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Yannick Marcade : carrière aux Antilles et au Costa Rica

Publié le 14 août 2020

Embauché par un grand groupe des Dom, il parcourt les Caraïbes en tant que Responsable administratif et financier. Il nous raconte son épopée en famille, et le lien qu’il garde avec la Réunion.

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Pouvez-vous vous présenter ?

Yannick Marcade, né en 1973 à la Réunion. Mon père était pompier et ma mère infirmière. J’ai vécu à Maperine, quartier de Sainte Marie qui a été détruit pour la nouvelle piste de l’aéroport. Puis nous avons vécu à Saint François. J’ai fait mes études jusqu’au BTS à la Réunion : à Saint Michel et au lycée Levavasseur. J’ai continué mes études à Bordeaux et à Aix en Provence. J’ai travaillé pendant un moment en métropole chez Décathlon, la Française des Jeux, et j’ai été débauché par un grand Groupe présent dans les DOM qui donne sa chance aux jeunes Domiens ayant le niveau nécessaire. J’ai donc été embauché en tant que RAF pour différentes sociétés en local.


Quel a été votre parcours ?

J’ai eu un jour l’opportunité d’être muté en Guadeloupe via ce même groupe. Cette mutation a été une expérience enrichissante, tant sur le plan personnel que professionnel. Ma famille et moi avons découvert les Antilles - Martinique, Saint Martin, Saint Barthélémy, Sainte Lucie, Marie Galante, Petite terre, les Saintes - et les USA. Marié avec trois enfants, nous avons toujours cultivé l’envie de découvrir. Mon épouse qui est mon carburant apprend à nos enfants la chose suivante : où que tu sois, ouvre tes yeux ! Respire à fonds et fais une photo avec ta mémoire… De cette façon je me suis autant imprégné de Mafate, du Maïdo, que d’Uluru en Australie, du cratère Ngorongoro en Tanzanie…


Les souvenirs, il y en a plein : les sourires des enfants, les plages immenses, la récompense de la nature, partir trois jours en voilier en famille, nager avec les dauphins, les baleines… Ne voulant pas reproduire ce que nous connaissions à la Réunion, nous avons pris le temps de nous découvrir des nouvelles passions. Pour ma part, j’ai rangé les chaussures de randonnée pour découvrir la pêche et la mer. Les Antilles sont un paradis pour la navigation et j’ai redécouvert en moi cette fibre de nos ancêtres qui vivaient proche de la mer ! J’ai donc passé tous les permis et arpenté en voilier ou en bateau à moteur les îles des Caraïbes. J’ai été le marin se levant à trois heures du matin rêvant du plus gros thon, du plus beau marlin… Je rentrais des heures plus tard les yeux plissés par le sel et la peau brûlée par le soleil, mais que c’était bien...


Parlez-nous du Costa Rica.

Le Costa Rica ressemble beaucoup à la Réunion, avec ses micro-climats, ses volcans, ses cascades, ses charrettes bœufs, ses petites cases, ses barques de pêche, ses robes traditionnelles, le galopinto du matin (riz chauffé)... Ici les plats sont à base de riz, haricots et une viande… Le plat est un casado, on pourrait croire à un bon repas créole… Le plus fou c’est qu’ils produisent ici le café Boubon Pointu. Pourquoi ? Et bien parce qu’il est le meilleur te répondra le Tico, propriétaire de sa Finca (habitation sur la plantation, bizarre comme un petit quelque chose de chez nous… )


Le pays est petit mais incroyable… Le Costa Rica détient 8% de la biodiversité mondiale et c’est l’un des seuls pays au monde à avoir un bilan carbone positif… 95% de l’énergie est propre… Le pays est connu pour sa faune et flore incroyable. Il est courant de voir des singes, des perroquets, des serpents… C’est un des seuls pays au monde sans armée. Depuis la suppression de l’armée, le budget est voté chaque année et il est attribué à la santé ou à l’éducation. Résultat : moins d’illettrés ici et un niveau de soins comparable à la France. Mais tout cela est au prix d’une durée de travail de 48 heures par semaine, avec deux semaines de congé payé par an, pas d’ASSEDIC, pas de chômage… Bref tout n’est pas facile pour la population locale.


