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Olivier Ho-Pun-Cheung, 25 ans, expatrié à Pékin

Publié le 15 mars 2006

Arrivé en Chine il y a plus d’un an dans le cadre d’un échange avec Jing Mao Daxue (University of International Business and Economics of Beijing), Olivier est actuellement à la recherche d’un emploi sur place. Armé d’un master en Commerce International en association avec une grande école étrangère, il parle presque cinq langues et a eu des expériences professionnelles dans quatre pays différents. Olivier participera au 1er village de la diaspora réunionnaise du 14 au 16 octobre 2009 à Saint-Denis.

Olivier Ho-Pun-Cheung
Olivier et son amie près du Yangzi (Fleuve jaune), dans le désert du Tengri où il a fêté ses 25 ans

Racontez-nous votre parcours avant la Chine.

"Je suis originaire de Trois Mares, né de parents fonctionnaires qui m’ont inculqué la valeur de l’argent, le respect et le goût pour le travail physique et intellectuel. J’ai été durant tout mon cursus un élève moyen. Après un Bac S en 2000 au lycée Bois Joly Potier du 14ème kilomètre, j’ai essayé de m’orienter le mieux possible mais ce n’est pas facile lorsque l’on ne connaît pas grand chose au milieu professionnel. J’ai atterri dans un DUT de Génie Chimique / Génie des Procédés à Saint-Quentin dans l’Aisne. Ce fut le moment le plus dur de mon expatriation !"

Pourquoi ?

"L’Aisne est une région très industrielle et il n’y a pas grand chose à faire. Ce qui m’a le plus frappé c’est l’horizon. Quand je regardais au plus loin, je n’avais plus la possibilité de voir les montagnes et la mer ; je ne voyais que des champs, ce qui était synonyme pour moi de perte de repères. Heureusement j’ai sympathisé avec des métros et j’ai lié pas mal d’amitiés avec les étrangers (africains, maghrébins), car ils avaient la même vision du monde que moi et le même mal du pays. En fait j’ai découvert mon île en partant. La beauté de notre histoire, de notre île, la chance des Réunionnais, la tolérance que l’on a encore de la différence..."

Que s’est-il passé ensuite ?

"Ne voyant pas de possibilité de faire un métier qui m’intéressait (technicien supérieur : payé une misère ; prof de science ou ingénieur : Bac+8), je me suis orienté vers le Commerce International. C’est le meilleur choix de mon cursus car il assouvit ma passion pour les voyages et la découverte. Après un BAC+4 et un séjour génial en Espagne lors d’un stage à Barcelone, j’ai voulu me spécialiser et obtenir un BAC+5. Je me suis donc orienté vers l’INSEEC à Paris, en Asian MBA. Cette formation m’a permis de découvrir un peu plus de l’Asie et surtout d’aller en Chine, avec un but bien précis".

Racontez-nous votre arrivée en Chine.

"Aux abords de l’aéroport on dirait l’Europe industrialisée, avec une grisaille perpétuelle. Pendant deux semaines, je n’ai pas pu ouvrir mes fenêtres, incapable de supporter la pollution. Mais la Chine reste un pays magnifique, avec énormément de choses à découvrir et surtout sa population, bien loin de l’image que l’on s’en fait en France et à la Réunion. Ici tout le monde me parle chinois (je suis métis) même si je n’y comprends pas grand chose ! Anecdote sur la Chine : lors d’un voyage en train dans les campagnes en train avec mon amie, loin de tous les touristes, nous avons fait l’animation du wagon pendant deux heures. Tranquillement installés à bavarder, une jeune femme avec son bébé s’installe à côté de nous. Et là c’est l’interrogatoire en bonne et due forme. Elle avait été désignée par les plus vieux membres du wagon pour aller discuter avec les deux étrangers bizarres, car elle connaissait deux phrases en anglais : "hallo", "vere do you fram"... Bref, il a fallut expliquer comment ma copine pouvait être blonde (ils n’en avaient jamais vu !), avec les yeux bleus (summum de la beauté ici) et pourquoi celui qui ressemble à un local ne parle pas un fichu mot alors que elle si. Ce fut un voyage inoubliable".

Professionnellement, vous en êtes où ?

"Arrivé en janvier 2005 à Pékin, j’ai suivi les cours de Jing Mao Daxue (University of International Business and Economics of Beijing) pendant 4 mois. Par la suite, j’ai décidé de valoriser cette expérience par un stage. Après pas mal de recherches, j’ai pu décrocher un stage dans le service marketing de Carrefour. Expérience enrichissante ! Aujourd’hui, après un séjour revigorant dans mon île, je suis de nouveau à Pékin mais cette fois-ci à la recherche d’un emploi, ce qui devrait aboutir sous peu".

Quels sont vos projets ?

"Je voudrais rester jusqu’en 2008, pour profiter des JO. Par la suite je projette d’aller en Amérique du Nord ou en Amérique du Sud. Pour le moment rien n’est décidé et les opportunités sont toutes les bienvenues ! Ce qui est sûr, c’est que je fonderai ma famille à la Réunion pour être proche des miens, voir mes neveux et nièce grandir et rester avec mes parents qui vieillissent".

Que vous apporte cette expérience de mobilité ?

"Elle m’ouvre l’esprit et m’a rapproché de mes proches. J’ai l’impression de moins chipoter sur les détails et d’aller à l’essentiel. Elle me donne aussi le sens des responsabilités. Lorsque je fais un choix ici, il n’y a personne derrière pour couvrir mes bêtises ! Ensuite, la mobilité me permettra de réaliser mes projets professionnels, car dans mon domaine il vaut mieux être mobile et ouvert".

Quels ont été les avantages / inconvénients du fait de venir de la Réunion dans votre parcours ?

"Venir de la Réunion n’a jamais été un handicap pour moi. Etant différent des stéréotypes raciaux, personne n’a jamais su définir ce que je suis... je ne suis ni un Chinois, ni un Français de souche ni... rien. Donc pas de discrimination mais juste de l’étonnement. Donc tant dans le milieu professionnel que relationnel, j’ai essayé d’éveiller l’intérêt des gens pour la Réunion. Ainsi j’ai pu faire connaître mon île un peu plus".

Quel est votre regard sur la situation socio-économique de l’île ?

"L’île a un réel potentiel économique mais sous-exploité ! Elle est un petit bout d’Europe dans l’Océan Indien. Elle pourrait être le point de rencontre entre l’Asie Pacifique-l’Asie du Sud-l’Afrique- et l’Europe. On pourrait créer des zones franches, appliquer des avantages aux sociétés étrangères qui veulent s’implanter dans l’UE, créer une zone high tech comme en Irlande... Et ben non : on a je ne sais plus combien de taux de chômage. Dès qu’il y a une crise (ex chik), c’est la catastrophe et on se focalise sur le tourisme, alors que pleins de choses restent inexploitées. Au niveau social, croyez-vous réellement que l’on pourra continuer à laisser des jeunes sans emploi et sans avenir, sans arriver à des taux d’insécurité comparables à la métropole ? Est-ce qu’il sera toujours juste d’envoyer des jeunes se former à l’extérieur en leur fermant les postes qualifiés sur l’île ? Il faudrait que beaucoup de choses changent à la Réunion, en premier lieu la vision des politiques".

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