a un mixte de choses qui me plaisent beaucoup avec la mentalité américaine : une gentillesse inégalée des Canadiens, un contexte économique très favorable et l’existence d’un milieu francophone pas désagréable. Seul bémol, l’hiver, que le Réunionnais que je suis ne pourrait braver. Aujourd’hui je conserve mon activité et mes revenus français, avec un retour tous les trimestres à la Réunion de deux à trois semaines. Le retour à Sainte-Clotilde où nos bureaux sont implantés est prévu mi 2015 mais je continuerai à assurer une présence régulière aux USA.

Quelles sont les pistes de développement pour Koytcha Conseil ?

Ma présence aux Etats-Unis depuis six mois se traduit par de nouveaux projets et l’étude de nouvelles catégories d’investissement. Ainsi, nous regardons attentivement les investissements dans les murs d’écoles semi-publiques (Charters School) qui peuvent être un marché intéressant sur la Floride compte tenu de l’explosion démographique et économique de cet état. Nous avons aussi des opportunités d’investissement en immobilier sur la Tunisie. Nous devons nous y rendre avant la fin de l’année pour un voyage d’étude et d’implantation sur place.

Voir le site koytchaconseil.com / Le profil de Radj Koytcha

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Article paru dans le Journal de l’île de la Réunion du 25 août 2014 :

Portrait paru dans le Journal de l’île de la Réunion du 25 août 2014


Radj Koytcha, un entrepreneur réunionnais

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