Qu’est ce qui vous manque de la Réunion ?

A quoi bon chercher à retrouver la Réunion ailleurs alors qu’il y a tant de choses à découvrir. Oui, nous sommes champions du monde pour la randonnée, le massalé, la richesse des couleurs. Mais mon Dieu que c’est divin un bon lambi, une bonne langouste de Marie Galante, un bon « tourment d’amour » des Saintes, un bon rhum de la Martinique, un bon burger de New york… Mais je dois avouer que beaucoup de choses me manquent : la douceur du repas dominical en famille, la saveur inimitable d’un bon pain bouchon gratiné, le glouglou gourmand d’une Dodo trop fraîche, le péfpef du carry sur feu de bois… Nous revenons de temps en temps à la Réunion, la limite étant encore et toujours le prix des billets d’avions.


Quels sont vos projets ?

Notre projet est de continuer à découvrir le monde, la tête pleine de souvenirs de voyages mais les cartons remplis de l’essentiel de notre culture : le pilon de la Réunion, une caraille, les marmites, le curcuma de chez nous. Comme tout bon créole, je sais cuisiner, faire mes samoussas, etc. Le luxe dans la vie c’est d’avoir le choix. Ma grand-mère disait : « Allé a ou mon enfant, de toute façon le sang y cause ça » . Je suis comme la tortue de Kélonia, un jour je reviendrai la tête pleine de souvenirs et dans la valise des nouveaux outils de la vie.


Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

Rien n’aurait été possible sans notre force : le savoir vivre ensemble de la Réunion, la richesse culturelle, sont des armes qui nous permettent d’accoster des pays magnifiques et lointains… L’inconvénient, c’est le manque de la famille, les amis que nous avons laissé. Mais la balance s’équilibre avec les nouveaux amis, les nouvelles découvertes.


Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Même si je pense qu’il faut absolument s’ouvrir aux autres, nous avons découvert aux Antilles une petite communauté réunionnaise avec qui nous partageons des moments très sympas… J’ai eu quelques amis comme Frédéric Sautron, plus jeune commandant de Gendarmerie, il est maintenant dans le corps préfectoral à Tahiti. J’ai même rencontré un Réunionnais au Costa Rica ; il vit ici depuis 30 ans et il est marié avec une « Tica » (Costaricienne).


Quelle comparaison faîtes-vous entre la situation à la Réunion et là où vous vivez ?

Bien que Domiens, les Antillais ont une approche bien différente de nous Réunionnais sur des sujets liés à l’histoire. Par ailleurs, la situation économique de la Réunion est très dynamique par rapport à celle des Antilles mais ici, en Amérique latine, les gens n’ont pas le choix : ils créent, ils imaginent, ils n’attendent pas tout de l’état providence. Aujourd’hui le plus navrant reste immobilisme de certains sujets : la route en corniche, la bataille pour la Mairie de Saint Paul, du Tampon, le sujet requin… Nos limites restent les mêmes et l’immobilisme reste le fonds de commerce de certains dirigeants.


Votre regard sur la Réunion a-t-il changé ?

Mon image sur la Réunion aujourd’hui est simple : un département où règne le bon vivre, la bonne cuisine, capitale mondiale du parapente, de la randonnée… Malheureusement c’est toujours la même chose pour les points négatifs.

Pour moi l’avenir économique de notre île reste le tourisme, l’accueil. Tout le monde trouve cela normal de manger un bon carry dans un gîte à Mafate, mais où est l’hôtel de charme à Sainte Marie, La Montagne, Saint François, où est le guide anglophone vous amenant sur les sentiers, pouvant vous faire découvrir les cases magnifique de la rue de Paris… Où est l’aménagement permettant au touriste ne connaissant que l’autoroute de se poser au voile de la marié en buvant un verre sans avoir à traverser cette route, où est la visite de la production de lentilles, etc. ?


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