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VERGES Jacques

Publié le 1er janvier 2014


TECHER Jacques Verges

Avocat, né le 20 avril 1924 à Savannakhet (actuel Laos) ou officiellement le 5 mars 1925 à Ubon (actuelle Thaïlande) — le biographe Bernard Violet a écrit que cet acte de naissance serait un faux, son père l’ayant vieilli d’un an, par artifice, pour mettre de l’ordre dans sa vie. Fils de Raymond Vergès, tour à tour consul en Thaïlande, médecin au Laos puis à la Réunion et de Pham Ti Khang, une institutrice annamite emportée très tôt par une crise de paludisme quand il avait 3 ans. Divorcé. Ti’noms : Infrarouge (couleur plus forte que le rouge) et Zara (en raison de ses références à son livre de chevet Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche. Pseudonymes : Mansour el Rifi et Domitille (articles dans le périodique Révolution, 1963). [Filiation : Vergès serait un nom Catalan et les ancêtres de son arrière grand-père viendraient de la région de Prades, dans le Conflent (Espagne) où il existerait un village fortifié du XIIe siècle qui s’appellerait Vergès. Raymond, son père, diplomate, a dirigé les syndicats CGT de l’île, lancé la fédération réunionnaise du Parti Communiste Français, et s’est fait élire député de la Réunion. Reconnu comme le père de la départementalisation]. Il arrive à la Réunion à l’âge de 3 ans et il reste jusqu’à 17 ans, fréquentant le lycée Leconte de Lisle à Saint-Denis jusqu’au baccalauréat philo où il a comme camarade de classe Raymond Barre et pour passion le chahut. Il effectue ensuite une première et une seconde année de droit avant de s’engager dans les Forces Françaises Libres début 1943. Avec son frère Paul, il rejoint Londres par Madagascar et l’Afrique du Sud. On le retrouve à Camberley, dans la banlieue de la capitale anglaise où il fait un entraînement militaire, puis il part en Algérie et au Maroc pour terminer son entraînement et devenir sergent. Ensuite on le dirige vers l’Italie, la France, et l’Allemagne occupée comme artilleur sous-officier. « De cette guerre, dit-il, je conserve un souvenir très agréable. Il y avait des risques, mais enfin c’était une très belle période. » En 1944, il est démobilisé avec le grade de sergent et de retour à Paris pour passer une licence d’Histoire à la Sorbonne en 1945. Il passe un peu plus tard sa licence de droit (1953-1954), prête serment d’avocat (1955) et réussit la prouesse d’être nommé un an plus tard premier Secrétaire de la conférence de stage. Il a rédigé deux mémoires, l’un sur l’abolition de 716 l’esclavage à la Réunion, le second sur un dieu égyptien. En marge de ses études universitaires, il apprend en 1954, à l’Ecole des langues orientales à Paris, le hindi, la première langue de l’Inde, mais aussi celle des minorités hindoues de la Réunion, de l’île Maurice et de Madagascar, et également le malgache Avocat depuis 1955, suspendu un an en audience disciplinaire pour avoir provoqué en duel un officier français siégeant au tribunal militaire de Reuilly qui assurait les fonctions de commissaire du gouvernement. Directeur du département Afrique au ministère algérien des Affaires étrangères un mois après la proclamation de l’indépendance de l’Algérie et la prise du pouvoir par Ben Bella (1962-1963). Il crée à Paris l’hebdomadaire Révolution africaine (1963) qui deviendra très vite la tribune de la Chine communiste avant de disparaître après dix-huit numéros et laisser la place à Révolution, une publication financée cette fois par Mao Tsétoung mais interdite sur l’ensemble du territoire français. Dans le premier numéro, on retrouve le premier texte prônant la lutte armée en Europe (décembre 1963) et les signatures de Che Guevara, du général Giap, d’Amilcar Cabral, leader indépendantiste de Guinée-Bissau, et de Régis Debray. Après le coup d’Etat en Algérie de Harri Boumedienne renversant Ben Bella, il s’inscrit au Barreau d’Alger (1965) avant d’être expulsé d’Algérie (1969). Retour à Paris où il se réinscrit au Barreau de Paris avant de disparaître de la carte du monde le 7 mars 1970 pour près de dix années. Il réapparaît à Paris le 12 mars 1979 et reprend sa profession d’avocat en défendant Moïse Tshombé, alors homme fort du Katanga et du Congo, et enfin Magdalena Kopp et Bruno Bréguet (1982), deux terroristes d’extrême-gauche amis de Carlos. Il assure également le procès de Klaus Barbie (1987), officier SS jugé à Lyon et plaidera, avec la collaboration de Marie-Annick Ramassamy, fille d’Albert, ancien sénateur de la Réunion, pour Ilich Ramírez Sánchez dit Carlos, condamné par la justice française à la réclusion criminelle à perpétuité pour des actes terroristes (1994-1995). Sur la foi de documents de la Stasi, il fait alors l’objet en 1994 d’une enquête de l’Ordre des Avocats en raison des soupçons qui pèsent sur lui pour avoir tenté de marchander au nom de Carlos un verdict de clémence avec le gouvernement socialiste de Pierre Mauroy. C’est enfin la défense de Louise-Yvonne Casetta, la trésorière occulte du RPR, de Slobodan Milosevic, l’ex-dictateur de la Yougoslavie, le jardinier Omar Raddad, les familles des deux diplomates enlevés, Marcel Fontaine