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Sarah Caire Fong-Yan, admise à UWC au Costa Rica

Publié le 26 avril 2021

C’est la 2e lycéenne réunionnaise admise dans cette école internationale qui prône les valeurs de paix dans le monde et d’entente entre les différents peuples. Si Sarah a été sélectionnée, c’est parce qu’elle s’est présentée comme ambassadrice du "savoir-vivre ensemble" réunionnais, qu’elle entend bien faire connaître dans ce lycée international qui accueille plus de 100 nationalités dans 18 écoles réparties sur les cinq continents.


Pouvez-vous vous présenter ?

Sarah Caire Fong-Yan. J’ai 16 ans et je suis en classe de seconde générale au lycée Edgar Poe à Paris. Je viens de Saint-Louis et j’ai la chance d’être née au carrefour de trois cultures : chinoise, réunionnaise et française. Mon arrière-grand-père, appelé « Monsieur Soucou », a créé une des premières boulangeries de l’île. Il est l’inventeur du macatia avec monsieur Casimir Gouraya. Mes grands-parents maternels sont la première génération à être née à la Réunion. Ma mère et ma tante ont ouvert la première boulangerie pâtisserie sans gluten de la Réunion, une des premières à l’échelle nationale. Comme je suis très gourmande, cela a été un grand bonheur de grandir entourée des personnes que j’aime et de délicieux gâteaux ! Mes souvenirs d’école primaire à Saint-Louis sont parmi les heureux de ma vie.

Dans quelles conditions avez-vous quitté la Réunion ?

Lorsque mon père est parti pour Paris pour des raisons professionnelles, j’ai été amenée à quitter mon île natale adorée. J’ai eu l’opportunité d’intégrer un collège en section bilingue, où plusieurs nationalités se côtoyaient : anglaise, canadienne, libanaise, chinoise, marocaine, etc. Je me sentais dans mon élément et je me suis très vite adaptée ! A la Réunion depuis la maternelle, nous sommes tous mélangés : chinois, zoreils, zarabes, créoles, métissés etc. Pour moi le plus grand trésor réunionnais à inscrire au patrimoine de l’UNESCO est notre extraordinaire capacité à vivre ensemble. Le « savoir-vivre ensemble » créole est une réalité quotidienne. C’est unique au monde ! Je suis extrêmement fière d’être réunionnaise.

Comment vous sentez-vous à Paris ?

J’aime beaucoup Paris. Je trouve que c’est une ville élégante et cosmopolite. Il y a beaucoup de possibilités au niveau culturel : musées, théâtres, spectacles, expositions... Avec une amie, je me suis découvert une passion pour les comédies musicales ! Pour les jeunes de mon âge, il y a énormément d’activités extra scolaires. On peut quasiment tout faire à Paris ! Le plus dur c’est l’hiver : se réveiller et rentrer de cours quand il fait nuit dehors, ça fait quand même drôle. Surtout quand on a entendu le coq chanter tous les matins à la Réunion !


Au premier abord, les Parisiens me sont apparus intimidants, plus méfiants et moins chaleureux que les Réunionnais. Mais une fois la glace brisée, je les ai trouvés sociables, avenants et loyaux en amitié. Dans ma classe, tous les élèves attachent une très grande importance à la devise de la France « Liberté, Égalité, Fraternité ». Il y a beaucoup de débats et de discussions autour de la liberté et de l’égalité surtout. Tous se battent pour que ces notions soient respectées pour eux et pour les autres. Je trouve ces discussions riches et stimulantes. C’est rassurant et encourageant de voir que les jeunes de mon âge ont à cœur de vivre dans un monde plus égalitaire et juste.

 
Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

J’ai eu la chance d’étudier le kung-fu au club France Shaolin fondé par le maître Shi Heng Jun, considéré comme « trésor national » en Chine. A deux reprises, j’ai eu le bonheur de faire un stage intensif de kung fu avec l’école de Shaolin d’Athènes sur l’île d’Aegina en Grèce. J’ai adoré vivre avec des disciples grecs, suisses, italiens, français etc. Ma mère et moi étions les seules représentantes de la Réunion et nous avons toujours été accueillies les bras ouverts, avec bienveillance. J’ai toujours beaucoup de joie à parler de mon île, de ses spécificités et richesses.


Le fait d’être mobile m’a ouvert des portes et permis de faire des rencontres incroyables ! J’ai pu ainsi passer des vacances au sein de familles très différentes de la mienne : camerounaise, juive, grecque. Et à chaque fois, cela s’est très bien passé. Découvrir des cultures, des cuisines, des modes de vie nouveaux m’ont appris que chaque peuple a des grandes richesses à partager ! Bien des conflits dans le monde sont dus à une mauvaise compréhension de l’autre, par ignorance de ses valeurs et traditions. La montée des violences liées aux intolérances et au racisme depuis le début de la pandémie me fait mal au cœur. Heureusement qu’il n’y a pas de violences de ce type à la Réunion. Du coup, j’ai encore plus envie de devenir une ambassadrice du « savoir-vivre ensemble » de notre île partout où j’irai. 

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Je viens d’être sélectionnée par l’école internationale United World College (UWC), dont Nelson Mandela a été le président de 1995 à 2013. C’est une école extraordinaire qui rassemble des étudiants du monde entier qui vivent ensemble dans l’objectif de devenir des acteurs du changement de notre planète. Chaque étudiant UWC a une réelle envie de faire du monde de demain un monde plus juste et plus durable.

