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Crehall Soljah, mission n°1 : répandre le dancehall réunionnais au Québec

Publié le 3 mai 2009

Trois Soljah réunionnais de 21 ans multiplient les sound system dans toute la province de Québec. DJ Nicky, DJ JuicyB et DJ Tyle s’apprêtent à faire vibrer le sol de Rimouski le 15 mai prochain.

Reportage texte, photos et vidéo de Anna Bellissens, en direct du Québec

DJ Nicky, DJ JuicyB, DJ Tyle
Crehall Soljah dans les studios de CHyz à l’Université Laval

Trois jeunes Réunion-nais qui veulent faire goûter les couleurs locales de la Réunion à un public québécois, c’est ce que sont les crehall Soljah. Nicolas Boyer, Laurent Métro et Bruno Poutaredy s’unissent autour d’un même but : faire apprécier le reggae-dancehall réunionnais aux habitants de la belle province.

« Ce qui m’a frappé en arrivant ici, c’est l’immensité de ce territoire », se remémore Nicolas Boyer. Son étonnement ne l’a pas empêché de se fixer pour objectif de répandre le reggae réunionnais sur tout le territoire québécois. On le nomme depuis, DJ Nicky.

Il arrive en Gaspésie il y a trois, après son bac obtenu à la Réunion. « C’est là que de nombreux étudiants réunionnais ont été envoyés avec les bourses. Là-bas, nous étions parmi les premiers immigrants. Alors le choc est parfois brutal, autant pour nous que pour les Québécois. Les plus jeunes n’avaient jamais vu de personne de couleur de leur vie ».

Les trois jeunes de 21 ans sont arrivés au Québec en 2005 grâce aux bourses de l’ANT, l’association nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs de l’outre-mer. Les bacheliers de l’île de la Réunion ont en effet la possibilité de poursuivre leurs études dans la région du Bas Saint Laurent, au Nord de la province québécoise. Bruno Poutaredy est d’accord pour dire que l’entrée en matière reste difficile : « En arrivant, le choc est violent. Il faut regarder sur une carte pour voir à quel point Matane, la ville où j’ai atterri, est loin des zones urbaines ».

Nicolas Boyer, Laurent Métro, Bruno Poutaredy

Laurent Métro est arrivé en Gaspésie la même année que ses deux collègues, mais il était seul dans ces débuts à Rivière-du-Loup. « J’ai pris ma valise et je me suis dis : on va aller voir ce qu’il se passe là-bas ». Nicky était, lui, accompagné d’autres étudiants réunionnais. Laurent a alors rejoint la petite communauté déjà présente. Les deux soljah, DJ à l’origine, ont décidé de former un duo. Bruno est « monté dans le wagon » quelques temps après. « J’ai eu la chance de faire une soirée une fois, Laurent et Nicky sont venus chez moi. C’est comme ça que le trio est parti ».

« Avec Nicky, on mixait chacun de notre côté déjà quatre ans avant notre départ de l’île », raconte Laurent Métro. Les DJs sont pourtant arrivés au Québec les mains vides. « C’est à partir du moment où on a trouvé du matériel qu’on a commencé à faire du son, à écrire nos textes pour chanter les paroles de chez nous ».

Bruno Poutaredy alias DJ JuicyB aux platines

Une fois la locomotive lancée, Laurent et Nicky ont animé des soirées en boîte de nuit, puis ont tenté de développer les sound system dans toute la province. « Notre première expérience ici, c’était dans un bar techno…Nous, bien sûr, on voulait jouer du ragga, mais ça ne marchait pas. Alors on a essayé ailleurs et ça a pris », se remémore Laurent.

Désormais à Québec, ils peuvent compter sur le soutien de leur entourage pour continuer à faire découvrir la musique couleur pays, même à 15 000 km de leur île natale. « On essaye d’importer un maximum de nouveautés grâce aux amis et à la famille restés sur l’île de la Réunion », explique Nicolas. « Pour que les Québécois apprécient cette ambiance, ça prend du temps, mais c’est en bonne voie. On ne peut pas arriver avec notre musique, leur demander de comprendre tout de suite ce que l’on dit dans nos textes, de comprendre tout de suite le créole… Mais le Dancehall a de l’avenir ici. C’est une musique dansante, les québécoises en particulier l’apprécient ».

L’équipe de l’émission West Indies, diffusée les jeudis et samedis sur Chyz

Les soirées sound system se développent, depuis, sur l’agglomération de Québec. Que ce soit au Pub universitaire, à la Ninkasi ou à l’Agitée, les adeptes du concept ont désormais le choix du lieu et du jour de la semaine. « Dans nos soirées, on retrouve de plus en plus de Québécois. Bien sûr, c’est aussi le rendez-vous d’autres cultures, mais les Québécois sont présents », observe Bruno Poutaredy avec satisfaction.

Apporter cette touche réunionnaise, c’est aussi une manière de ne pas trop se languir de son île natale, malgré l’éloignement. « Après des soirées comme celles qui s’organisent à Québec, on se sent regonflé. C’est comme si on avait pris notre dose de Réunion ! ». Bruno Poutaredy n’est pas rentré à la Réunion depuis son arrivée en Gaspésie il y a quatre ans. Il a trouvé sa manière d’importer son chez lui, pour réchauffer les hivers et les cœurs québécois.

Anna Bellissens

Le site de Crehall Soljah Sound System

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