et Marcel Carton, le capitaine Barril, le procès en appel du préfet Bonnet pour l’affaire des paillotes en Corse et l’affaire des écoutes téléphoniques de l’Elysée. À la Réunion : En 1984, à la Réunion, il plaide pour le commerçant Jacob Gangate qui affirmait avoir été torturé par des policiers et des gendarmes en 1983, à la suite de l’affaires des poseurs de bombes anti-CMRR. Autre affaire, autre plaidoierie pour le maire de Sainte-Marie, le docteur Axel Kichenin, inculpé de détournement de fonds. Il est d’autre part appelé en renfort en 1985 pour défendre le pompiste Paul Ample inculpé d’escroquerie aux bons d’essence détaxée rachetés aux pêcheurs de la place. En 1986, il plaide en appel dans le procès de militants du PCR condamnés après des incidents lors de l’élection cantonale de Saint-André, en août 1985. Il prend la défense de Camille Sudre à la Réunion auquel on a confisqué l’antenne de Radio Freedom à la suite des émeutes du Chaudron en 1991. Enfin, en 1996, il défend Eric Boyer, président du Conseil général, dans une affaire de favoritisme sur des marchés publics On dit de son parcours politique qu’il a été gaulliste, stalinien, tiers-mondiste, et il ne voterait plus depuis longtemps. Il a adhéré et milité au Parti Communiste Français (PCF) en 1946, au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Chef de file de l’Association des étudiants de la Réunion à Paris, il parvient à prendre le contrôle de l’hôtel mis à leur disposition par le département de la Réunion, rue Saint-Sulpice, le squatte et le transforme en base d’action anti-colonialiste en créant le “Comité de Liaison des Associations d’Etudiants Coloniaux” regroupant des jeunes de toutes les colonies françaises et bientôt pourvu du journal Etudiants anticolonialistes. C’est cette association qui le porte comme Secrétaire de l’Union Internationale des Etudiants dont le siège était à Prague 717 (Tchécoslovaquie), nommé responsable du secteur anticolonialiste, chargé d’entretenir des contacts avec les nationalistes du tiers-monde et notamment l’Association des étudiants musulmans nord-africains, l’Association des étudiants d’origine malgache, la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France ou encore l’Union des étudiants réunionnais en France (1951-1954). C’est l’époque du stalinisme, des grands procès, celle de « l’Aveu » magnifiquement porté à l’écran par Yves Montand, mais également la période de l’agitation révolutionnaire parmi les étudiants coloniaux. Il participe en tant qu’élève à l’Ecole coloniale du PCF (1951) et sera membre de la cellule communiste du Palais de Justice de Paris (1955). Ambassadeur du Parti Communiste Français dans les pays frères, il quitte le Parti suite au vote des pouvoirs spéciaux en Algérie, estimant que « sa politique coloniale est trop timorée » (1957). Il rallie le FLN et constitue le « fameux » collectif des avocats du FLN afin de défendre notamment la poseuse de bombe Djamila Bouhired qu’il épouse en secondes noces en 1965 en se convertissant à l’Islam (il se prénomme alors Mansour) et prendre la nationalité algérienne un peu plus tard. Son immeuble avenue de Villiers à Paris est alors plastiqué par l’Organisation de l’Armée Secrète dite OAS (octobre 1961). Il disparaît en 1970 en abandonnant pour près de dix ans son métier, une femme et trois enfants. Le biographe Bernard Violet évoque une affaire de gros sous au Katanga et à en croire l’auteur du “Réseau Curiel ou la subversion humanitaire”, Roland Gaucher, il s’agirait d’une affaire de fausse monnaie. Mais pour son confrère et compatriote Thierry Jean-Pierre, cette fuite en avant en Asie serait celle d’un agent des services secrets chinois. Après les émeutes de la Réunion en 1991 en marge de la saisie des émetteurs de la radio privée Free Dom de Camille Sudre, il appelle le « peuple créole » à se mobiliser contre la « répression coloniale » en menaçant de procès ceux qui voudraient voir la main du Parti communiste réunionnais de son frère Paul, dans ces désordres. Livres (sélection) : Pour Djamila Bouhired (1957). De la stratégie judiciaire (1969). L’Agenda (épuisé) en 1979. Le salaud lumineux (1990). Intelligence avec l’ennemi, conversations avec Jean-Louis Remilleux (1994). J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans (1998), ouvrage dans lequel il rend hommage à Jacques Isorni et Jean-Louis Tixier-Vignancour. Je défends Barbie (1988). Beauté du crime (1989). Le suicide de la France, avec Bernard Debré. Avocat du Diable, avocat de Dieu, avec Alain de Morandais (2001). Jacques Verges - Noir silence et Blancs mensonges (2001). Omar m’a tuer (2001). Dictionnaire amoureux de la Justice (2002). Les erreurs judiciaires (2002). En association avec le professeur Bernard Debré, De la mauvaise conscience en général et de l’Afrique en particulier (2003). Justice pour le peuple serbe (2003). La démocratie à visage obscène , le vrai catéchisme de George W. Bush (2004). Jacqies Vergès, l’anticolonialiste (2005). Malheur aux pauvres (2006). Que mes guerres étaient belles ! (2007). Avocat du diable, avocat de Dieu (2008). À lire : Vergès le maître de l’ombre, par Bernard Violet (2000).

