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Regard sur l’actualité : une Réunionnaise en Guyane

Publié le 8 juillet 2012

Arrivée en Guyane en 1996, Gretta Auguste est Conseiller bancaire à La Banque Postale à Cayenne. Cette Dyonisienne de 41 ans livre son regard sur deux sujets qui ont placé la Guyane au devant de l’actualité en juillet 2012 : l’orpaillage clandestin et les forages pétroliers.

La Guyane a fait la une de l’actualité cette semaine avec le décès de deux militaires français provoqué par une attaque d’orpailleurs clandestins. Comment cette situation est-elle vécue sur place ?

Il y a un sentiment de ras-le-bol dans la population face à cette escalade dans la violence. Des armes de guerre ont été utilisées lors de cette attaque ! Les victimes auraient pu être des civils, par exemple les agents du Parc Amazonien de Guyane qui oeuvrent dans le diagnostic de l’impact de l’orpaillage illégal sur les milieux naturels. D’ailleurs depuis ce drame, les missions fluviales et terrestres de cet organisme ont été interrompues. Aux nouvelles de ce matin, huit suspects d’origine brésilienne, dont les identités seraient connues, sont recherchés au Surinam. Cette avancée est dûe à la réaction du Surinam qui a été immédiate, suite au déclenchement du dispositif de coopération existant entre nos deux pays.

Comment expliquer ce phénomène de l’orpaillage clandestin ?

On estime qu’à Dorlin, on peut sortir un kilo d’or par jour, soit 82 420€ environ au cours de l’or actuel. Toute cette manne fuit et ne profite pas du tout à la Guyane. En plus d’être un fléau économique, l’orpaillage clandestin est devenu un fléau pour l’homme et pour l’environnement en Guyane. Par exemple, le mercure utilisé pour l’extraction de l’or pollue le fleuve Maroni et les poissons pêchés par les habitants.

Un autre sujet a concerné la Guyane cette semaine : celui des forages pétroliers. Pouvez vous nous éclairer sur ce point ?

C’est un autre sujet sensible dans notre département. Le gouvernement a autorisé il y a quelques jours l’entreprise Shell à reprendre ses prospections de forage au large du pays. Les protestations ne se sont pas faites attendre, car aucune garantie ni protection juridique n’a été mise en place pour protéger la ressource pétrolière et l’environnement. Plusieurs interrogations demeurent pour le peuple guyanais : quels sont les risques environnementaux, en particulier pour la pêche ? Quelles seront les retombées économiques pour le pays ? Y-aura-t-il des créations d’emplois ? Enfin, le carburant va-t-il baisser ? Il faut savoir que la Guyane est un département où le prix de l’essence est très élevé, mais aussi où les distances sont très longues à cause de la taille du territoire.

Plus globalement, quelle est la situation économique et sociale de la Guyane en ce moment ?

Avec un bon de commande rempli pour la base spatiale de Kourou, l’économie guyanaise se trouve revigorée à travers des subventions aux collectivités et des créations d’emplois. On constate aussi depuis quelques temps une forte reprise du secteur du BTP. Toutefois certains secteurs d’activité comme l’or et la pêche restent non maitrisés. Quant au climat social et politique, les évènements de ces derniers jours témoignent d’une montée de l’insécurité et d’un ras-le-bol des Guyanais. La majorité ne veut plus que les ressources du pays et les revenus de transferts ne profitent qu’aux étrangers. Les flux migratoires sont difficilement maitrisables en raison de la situation géographique.

Qu’est ce qui selon vous différencie le plus la Guyane de la Réunion ?

Bien que nous soyons aussi un Dom avec problèmes sociaux proches de ceux de la Réunion, la Guyane est bien différente. C’est le plus grand département francais, avec une superficie de 90 000 km² sur le continent Sud Américain et plus de 96% de forêt équatoriale, compris entre le Surinam et le Brésil. Il existe une grande diversité dans la population, mais une forte proportion de clandestins en raison des frontières non maitrisables. Enfin, contrairement à certains départements, il est encore possible en Guyane de vivre de la chasse et de la pêche. Mais pour combien de temps ?

Article paru dans Le Quotidien du 8 juillet 2012


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