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Logement : vers la fin du refus des cautions outre-mer ?

Publié le 24 novembre 2006

Extrait de LIBERATION du 6 juillet 2006

Les cautions venues d’outre-mer font barrage aux locataires. Certaines agences font valoir une clause figurant dans les contrats des assureurs.
Par Tonino SERAFINI

Lors de la dernière rentrée universitaire, Anaïs Dupuy, une étudiante originaire de La Réunion, s’est mise à la recherche d’un appartement pour son frère cadet, venant effectuer une prépa à Rennes (Ille-et-Vilaine). Anaïs déniche un logement dans une agence immobilière. « J’ai visité l’appartement,raconte la jeune femme . Au moment de remplir le dossier, ils m’ont dit : “Vous venez d’outre-mer, il y a un problème avec la caution. Notre compagnie d’assurance refuse de vous assurer.” »

Comme pour la plupart des étudiants, la caution était fournie par ses parents. Or des assureurs garantissant les bailleurs contre les impayés de loyers refusent de couvrir ce risque, lorsque la personne qui se porte caution est domiciliée outre-mer.

« Des milliers de personnes originaires des Antilles, de La Réunion ou de Guyane, se voient refuser l’accès au logement locatif », affirme Patrick Karam, le président du Collectif Dom. Parmi les victimes : des étudiants venant en Métropole ou des salariés.

Selon Patrick Karam, le Collectif Dom « est régulièrement informé [...] de pratiques discriminatoires de la part d’agences immobilières ».

Son association a entamé une campagne de mise en demeure à l’encontre de professionnels de l’immobilier et d’assureurs qui inscrivent dans leurs contrats des clauses excluant de fait les locataires originaires d’outre-mer.

Ainsi le réseau d’agences Laforêt immobilier qui a reçu il y a quelques semaines une lettre de Me David Marie-Marty. L’avocat du Collectif Dom leur demande de spécifier « expressément » aux agences de son réseau « que le refus des cautions émanant de personnes ayant leur résidence fiscale dans un département d’outre-mer est illégal ».

Ce coup de semonce fait suite à un dossier remis par une agence de Villejuif (Val-de-Marne) à un jeune Martiniquais. Dans ce document, il est spécifié que « la caution doit impérativement être domiciliée en France continentale » et que « les revenus de la caution doivent être produits en France continentale ». Deux conditions « exigées par l’assureur Cornhill France », précise une note en bas de page. « Lorsqu’on lit le contrat de Cornhill, on se rend compte que la notion de France continentale exclut les gens d’outre-mer mais aussi les Corses », relève l’avocat.

Le réseau Laforêt s’est engagé à envoyer un courriel à toutes ses agences « pour leur rappeler que refuser une caution d’une personne ayant sa résidence fiscale dans un département d’outre-mer est illégal et passible de sanctions pénales ».

En revanche, Cornhill France ne semble pas disposé à revoir ses clauses. « Nous sommes dans le registre des assureurs et non dans celui du logement. Rien dans le code des assurances n’interdit de limiter territorialement un contrat », a indiqué à Libérationun de ses responsables. Pour l’avocat du Collectif Dom, il s’agit de « pratiques discriminatoires » : « Faire jouer une caution outre-mer, ce n’est pas plus compliqué qu’en Métropole. » Car les clauses des contrats Cornhill empêchent nombre de personnes originaires des Dom d’accéder au logement.

Tonino SERAFINI.

Aux dernières nouvelles, selon Patrick Karam, Président du Collectifdom, "Cornhill France pourrait décider de supprimer toute mention de territorialité dans ses contrats suite à l’assignation en justice que le Collectifdom lui a signifiée. A la rentrée 2006, le Collectif et le Ministère de l’outre-mer agiront de concert pour étendre ces suppressions de clauses discriminatoires aux autres professionnels de l’immobilier, notamment par le biais de la FNAIM".

Réunionnais du Monde - Août 2006

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