Autres

On dit qu’il a été le propriétaire (à moins que ça soit son épouse) du restaurant Le Requin Chagrin, « le restaurant réunionnais de Paris », place de la Contrescarpe à Paris Vème (1964) Il se serait converti à l’Islam au Maroc devant un dignitaire musulman (1963) Membre de l’Association pour le français libre qui s’opposait à la réforme Druon (1991). Membre du comité de parrainage de l’Association des Amis d’Henri Béraud présidé par Francis Bergeron Interprète de la pièce “Serial Plaideur”, dont il est l’auteur, au théâtre parisien de la Madeleine à Paris et à l’île de la Réunion (septembre 2008). Prises de parole : « Le véritable responsable des tortures en Algérie n’est en aucun cas Le Pen, mais bien le pouvoir politique d’alors. Si des militaires pratiquaient la violence en Algérie, ils le faisaient dans un local et avec les moyens fournis par le gouvernement français qui avait créé le cadre institutionnel pour cela. S’il y a un responsable, ce n’est pas Le Pen, mais bien un certain François Mitterrand, tour à tour ministre de l’Intérieur et garde des Sceaux, qui aurait eu son mot à dire pour tout arrêter » (Le Figaro Magazine, 23 février 1985). « Je suis un être entièrement libre et pas seulement 718 vis-à-vis des partis : Je ne suis pas franc-maçon, je n’appartiens pas à SOS Racisme, je ne suis pas membre de la Ligue des droits de l’homme et je ne signe aucune pétition habituelle pour les femmes battues ou contre le sida à San Francisco » (Le salaud lumineux, 1990). « Disraeli disait qu’il y a deux types d’hommes, le gentlemen qui obéit aux usages de son club, et l’aventurier qui obéit aux caprices de son coeur. Je suis un aventurier, je n’ai jamais eu d’envie de carrière. Il faut faire ce qu’on a envie de faire, à l’ébahissement des gens »,(Libération, 30 octobre 2002). « La politique est devenue parasitaire. On ne réforme plus. On rackette. L’homme politique a même dû inventer un mot pour mieux marquer son territoire : “la société civile” » (La Une, janvier 1992).

Source : Jérôme l’archiviste - Extrait de l’ouvrage Célébrités de la Réunion paru en 2009, basé sur plus de 50 000 documents et archives retraçant quarante années de la vie réunionnaise.

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