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Hubert Teyssèdre, chercheur à Grenoble, prix Talent de l’Outre-mer

Publié le 12 février 2014

Originaire de Saint-Denis, Hubert a suivi les classes prépa du lycée Leconte de Lisle avant de devenir Agrégé de Mécanique, titulaire d’un Master 2 de Mécanique de l’École Nationale Supérieure de Cachan. A 28 ans, il vient de soutenir un Doctorat au Commissariat à l’Énergie Atomique de Grenoble.


Hubert Teyssèdre

D’où êtes-vous à la Réunion ?

Je suis originaire de Saint Denis. Mon père est enseignant et ma mère comptable, et sont tous les deux installés à la Réunion. Pierre, mon petit frère, est maintenant installé au Canada et Margaux, ma petite sœur, vit toujours sur l’île. J’ai une formation de mécanicien (quatre ans à Paris) et viens de soutenir mon doctorat (trois ans à Grenoble) en mécanique des matériaux. Je suis actuellement en recherche d’emploi à Grenoble.

Quel a été votre parcours de mobilité ?

Après avoir fait les classes préparatoires au lycée Leconte de Lisle, j’ai intégré l’École Nationale Supérieure de Cachan à Paris. J’ai eu l’occasion de voyager en Pologne, en Thaïlande et en Afrique du Sud dans le cadre de mes études. Les quatre mois passés en Afrique du Sud à Richards Bay pour mon stage de Master 1 ont été une expérience humaine enrichissante.

Avez-vous ressenti des avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion ?

En Afrique du Sud, j’ai eu l’occasion de rencontrer des gens de plusieurs ethnies, dans l’entreprise ou lors des activités sportives. Étant un créole à la peau brune, je n’étais pas un noir, pas un blanc, j’étais européen mais de l’Océan Indien. Ce profil est très certainement ce qui m’a permis de m’intégrer assez facilement à tous les groupes et m’a permis de partager un peu le quotidien de chacun. J’ai appris ce qu’était le racisme. Si chez nous on apprend les conflits sociaux dans les livres, il est difficile de mesurer la crainte qui règne dans ce type de société sans l’avoir vécue. Le clivage au sein même du peuple sud-africain est quelque chose qui m’a beaucoup marqué, mais je garde un très bon souvenir de mon séjour là-bas et j’y retournerais volontiers.

Ce voyage a-t-il changé votre vision ?

C’est le genre d’expérience qui permet d’apprécier un endroit comme l’île de la Réunion, un lieu également riche en diversités mais très stable. Ce qui me paraissait normal avant mon départ est devenu précieux, et d’une manière plus générale l’éloignement de la Réunion m’a permis d’apprécier d’autant plus les particularités de l’île. La mobilité me permet de mieux apprécier ce que j’ai vécu à la Réunion mais également de voir ce qu’il manque à notre île. Je n’ai pas d’exemple concret, ce sont simplement des sentiments que j’ai lorsque je visite d’autres pays.

Hubert Teyssedre, accompagné par trois autres Talents réunionnais lors de la remise des prix Talents de l’outre-mer en 2013 au Palais de l’Iena (Aurore Vaitinadapoule, Yola Minatchy, et Olivia Grondin).

Quels objets de la Réunion gardez-vous dans vos valises ?

Mon cuissard qui a fait le Mini Raid il y a 12 ans... et qui m’aura accompagné par tous les temps et lors de la quasi totalité des sorties en montagne, à vélo ou à pied ! Il n’est pas encore trop usé et j’espère qu’il tiendra jusqu’à ce que je participe au Grand Raid. Plus sérieusement, je suis parti avec des photos de ma famille, photos qui ont toujours été affichées dans ma chambre et qui me rappellent d’où je viens.

Quels sont vos projets ?

Question difficile. J’aimerais continuer dans la recherche dans le public mais il est difficile aujourd’hui d’obtenir un poste permanent dans les instituts ou les centres de recherche. Je n’écarte donc pas les offres pour la recherche dans l’industrie. Je compte rester encore quelques années en métropole pour consolider mon expérience professionnelle et rentrerai à la Réunion plus tard si possible.

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Oui ! Essentiellement des personnes que je connaissais avant de quitter l’île. Malgré qu’on soit éparpillé un peu partout en métropole, voire sur le globe, on arrive à se voir. Les personnes que je revois le plus sont les amis de prépa, Ramon, Estelle, Morgane, Jérem, Sylvie, Julien, Vincent, Laurent, Perrine, Marion et Loïc. Certains sont récemment retournés à la Réunion pour travailler, d’autres ont commencé une vie de famille...

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

Ma famille avant tout. J’ai très tôt été dans ma bulle avec les études et distant de mon frère et ma sœur. Je ne les ai pas beaucoup vu grandir. Ce n’est pas simple de constater que je suis un peu passé à côté de mon rôle de grand frère après toutes ces années. J’ai un petit frère qui a commencé à construire une famille et une petite sœur qui semble s’épanouir dans le monde du rallye automobile. La distance n’aide pas mais j’arrive plus ou moins à rattraper mon retard, en tout cas j’essaie.


Hubert Teyssèdre

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

La Réunion c’est une île avec des forêts tropicales et des "grosses feuilles" ? C’est la toute première question sur l’île que j’ai eue à la soirée d’intégration à l’école. Ça me fait encore sourire, mais cela est très anecdotique. En général les gens connaissent plus ou moins l’île et sa situation. Alors ils se permettent de plaisanter sur les clichés les plus classiques, à savoir si l’on a de l’électricité ou des voitures. On m’appelle parfois l’africain, ce qui est toujours mieux, vous en conviendrez, que de me dire "ah, tu es de la Réunion, des Antilles c’est ça ?". Tout cela me fait évidemment rire et, à l’inverse, à mon arrivée à Paris je n’étais pas capable de placer tous les départements sur une carte, donc c’est de bonne guerre. Et après avoir fait découvrir aux proches les spécialités de notre île comme la vanille Bourbon, les ananas Victoria, les rougails et les carry, je pense qu’ils en retiennent une image très positive si ce n’est appétissante. Les actualités de ces dernières années avec les attaques de requins ne m’ont pas forcément aider à encourager les collègues à s’y rendre. Heureusement l’intérieur de l’île regorge d’exotisme, ce qui se vend encore très bien.

Vous même, quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

Marmaille, la fré i cok oui ! J’aime beaucoup la région grenobloise. En été les montagnes me rappellent un peu la Réunion, en plus grand, et en oubliant l’océan. Pour moi c’est un parc inépuisable d’excursions. En hiver les mêmes montagnes n’ont pas le même visage et on découvre un autre environnement très reposant. Découvrir cette région n’aurait pas été possible sans les amis que j’ai rencontrés ici à Grenoble. On n’a pas la même culture mais on s’entend très bien, tellement qu’on en est arrivé à un mariage savoureux entre nos régions : le rougail saucisse avec les diots de Savoie ! Avec eux j’ai découvert un peu plus ce qu’était "l’esprit montagne". Le respect de la nature et la montagne est une corde sensible dans la région et c’est très agréable de pouvoir traverser des massifs en s’arrêtant dans des refuges non gardés où les gens font preuve d’un civisme exemplaire. Bref, ce n’est pas chez moi, mais je m’y sens bien.

Que pensez-vous du site reunionnaisdumonde.com ?

Je n’y suis inscrit que depuis peu, mais je trouve que c’est un outil remarquable pour rassembler les Réunionnais !

Vous habitez en Isère ? Inscrivez vous à l’alerte Rhône-Alpes ici !


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