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Gaël Fontaine, 27 ans, parcourt l’Australie depuis un an et trois mois

Publié le 26 avril 2009

N’ayant connu que la Réunion à la fin de ses études (double master en finance et marketing), Gaël a pris son sac à dos un beau jour pour découvrir l’Australie, ses quelques économies en poche. 17 000 km plus tard, le voyage se prolonge… Entre rencontres internationales et petits boulots, prolongations de visa et camping le long des routes, c’est une véritable épopée à travers le pays des kangourous qu’il nous raconte.

Gael Fontaine
Attention aux animaux ! Un autre conseil pour ceux qui conduisent en Australie : maintenir une attention constante quelque soit la distance.

D’où êtes-vous à la Réunion ?

Né de parents créoles originaires du sud, j’ai grandi sur Saint-Denis sans avoir manqué de rien pour étudier. Mes parents ont toujours tout fait pour soutenir la scolarité de leurs enfants, même si cela s’est un peu compliqué financièrement lorsque mes deux sœurs furent amenées, l’une après l’autre, à poursuivre leurs études en métropole. Chose essentielle : mes parents nous ont appris à nous responsabiliser. C’est dans cet esprit, que j’ai financé par le travail, la majeure partie des mes études ainsi que mon voyage en Australie.

Racontez-nous votre parcours.

Après un BAC ES spécialité Math en 1999, j’ai passé une Maîtrise AES obtenue quatre ans plus tard à l’Université de la Réunion. Ayant toujours été attiré par le métier d’enseignant, j’ai tenté, deux années de suite et sans succès, le concours PE. N’ayant jamais connu l’échec jusque là, il me fallait absolument rebondir et effacer ces deux années noires qui figurent comme des trous dans mon CV.

Qu’avez-vous fait ?

Je me suis orienté vers un Master professionnalisant en Méthodes Quantitatives et Modélisation pour l’Entreprise (MQME, rebaptisé depuis Master Banque-Finance). C’est à la suite d’un stage long dans une banque que j’ai compris que j’affectionnais particulièrement le marketing. Ce Master MQME en poche, j’ai enchainé sur un Master Professionnalisant en Management et Marketing au sein de l’IAE de la Réunion. J’ai obtenu ce Master après un nouveau stage long dans le service Marketing d’une entreprise clé du secteur de l’approvisionnement et de la distribution à la Réunion.

Dans quelles conditions avez-vous été amené à quitter l’île ?

N’ayant connu que cette petite île, mon île, à l’issue de mes études (double master en finance et marketing), l’envie de "voir ailleurs" devenait pressante. J’avais 26 ans, quelques économies en poche et aucune obligation quelconque : c’était le moment ou jamais ! Par ailleurs, n’ayant jamais été brillant en anglais à l’école, je caressais le doux rêve de devenir « fluent in English ». C’est ainsi qu’après mon second Master, j’ai mis en place ce projet d’expatriation d’un an au pays des kangourous avec total autofinancement. Pour compléter mes économies, j’ai travaillé quelques mois au service Marketing d’une banque que je connaissais bien pour y avoir été stagiaire. Plus la date de mon départ approchait, plus l’excitation montait d’un cran. J’avais l’impression de redevenir un gamin...un gamin qui n’a jamais quitté son île !

Réunionnais en Australie
Traversée de Nullarbor Plain (désert qui s’étire sur 2700km), la plus interminable des lignes droites en Australie : 146 km sans bouger le volant, sous un soleil de plomb et sans un arbre sur le bas-côté. Un même conseil est donné à tous ceux qui osent traverser ce désert : éviter de tomber en panne. Un peu plus loin, arrivée à Coober Pedy, une ville quasi désertique : pas moins de 44°C à l’ombre et je vous laisse imaginer ce que c’est au soleil (plus de 50°C selon mon défunt thermomètre qui n’a pu supporter cette chaleur). Imaginez une tranche de pain qui se toaste d’elle même (à l’ombre) en 1 minute... Il fait tellement chaud dans cette ville que les habitants vivent sous terre !

Racontez-nous vos premiers pas.

Visa en poche, je suis arrivé en territoire australien (Perth) le 1er décembre 2007. Accueilli par une famille australienne, j’ai débuté par une remise à niveau d’anglais durant trois mois. Rien de mieux que de l’anglais 24h/24 pour progresser. Il y avait des jeunes des quatre coins du monde ! J’ai en mémoire des rencontres inoubliables avec des Japonais, des Allemands, des Suisses, des Brésiliens, des Colombiens, des Coréens, Vénézuéliens et j’en passe. Des pique-niques à 13 nationalités dans le magnifique Kings Park de Perth ; des barbecues arrosés sur Scarborough Beach avec tout autant de nationalités différentes. La maîtrise de l’anglais était alors notre objectif à tous.

Et ensuite ?

J’ai trouvé du travail dans un restaurant, dans lequel je suis resté trois mois et demi. Une expérience enrichissante. C’est dans cet univers que j’ai rencontré de jeunes Australiens (16-24 ans) qui travaillaient pour payer leurs études. Entre temps, j’avais déménagé pour une collocation avec deux jeunes Australiens dans la périphérie de Perth. Sans m’en rendre compte, je m’insérais peu à peu dans la société australienne, et mon anglais ne cessait de progresser.

