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Xavier How-Choong, étudiant en MBA à Singapour

Publié le 10 mars 2016

Multi diplômé en sciences et commerce international, Xavier a repris des études à 30 ans dans une des meilleurs écoles de commerce du monde (INSEAD). Ce Saint-Pierrois, qui se destine à l’industrie des énergies renouvelables ou des services environnementaux, n’envisage un retour à la Réunion qu’à certaines conditions.


CV Express :

2003 : Bac scientifique au lycée Saint-Charles de Saint-Pierre
2003-2008 : Master à l’Institut national des Sciences appliquées de Lyon – Stage en Chine
2008–2010 : Master spécialisé Strategie et Developpement d’Affaires Internationales (Centrale Paris – EM Lyon)
2010-2015 : Amadeus IT Group (Londres, Dubai)
2016 : MBA à l’INSEAD Singapour

Pouvez-vous vous présenter ?

J’ai 30 ans et suis diplômé d’une école d’ingénieur lyonnaise, l’INSA. Après cinq années de travail, j’ai intégré début 2016 une école de commerce, l’INSEAD, afin de préparer un MBA. (l’INSEAD est classée parmi les premières écoles de commerce mondiales aux côtés d’HEC, Harvard..) J’ai commencé ce cursus à Singapour sur le campus Asie de l’école.

Racontez-nous votre parcours.

Né à la Réunion, j’ai grandi dans le sud de l’île et j’ai passé la plus grande partie de mon enfance à Saint Pierre. Avant cela, ma famille vivait à la Petite-Ile où mon père avait repris l’usine d’huile essentielle de vétiver créée par ses parents. Après un bac au lycée Saint-Charles, je suis allé en métropole comme beaucoup de Réunionnais souhaitant poursuivre des études supérieures. J’ai commencé à travailler en 2010 à Londres dans les services IT pour les compagnies aériennes. En 2013, mon employeur cherchait à se renforcer dans le golfe et m’a offert une mutation à Dubai où je suis resté deux ans. Aujourd’hui je suis à Singapour pour mes études et je ne suis pas encore fixé sur ma future destination.

A quoi ressemble votre quotidien ?

Singapour est une ville très dynamique et très internationale. C’est un mélange intéressant de trois peuples : malais, indien et chinois. Quant on pense que le pays n’a que 50 ans, son développement est remarquable ! Les gens que je côtoie au quotidien sont les étudiants de l’INSEAD, ils forment probablement la population la plus diverse et la plus unie que je connaisse. Ils constituent une mine d’information et d’expérience. A l’INSEAD, le mix de religion, ethnicité, nationalité est unique. Les groupes de travail sont faits pour maximiser les frictions et la diversité et je pense que les créoles sont plutôt bien armés pour affronter ce type d’environnement.

Que vous apporte l’expérience de la mobilité ?

La mobilité m’a apporté une plus grande ouverture d’esprit et une plus grande maturité. Voyager, c’est une occasion de moissonner des idées. Se frotter à des cultures et des opinions différentes permet d’apprendre beaucoup sur le reste du monde, mais aussi sur soi-même. Etre réunionnais peut être un inconvénient comme un avantage. Peu de gens connaissent l’île, cela nous oblige à une certaine humilité et à des efforts pour faire comprendre qui nous sommes. Mais c’est aussi une chance, car très souvent la Réunion éveille la curiosité !


Quels sont vos projets ?

Dans l’immédiat, je vais finir mon MBA ! Après cela, je souhaiterais intégrer l’industrie des énergies renouvelables ou celle des services environnementaux. Je pense qu’il y a un fort potentiel de développement et d’innovation dans ces secteurs. A moyen terme, fort de mon expérience, je me vois bien revenir à la Réunion.

Qu’est-ce qui vous manque de votre île ?

Indéniablement un rougail graton et un bon bouillon de brèdes ! Je peux aussi nommer la chaleur des contacts humains à la Réunion, notre belle hospitalité créole, la nature et les paysages, si singuliers et intenses. Et puis bien sûr, ma famille et mes amis me manquent aussi, ce sont eux que je viens voir régulièrement en vacances.

Quels objets de la Réunion avez-vous apporté dans vos valises ?

En général, j’ai un bocal la pâte piment, de la vanille bourbon et une bouteille de rhum vieux. La nourriture est un plaisir universel et je suis toujours fier de partager des produits péi de qualité. J’ai aussi un ou deux albums d’Ousanousava que j’écoute régulièrement. Les gens qui ne parlent pas créole ont un peu plus de mal à apprécier mais cela reste un plaisir très personnel.

