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Steven Poirier, chef pâtissier sur des yachts de luxe

Publié le 23 septembre 2021

De Cilaos à la Méditerranée et l’Atlantique qu’il parcourt de long en large, Steven exerce son métier de pâtissier talentueux, formé par des pointures. Il s’est aussi spécialisé dans la sculpture sur glace. Portrait d’un Réunionnais grand voyageur.


Pouvez-vous vous présenter ?

Steven Poirier, 30 ans, pâtissier glacier de métier. Je suis actuellement chef pâtissier sur le Christina O, yacht de luxe, ancienne propriété d’un milliardaire grec puis yacht présidentiel grec, aujourd’hui appartenant à un millionnaire irlandais*. Je suis né à Annecy, après que ma mère ait suivi son mari, mais toute ma famille se trouve à Cilaos. Ma mère est de Palmiste Rouge, ma demi-soeur également.

Racontez-nous votre parcours.

Après un bac scientifique, je débuté des études de médecine à Grenoble, poussé par mes profs. Ne me plaisant pas là-bas, j’ai suivi ma cousine qui rentrait à la Réunion et c’est là que j’ai postulé pour un poste d’aide pâtissier. Ma première entreprise a été Manciet, à l’époque très réputée pour la qualité de sa pâtisserie, viennoiserie et boulangerie. Le patron, qui a lui-même travaillé plus jeune avec Gaston Lenôtre, m’a pris sous son aile et m’a transmis sa passion du métier. C’est comme ça que j’ai rapidement progressé !


J’ai aussi eu des moments difficile. Après avoir quitté Manciet pour la première fois, j’ai eu des expériences dans l’est de l’île assez mauvaises. J’ai touché le fond du gouffre mais j’ai réussi à m’en sortir et c’est cette expérience, aussi mauvaise soit-elle, qui m’a donné la rage d’avancer et d’en vouloir toujours plus. 

Et ensuite ?

J’ai fait mon compagnonnage, un tour de France à ma façon. J’ai travaillé à Annecy, Chambéry, Genève (avec un Mof glacier qui m’a appris la sculpture sur glace et qui m’a lancé dans les concours), à Paris chez Stéphane Glacier, meilleur ouvrier de France pâtissier, chez Lalos, meilleur ouvrier de France boulanger, avant de me lancer dans les croisières. Chez Ponant, compagnie de croisière de luxe, j’ai traversé l’Écosse, la Norvège, l’Islande, le Groenland, le Canada et les Etats-Unis sur un bateau type explorer de 140m et 180 passagers. Aujourd’hui, je travaille suis sur le Christina O, le yacht peut accueillir 36 passagers et compte 39 membres d’équipage. On traverse la Méditerranée de long en large.


Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

En étant mobile, on apprend beaucoup plus et plus vite les différents styles et techniques de notre métier puisqu’il y a autant de recettes et de façon de faire qu’il y a de pâtissiers. L’avantage d’être de la Réunion, c’est surtout au niveau de la mentalité ; c’est une façon d’être et de penser différente. Dans mon métier et ma vie, je croise beaucoup de monde. Les gens sont généralement froids et ne pensent qu’à eux -mêmes. Heureusement je garde contact avec la Réunion et les Réunionnais, comme le Team 974 en Ile-de-France. Ca permet de garder l’ambiance et le moral !


Quels sont vos projets ?

En France, je parcours encore les concours, notamment en viennoiserie et sculpture sur glace. Mon souhait le plus cher serait de rentrer à la Réunion, pour être auprès de ma famille. Il me faudrait trouver une bonne place dans une belle boutique, ou un patron avec un bon état d’esprit qui vise loin. Mon rêve est d’ouvrir un bar à pâtisserie - glacerie sur Saint-Pierre, mais c’est juste une envie pour l’instant. En tout cas merci pour tous les portraits de Réunionnais que vous montrez. Ca montre aux jeunes qu’on peut réussir à s’en sortir à l’extérieur pour mieux revenir plus tard !

Avec Alain Bertil au plus près de l’éruption du volcan Fagradasfjall en Islande (août 2022)

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

Quasiment tout : la famille, les amis, la cuisine au feu de bois de mon oncle à la Mare Sèche à Cilaos, la pousse, les paysages, les week-ends de repos à Cilaos… J’ai de nombreux objets de la Réunion : des marmites, tentes, t-shirts. Les vêtements, je les ai avec moi sur le bateau, le reste est chez moi !


Quel est votre regard sur la situation socio-économique de la Réunion ?

Avec l’argent et le temps gaspillé pour la route du littoral qui n’en finit plus, j’aurais le temps de faire dix fois le tour du monde ! Mais je constate qu’en pâtisserie le niveau monte sur l’île, même si le nombre de Réunionnais au plus haut niveau est limité. Il ne faut pas de jalousie dans le métier, mais de l’entraide pour faire évoluer tout le monde et représenter la Réunion au national et à l’international.


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* Le Christina O (O pour Onassis) mega-yacht de 99 mètres. Il était la propriété du milliardaire grec Aristote Onassis entre 1954 et 1975. Le navire reçoit parmi les plus prestigieux invités de l’époque tels que Maria Callas (qui s’y produit dans le salon principal), Frank Sinatra, Richard Burton et Elizabeth Taylor, Greta Garbo, le Roi Farouk Ier d’Égypte, John Fitzgerald Kennedy et sa femme Jacqueline Kennedy, Winston Churchill, Ava Gardner, Cary Grant, John Wayne, John D. Rockefeller et d’autres. Des fêtes y sont organisées. Le yacht a également été le lieu de réception de deux mariages : le prince Rainier III de Monaco et de Grace Kelly (avril 1956) ; Aristote Onassis et Jacqueline Kennedy-Onassis (au large de Skorpios).








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