Par la suite, je me suis acheté ma toute première voiture (d’occasion bien-sûr !) : direction Margaret River, petite ville de 9 000 habitants au sud de Perth dans une très importante région viticole, dans laquelle j’ai passé les quelques mois qui me restaient à travailler dans les vignes avec d’autres jeunes étrangers venus de tous pays. Les uns venus pour vivre une expérience humaine tout en gagnant assez d’argent pour continuer leur voyage et d’autres venus juste effectuer le nombre de jours de travail obligatoire (88 jours) dans l’industrie primaire pour pouvoir renouveler leur visa (et oui : l’Australie est en manque de main d’œuvre). En ce qui me concerne, c’était les deux objectifs à la fois !

C’était reparti pour une deuxième année en Australie.

De nouvelles économies en poche, je pouvais songer à un second visa... synonyme d’une seconde année en Australie. Mais cette seconde année, je voulais en faire quelque chose de plus pimenté. Après un bref retour dans l’île pour les fêtes de fin d’années, j’ai repris aussitôt l’avion pour l’Australie début janvier. Objectif : le « tour » de l’Australie en voiture avec tout le matériel de camping.

Australie en voiture
Ayers Rock, plus connu sous le nom d’Uluru : un énorme monolyte comme posé dans un désert. On oublie que ce monolyte est un élément sacré de la culture aborigène. On se sent tellement « petit » face à cette roche capable de soulever des émotions.

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Depuis maintenant deux mois, je campe ici et là en Australie : près de la plage, de la route, dans la forêt, dans les parcs nationaux, ou tout simplement dans les « camping/caravan park ». Camper reste la solution la moins onéreuse et « fun » pour découvrir ce pays, immense comme l’Europe. C’est ainsi que sur la route, j’ai découvert que je n’étais pas le seul à tenter l’aventure de cette manière ! Impossible de tout raconter de ce voyage... Après plus de 17 000 km m’amenant d’Ouest en Est en passant par le Sud, la magnifique Tasmanie, le Centre et le Nord-Est, me voilà à Adelaïde que je visite avant de rejoindre la Barossa Valley, qui selon les Australiens serait la région où l’on produit le meilleur vin d’Australie. Inutile de vous cacher que j’essaierai de m’en faire ma propre idée.

Quels sont vos projets ?

A court terme, voir tout ce qu’il me sera possible de voir. A moyen terme, me poser dans l’Est de l’Australie et y trouver du travail pour pouvoir réaliser d’autres petits rêves. Je garde cependant à l’esprit le contexte difficile né de la crise financière, devenue crise économique avec toutes les conséquences que nous connaissons en matière d’emploi. Ce pays était pourtant prospère quelques mois auparavant, avec une économie dite "solide" et voilà maintenant poindre la « récession ».

Qu’est-ce qui vous manque de la Réunion ?

Sans l’ombre d’une hésitation : mon grand lit. Cela fait quasiment trois mois que je dors dans une tente et le matelas reste de loin la plus belle invention du monde ! J’ai récemment revu sur Melbourne un couple de Réunionnais que j’avais rencontré à Perth et qui vivent actuellement plus ou moins la même expérience que moi.

Gael Fontaine
Magnifique ville cosmopolite qu’est Sydney avec son impressionnant Opera House et son Harbour Bridge. Malheureusement, le coût de la vie ne plaide pas en sa faveur.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

A mon sens, la situation sociale à la Réunion n’a cessé de progresser ces dernières années, comblant peu à peu le retard sur la métropole, mais il en est autrement de la situation économique. Cette dernière reste liée à l’étroitesse du marché local et au manque de compétitivité par rapport à l’environnement régional (salaire, langue, réglementation, fiscalité, etc.). Dans ce contexte, toute implantation et/ou lancement d’activités ou filière d’importance se heurte aux perspectives de profit : le retour sur investissement étant une des conditions majeures à l’investissement.

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

95% des Australiens ne connaissent pas la Réunion ! Et, il est souvent bien plus facile de se présenter en tant que Français qu’en tant que Réunionnais. En exagérant un peu, les 5% restant sont des surfeurs qui ont entendu parler de l’île, mais ne sauraient pas la placer sur un planisphère. A contrario 99% des Australiens connaissent l’île Maurice et savent la placer sur une carte.

Vous même, quel est votre regard sur la région où vous vivez et ses habitants ?

Les Australiens (hors Aborigènes) vivent à l’occidentale, donc nos modes de vie sont assez similaires. Ce qui reste frappant ici, c’est la « fierté » qu’ils ont d’être australiens. Il n’est pas rare de voir un Australien avec la croix du Sud (Southern Cross : emblème aussie) tatouée sur le corps, ou un fanion Aussie accroché à une voiture ou au toit d’une maison. Cette trop grande fierté leur fait parfois oublier qu’il n’y a pas qu’eux, un peu comme les Américains. Mais mon regard reste globalement positif !

Que pensez-vous du site www.reunionnaisdumonde.com ?

L’initiative d’un tel site est remarquable, car il montre que les Réunionnais peuvent réussir hors de leur terre natale. Je suis quasiment convaincu qu’il y a plus de Réunionnais hors de la Réunion que d’Australiens hors d’Australie.

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