Avez-vous des contacts avec des Réunionnais ?

Je rencontrais régulièrement des amis réunionnais à Londres mais très peu à Dubaï ou à Singapour. Mes amis réunionnais sont dispersés de par le monde et je reste le plus souvent en contact avec eux via internet et les réseaux sociaux.

Quelle est l’image de la Réunion là où vous vivez ?

C’est très simple, elle n’existe pas. Au mieux, c’est un endroit dont on a entendu parler mais que l’on place dans le mauvais océan. J’ai la chance à l’INSEAD de côtoyer plus de 80 nationalités, je pense avoir dû expliquer 79 fois où est la Réunion. Après explication, les gens ont une vision plutôt positive mais voient surtout l’ile comme un paradis exotique et tropical encore relativement inconnu.

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

Malheureusement, je pense que la situation n’est pas brillante, de nombreux défis connus existent : le taux de chômage est toujours aux alentours de 25%, des inégalités sociales toujours fortes et la distance avec notre principal partenaire économique, la métropole, rend les échanges toujours contraignants. Mais je pense que nous avons aussi des opportunités. Personnellement, j’aimerais voir des efforts portés sur deux axes. Le premier est la valorisation de l’environnement : la nature réunionnaise est généreuse, sa biodiversité riche, et je pense qu’il y a des recherches à mener pour en tirer partie. Le second est l’intensification des échanges avec les pays de la région : la zone océan indien où nous nous trouvons a un haut potentiel de développement. La Réunion, grâce à son appartenance à la France, a un environnement politique stable et un niveau de vie élevé. L’île peut ainsi être une base intéressante pour une compagnie souhaitant entrer sur le marché de l’Afrique Australe.


Voir le profil de Xavier How-Choong / Plus de Réunionnais diplômés de Grandes Ecoles

La question du retour

C’est un véritable défi. Les acteurs institutionnels font beaucoup pour favoriser la mobilité des Réunionnais et les encourager à découvrir le monde. Cependant je n’ai pas l’impression qu’il y ait une d’initiative particulière pour les retours. Dommage, si un environnement attractif n’existe pas pour cette diaspora, il y a peu de chance qu’elle revienne et les efforts faits pour la mobilité sont perdus pour la Réunion. Elle devrait être considérée comme un vivier de talents, à intégrer dans la gouvernance des acteurs économiques et sociaux de l’ile.

Ce qui pourrait vous convaincre de revenir habiter à la Réunion.

Trois facteurs vont jouer dans ma décision de revenir à la Réunion. Le premier, c’est le désir de fonder un foyer. La Réunion, grâce a son environnement et sa culture, est un bel endroit où grandir et je souhaiterais que mes enfants connaissent cela. Le second, c’est l’assurance qu’il est possible d’entreprendre sur l’île. Savoir que la société réunionnaise est prête à soutenir ceux qui se lancent dans l’aventure de l’entreprise serait un grand plus pour moi. Enfin le troisième facteur est la connexion de la Réunion aux centres économiques et culturels européens et mondiaux. Une des inquiétudes partagées avec d’autres amis expatriés est qu’un retour à la Réunion se traduira nécessairement par une difficulté à maintenir un réseau international et à voyager.

Ce que vous changeriez sur l’île.

Si je revenais à la Réunion, j’aimerais poser une question : « avons-nous un modèle de développement durable ? ». Pouvons-nous continuer comme nous le faisons aujourd’hui ou bien devons choisir un modèle garantissant un développement et une préservation à long terme de notre territoire ? Il n’y a pas de réponse unique et les sujets à traiter sont multiples. Par exemple : Devons-nous revoir les infrastructures de transport en commun ? Le mix énergétique actuel est-il adapté à nos besoins présents et futurs ? Devons nous enseigner l’Hindi pour faciliter nos échanges avec l’Asie du Sud ?... La réponse appartient à tous les Réunionnais.

Les conseils que vous donneriez aux jeunes Réunionnais.

Si vous avez un rêve, osez partir et osez le faire savoir. Renseignez vous, contactez des Réunionnais qui travaillent dans le domaine qui vous intéresse ou vivent dans la région qui vous attire, Linkedin et Reunionnais du Monde sont là pour ça ! Et surtout, ne vivez pas le départ comme une fatalité mais bien comme une étape et une opportunité.

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