Photo : UWC Costa Rica

UWC m’a proposé une place au Costa Rica. Grâce à une collecte que l’école a mis en place, j’espère pouvoir y aller à la prochaine rentrée de 2021. Je suis en contact sur Whatsapp avec les autres étudiants sélectionnés. Ils sont originaires du Népal, des USA, d’Allemagne, d’Alaska, d’Écosse, du Portugal… et je suis la seule Réunionnaise. J’ai prévu d’apprendre à faire le carri poulet et les beignets de banane pour les faire découvrir à mes futurs camarades du monde entier. Après le bac international, je ne sais pas encore ce que je ferai comme études. J’aime beaucoup les langues étrangères, les relations humaines, le théâtre. Je ferai tout mon possible pour continuer d’étudier à l’étranger. 

Quel lien gardez-vous avec la Réunion ?

J’ai gardé des contacts avec toute ma famille, nos amis et une amie de l’école primaire. C’est très important pour moi de rester en lien avec mes racines. Mon grand-père m’appelle tous les jours. J’ai beaucoup de chance de bénéficier de son expérience et de sa sagesse. 

Qu’est-ce qui pourrait vous convaincre de revenir à la Réunion ?

Pour le moment, je n’y pense pas vraiment. J’ai 16 ans et j’ai envie de découvrir le monde. En revanche, j’ai besoin de revenir régulièrement pour me ressourcer et retrouver mes racines, revoir les gens que j’aime, passer du temps avec eux. Plus tard, même si je ne sais pas encore comment, j’aimerais aider mon beau petit pays.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

Je ne suis pas une experte mais je pense que davantage d’échanges entre les jeunes Réunionnais et des jeunes d’autres pays leur seraient extrêmement riches et bénéfiques. Cela leur donnerait une autre ouverture sur le monde et des idées pour leur avenir. Les amitiés pluriculturelles peuvent durer toute une vie et changer notre vie. Donner aux familles réunionnaises l’opportunité d’accueillir des jeunes étrangers pendant un certain temps permettrait à leurs enfants de se familiariser avec une culture étrangère. Cela leur donnerait peut-être l’envie et l’élan de partir à leur tour dans une famille d’accueil à l’étranger. Et qui sait, peut-être que certains d’entre eux auront plus tard envie de faire des affaires à international ? La Réunion est une plaque tournante de l’Océan Indien. Les possibilités de commerce avec l’Inde, l’Afrique du Sud ou l’Asie sont immenses.

Photo : UWC Costa Rica

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

La plupart des gens à qui je parle de la Réunion en ont une image très positive. Pour eux, c’est un petit paradis tant par la beauté de ses paysages, l’accueil chaleureux de ses habitants que par ce mélange unique et harmonieux des cultures, ethnies et religions. Chaque année, ma mère et moi offrons les beaux calendriers et agendas de notre île à nos amis, collègues, partenaires de kung fu pour qu’ils découvrent les merveilles de la Réunion.

 
Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

J’ai juste mes savates-doigt-de pieds, un tee-shirt de la Réunion et des photos qui me suivent partout. Comme j’adore manger, j’ai des épices, de la vanille, du rhum, de la confiture de tomates, de papaye faites par mon grand-père, du sucre de canne de la Réunion dans la cuisine. Quand je n’ai pas le moral, je me fais des crêpes parfumées au rhum et à la vanille de chez nous, saupoudrées de sucre. Ou alors ma maman me cuisine des grains rouges et un carri poulet. 
 
 
 Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

La chaleur, les couchers de soleil, l’air pur, les montagnes, les poissons du lagon de Saint-Pierre, les margouillats, la nature, « bat carré » sur le front de mer, manger des bouchons, des samoussas et bonbons-piment sur la plage, les pique-niques créoles avec le zembrocal, rougail saucisses... L’art et la joie de vivre des Réunionnais, entendre parler créole me manquent aussi. 

Pouvez-vous compléter la phrase suivante : "Je ne serais pas arrivé là si…" ?

Je ne serais pas arrivée là si je n’avais pas eu le soutien, l’amour, les encouragements, la stimulation et la confiance de toute ma famille. Je ne serais pas sur le point de m’envoler pour le Costa Rica sans le soutien des Réunionnais que je tiens à remercier du fond du cœur. Les Réunionnais ont un cœur en or, leur générosité est exceptionnelle. Je m’en souviendrai toute ma vie ! Je compte bien faire honneur à notre belle île en étant une ambassadrice digne de ce nom et faire pour la Réunion autant qu’elle a fait pour moi. 


Aider Sarah grâce à la collecte : www.helloasso.com/associations/uwc%20france/collectes/sarah-a-uwc

Photo : UWC Costa Rica

United World Colleges (ou UWC) est un mouvement d’éducation comprenant 18 écoles internationales et des comités nationaux dans 130 pays. Il propose un programme sur deux ans équivalent aux deux dernières années du programme de l’enseignement secondaire, pendant lesquelles les élèves passent le Baccalauréat International (IB). UWC a l’ambition de faire de l’éducation une force afin d’unir les peuples, les nations et les cultures pour construire un monde en paix et un avenir durable.

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